Page 182 - Une lumière sur mon chemin - Louis Even
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30. Mort aux taxes


           Monsieur Georges Dubois demeure dans un coin du pays qui
        n’a pas été visité aussi souvent que d’autres par nos pèlerins de
        saint Michel.  Il n’a jamais été abonné à Vers Demain. Le peu qu’il
        a entendu dire du Crédit Social lui est venu de politiciens; il en est
        resté sous l’impression qu’il s’agit d’un nouveau parti politique en
        quête du pouvoir. Comme il n’a pas grande confiance dans les élec-
        tions pour améliorer les conditions dont tout le monde se plaint,
        ni vieux ni nouveau parti ne l’intéresse. En quoi, il a parfaitement
        raison.

           Au cours d’un voyage, il remarque, en stationnement au bord
        d’un trottoir, une automobile portant un drapeau blanc, sur lequel
        est dessiné un livre ouvert, couleur or, avec une flamme rouge au-
        dessus du livre. Sur la face intérieure d’une vitre latérale, un écri-
        teau avec ces mots en noir sur blanc: «Mort aux taxes». Cette ins-
        cription surprenante ne lui déplaît pas car Georges Dubois, comme
        tous ses voisins, trouve les taxes vraiment trop nombreuses et trop
        élevées pour ses moyens. Tout de même, «mort aux taxes» lui sem-
        ble un peu radical, surtout plus désirable que possible.
           La voiture est vide. Georges Dubois, que cette rencontre a intri-
        gué, doit donc rester sur sa curiosité. Tout au plus, a-t-il entendu un
        passant dire à sa compagne: «Tiens, regarde, le drapeau du Crédit
        Social!»
           Mais plus tard, ayant appris qu’un homme de son patelin est au
        courant du Crédit Social, il ne manque pas de l’interroger, car Geor-
        ges Dubois aime à se renseigner. Il questionne donc et écoute avec
        un visible intérêt. Sa première question:
           Que signifie au juste cette déclaration de guerre que j’ai vue sur
        la vitre de la voiture au drapeau blanc: «Mort aux taxes». Cela veut-
        il dire de diminuer les taxes parce qu’il y en a trop?
           L’autre lui répond:

           Plus que cela, monsieur. Cela veut dire ce que les mots mêmes
        expriment: Tuer les taxes, les supprimer.

           Ce serait sûrement bien beau, remarque monsieur Dubois, mais
        ne faut-il pas que le gouvernement ait de l’argent pour administrer
        et pour les travaux publics?
           De l’argent oui, répond l’autre, mais  des taxes non.
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