Page 33 - Sous le Signe de l'Abondance
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Pauvreté en face de l’abondance 33

            L’existence de la pauvreté généralisée, en face de tant de pro-
        duction et d’une énorme capacité de production non utilisée, est
        une terrible accusation contre l’organisme de distribution.
            Jamais l’offre ne fut si abondante. En face de l’offre, n’existe-t-il
        donc pas une demande?
            La demande existe. Mais le titre qui lui donne accès à l’offre
        fait défaut; ce titre, c’est l’argent.
                   Demande réelle, demande efficace
            Il convient, en effet, de distinguer entre demande réelle et de-
        mande efficace.
            La demande réelle est celle qui découle de besoins réels. Tant
        qu’il y a des gens qui ont faim, il existe une demande réelle pour
        de la nourriture. Tant qu’il y a des gens sans abri convenable, il
        existe une demande réelle de logement. Tant qu’il y a des malades,
        il existe une demande réelle de remèdes et de soins médicaux.
            Mais cette demande réelle ne devient efficace que si elle pré-
        sente le titre à la production, l’argent. La demande efficace existe
        seulement là où l’argent est uni au besoin.
            Sous  le  régime  économique  actuel,  en  temps  normal,  on
        constate beaucoup de demandes réelles dépourvues du titre qui
        les rendrait efficaces. La production, obligée de récupérer ses frais,
        cherche les endroits où il reste encore un peu d’argent et met tout
        en oeuvre pour y susciter une demande. C’est la pression de vente,
        qui ne répond plus à l’appel du consommateur, mais à l’appel du
        producteur.
            C’est le renversement de l’ordre économique. Le consomma-
        teur devient l’instrument à exploiter, non plus le maître à servir.
            La solution humaine serait de faire venir l’argent là où est le
        besoin, non pas de faire naître le besoin là où est l’argent. Rendre
        efficace la demande réelle, et non pas créer des besoins artificiels
        là où n’existe pas de demande réelle.
            Pour réconcilier la demande réelle et la capacité de payer, remar-
        que le major Douglas, il faudra renverser la poursuite du pouvoir et
        la remplacer par la poursuite de la liberté, et cela implique une modi-
        fication du syste de distribution (Economic Democracy, p. 88).
            Il  ajoute,  avec  une  juste  conception  de  la  fin  de  l’économie:
        «S’il reste encore un peu de bon sens dans le monde, on admet-
        tra que la demande réelle est l’objectif propre de la production, et
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