Page 232 - Sous le Signe de l'Abondance
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232   Chapitre 46

        mun. Personne ne peut se proclamer propriétaire unique des amé-
        liorations nouvelles: elles sont un nouvel anneau dans la chaîne
        du progrès, mais un nouvel anneau qui serait impossible sans les
        précédents.
            L’initiative de l’entrepreneur et les activités qu’il va enrôler ap-
        portent certainement une part au progrès: cette part est privée et
        doit donner une récompense à ses auteurs, sous forme de profits
        ou de salaires. Mais la part qu’y apporte la société elle-même est de
        plus en plus considérable.
            Et quelle part y apporte le banquier? Le banquier ne fait que
        ratifier l’évaluation du progrès. Il accepte ou refuse de monnayer le
        progrès que l’emprunteur projette de concrétiser.
                             La part de chacun

            Quel est maintenant le résultat du monnayage pour les divers
        intéressés: l’emprunteur, le public, le banquier — sous le régime
        actuel?
            Commençons par le banquier. C’est bien lui le premier béné-
        ficiaire d’un progrès auquel il ne contribue pas personnellement,
        et sur lequel il n’a pas plus de droit que les autres membres de la
        communauté.
            Remarquons bien, en effet, que le banquier accomplit une dou-
        ble fonction dans l’opération décrite. Il monnaye le progrès, puis il
        prête le fruit du monnayage.
            Lorsqu’il monnaye le progrès, il accomplit un acte de souve-
        rain. Il le fait en vertu d’une charte que le gouvernement fédéral
        lui a octroyée. Il fait acte de souverain, par une simple délégation
        de pouvoir, d’un pouvoir qui de droit réside dans le gouvernement
        souverain. Le fruit de cet acte doit donc être un fruit social, un bien
        communal.
            Mais il n’en est rien. A peine Monsieur Jones, souverain, a-t-il
        monnayé le progrès, il fait cette monnaie propriété de Monsieur
        Jones, banquier. Et notre artiste, redevenu simple banquier, préte
        bel et bien, au profit de la banque, l’argent qu’il vient de monnayer
        lorsqu’il exerçait le rôle de souverain par délégation d’un pouvoir
        existant pour le bien commun.
            Cette même personne, souverain pour monnayer et banquier
        pour  prêter,  profite  donc  du  premier  rôle,  du  rôle  de  souverain,
        pour passer au banquier prêteur ce qui devrait de droit appartenir
        au peuple.
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