Page 260 - Une lumière sur mon chemin - Louis Even
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258 33. Une finance saine et efficace
faite. Or tout cet argent est entré dans le prix de revient de la pro-
duction faite. Si cet argent n’est pas employé pour acheter la pro-
duction, l’écart entre les moyens d’achat et les prix augmentera.
On peut objecter que l’épargne employée à financer un nou-
veau flot de production, par investissement ou autrement, revient
dans la circulation comme pouvoir d’achat. C’est vrai, mais c’est à
titre de dépenses faites par le producteur, donc en créant un nou-
veau prix. Or, la même somme d’argent ne peut pas servir à liqui-
der à la fois le prix correspondant de l’ancienne production et le
prix correspondant de la nouvelle production.
Chaque fois que l’argent épargné revient ainsi à des consom-
mateurs, c’est en créant un nouveau prix, sans avoir liquidé un
ancien prix laissé sans pouvoir d’achat correspondant lorsque cet
argent devenait épargne.
Rendons ce point clair par un exemple:
Voici un ouvrier qui reçoit en salaire mensuel la somme de
300 $. Sur cette somme, il prélève 50 $ pour acheter des actions
dans une entreprise qui construit une nouvelle usine. Les 300 $ de
salaire sont certainement inscrits dans les prix des produits pour
lesquels l’ouvrier a travaillé; mais en face de ces 300 $ de prix, il ne
reste plus que 250 $ de pouvoir d’achat.
La construction de l’usine va remettre les 50 $ en pouvoir
d’achat par les salaires distribués aux ouvriers de la construction.
Mais les produits qui sortiront de la nouvelle usine devront inclure
les 50 $ dans leur prix. Le 50 $ redevenu pouvoir d’achat ne pourra
certainement pas liquider à la fois le 50 $ de prix de l’ancienne pro-
duction et le 50 $ de prix de la nouvelle production.
Cela ne veut pas dire que l’épargnant fait mal en plaçant son
argent dans l’expansion de la production. Il est parfaitement libre
de faire ce qu’il veut d’un argent qui lui appartient. Mais la sous-
traction au pouvoir d’achat global, faite par l’épargne, devrait être
compensée de quelque manière, par un montant d’argent équiva-
lent venant entre les mains des consommateurs (par le dividende
social, par exemple, ou par une hausse de l’escompte compensé);
cela fait, l’effet sur le pouvoir d’achat sera le même que si la pro-
duction avait été financée directement par des crédits nouveaux,
puisque ces crédits nouveaux remplacent l’épargne détournée du
pouvoir d’achat.
Le système actuel ne fait pas cette compensation. Il insiste sur