Page 90 - Une lumière sur mon chemin - Louis Even
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88 13. Techniciens oui. Technocrates non
que établie à la manière des Fabiens, graduellement pour ne pas
éveiller l’opinion, en complétant une étape lorsqu’il est trop tard
pour lui opposer une résistance fructueuse?
En Russie et dans les autres pays de même structuration politi-
que, le totalitarisme a été établi et est maintenu par un parti unique.
Dans les pays occidentaux, le totalitarisme s’installe très bien gra-
duellement sans supprimer les partis d’opposition. Il s’installe par
la mise en place d’organismes dirigés par des technocrates. On dit
par des «personnes compétentes». Et une fois établie par un parti
au pouvoir, la chose demeure même après une élection qui amène
le parti adversaire au pouvoir. L’expérience est là pour le démontrer.
Ne pas confondre «technocrates» avec techniciens. Les tech-
niciens sont, en effet, des hommes compétents tout désignés
pour exécuter, pour fournir les résultats qui leur sont commandés.
Mais les technocrates, eux, ne veulent pas se contenter d’exécu-
ter ce qui leur est demandé. Ils veulent décider eux-mêmes ce
qu’ils vont imposer comme résultat. Il y a le «quoi faire» et il y a
le «comment le faire». Le «quoi faire», le «quoi demander» doit
rester la décision des personnes, des familles, des groupements
libres, des gouvernements dans leurs juridictions respectives
avec l’assentiment des représentants du peuple. Le «comment
faire» doit être l’affaire des techniciens, des experts en exécution.
L’État étatise, installe une dictature politique
Changer les techniciens en technocrates, c’est changer le
service en dictature. C’est cela qu’on essaie de bâtir dans nos
pays encore libres. Si l’on ne résiste pas, si on laisse faire, on
se réveillera dans une dictature politique aussi totale qu’en pays
communiste. Une dictature qui ne respectera même pas ce qu’il
y a de supérieur et de plus intime chez les personnes. C’est ainsi
qu’on a institué dans notre province de Québec les écoles d’État,
l’hospitalisation d’État, demain la médecine d’État. On aura une
génération formée au goût de l’État. On aura des citoyens dont
les misères physiques traitées dans des hôpitaux d’État, seront
consignées dans des filières ouvertes aux fonctionnaires et aux
inspecteurs de l’État.
Ces empiètements sur la liberté et la dignité de la personne
ne doivent pas être le prix de la sécurité économique. La sécurité
économique, la garantie du pain quotidien, sans la liberté serait un
régime d’écurie, un régime d’animaux domestiques bien traités par