Page 94 - Une lumière sur mon chemin - Louis Even
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92 14. Les fanaux des économistes distingués
— Au-dessus de nos moyens ? Pas du tout, les moyens sont
là: les produits de la nature, de l’agriculture, de l’industrie. Ils ne
menacent pas d’épuisement. D’ailleurs, comment pourrions-nous
vivre au-dessus de ces moyens ? Il faudrait alors vivre avec rien.
— Il ne s’agit pas de ces moyens-là, mais des moyens finan-
ciers. Quand les gens empruntent pour acheter des produits, ils
vivent au-dessus de leurs moyens financiers. Et ça devient bien
trop commun; un frein s’impose.
Faits admis, décision folle
En voilà de bonnes décisions, n’est-ce pas ? On admet que les
gens se nourrissent d’aliments, qu’ils s’habillent de vêtements. Ils
ne mangent certainement pas des livres, des francs ou des dollars
pour passer leur faim. Ils s’habilleraient bien mal en se mettant seu-
lement des livres, des francs ou des dollars sur le corps. On admet
aussi que les biens — aliments, vêtements, etc. — ne manquent
pas plus aujourd’hui qu’hier. Mais l’argent, l’argent qui ne nourrit
pas, qui n’habille pas, lui fait défaut, puisqu’il faut s’endetter pour
payer les produits.
Or, au lieu de mettre l’argent, qui ne répond pas aux besoins
humains, au niveau et au service des biens qui répondent aux be-
soins, ce sont les biens, les choses qui nourrissent et habillent, que
l’on veut limiter au niveau de l’argent qui ne fait rien de cela ! Et
c’est le gouvernement qui impose cette conclusion absurde à son
peuple !
Les biens abondent, oui! Mais l’argent fait défaut, puisqu’il faut
emprunter. Pourtant, pour amener les biens en face des besoins, il
faut du sol, des labours; il faut des forêts, des bûcherons; il faut du
minerai, des mineurs ; il faut du travail, de l’application, de l’habi-
leté, de la compétence, du temps. Tandis que pour l’argent, ça ne
prend que des chiffres frappés sur des rondelles de métal, ou impri-
més sur des rectangles de papier, ou simplement inscrits dans les
livres de banque. Chiffres qui, légalisés, sont acceptés par tout le
monde comme donnant droit à un choix de produits et de services.
Les choses difficiles à faire sont faites, bien faites et en abon-
dance ; et la chose facile à faire n’est pas faite, ou est mal faite, ou
faite sans correspondance avec la fonction qu’elle doit accomplir.
Sa fonction, à l’argent, c’est de mobiliser les choses et le travail
pour la production, puis de permettre d’acheter les choses produi-
tes pour satisfaire les besoins.