Page 30 - Sous le Signe de l'Abondance
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30   Chapitre 5

        me entrent de moins en moins dans le labeur quotidien de l’ouvrier;
        celui-ci n’est guère qu’un automate, prélude de la machine d’acier.
            Une  formule  remédiatrice  serait  la  réduction  des  heures
        d’ouvrage au strict minimum, pour laisser à cet ouvrier des loisirs
        pendant lesquels il pourra à son gré exercer ses facultés, redevenir
        un homme. L’autre est de hâter l’avènement de la machine qui fera,
        à la place de l’ouvrier, le mouvement uniforme qui n’est déjà plus
        un travail d’homme proprement dit.
            Mais,  avec  les  règlements  économiques  actuels,  qui  exigent
        la  participation  personnelle  à  la  production  pour  obtenir  un  titre
        à la production, on devine de quoi s’accompagne la libération de
        l’ouvrier.  Les  loisirs  s’appellent  chômage,  l’homme  libéré  est  un
        crève-faim.
            Les machines, assure-t-on, ne déplacent pas la main-d’oeuvre
        de façon durable, parce que de nouvelles occupations, créées par
        de nouveaux besoins, offrent aux sans-emploi un débouché nou-
        veau, au moins jusqu’à ce que là aussi la machine vienne le chas-
        ser un jour. Tout de même, ces dérangements, ces expropriations
        continuelles du travail de l’ouvrier, désorganisent de plus en plus
        sa vie, bannissent toute sécurité, empêchent de fonder sur l’avenir,
        forcent la multiplication des interventions d’Etat, conduisent à l’en-
        régimentation.
            Faut-il donc approuver les oppositions qu’on a toujours remar-
        quées à l’avènement de presque toute machine nouvelle? Pas du
        tout. Mais il faut adapter le système de distribution des biens.
            Puisque les machines augmentent les biens au lieu de les di-
        minuer, la production mécanique ne devrait qu’augmenter l’abon-
        dance dans les foyers. même si le travail personnel de l’homme
        dans la production diminue. Et cela devrait se faire sans heurts,
        sans bouleversements, sans enrégimentation. C’est possible, à la
        condition qu’on dissocie, au degré voulu, le droit à la production
        de la contribution personnelle à la production.
            C’est, on le verra plus loin, ce dont se croit capable le Crédit
        Social, en introduisant dans la distribution le régime des dividen-
        des  à  TOUS  et  à  CHACUN,  dans  la  mesure  où  le  salariat  reste
        impuissant à disposer des biens.
            Avec la production de plus en plus spécialisée et de plus en
        plus mécanisée, chaque producteur, homme ou machine, fournit,
        dans la ligne de son emploi, une quantité de plus en plus considé-
        rable de biens qu’il n’utilise pas lui-même.
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