Page 179 - Sous le Signe de l'Abondance
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Chapitre 3
Le progrès désembauche, le système
financier doit désembaucher
(Article de Louis Even, paru dans Vers Demain de février
1966.)
Marché communautaire
Promenez un regard sur tout ce qu’il y a dans votre maison:
que ce soit un piano ou une cravate, un lit ou une fourchette, ce
sont tous des objets achetés. Si c’est un présent, celui qui vous l’a
donné a d’abord dû l’acheter.
A moins que vous soyez un cultivateur, tout ce qu’il y a sur
votre table ou dans votre garde-manger, c’est aussi du «acheté».
Même le cultivateur a sur sa table des choses qu’il a achetées,
quand même ce ne serait que le sel et le poivre; et il a aussi acheté
les instruments aratoires qui lui ont permis de produire ce qu’il y a
sur sa table et ce qu’il offre sur le marché.
Telle est la vie moderne. On travaille à faire des produits, ou
des parcelles de produits, qui ne sont pas pour sa maison. C’est
pour mettre sur le grand marché communautaire, sur l’ensemble
des marchés du pays.
Puis, chacun va à ce marché communautaire pour choisir ce
qui lui convient. Choisir — dans la mesure où il possède le moyen
de choisir. C’est que les produits ne se donnent pas, ils se vendent.
Ils sont marqués d’un prix, en piastres et en sous. Pour avoir un
produit, il faut posséder l’équivalent en argent, en piastres et en
sous. Plus vous avez de piastres, plus vous avez de liberté de choix.
Et si vous n’avez pas du tout de piastres, eh bien, vous ne pouvez
absolument rien choisir: vous devez vivre de la charité des autres.
Prix et pouvoir d’achat
Cela veut dire que notre niveau de vie dépend de l’existence de
deux choses: l’existence de produits devant nous, et l’existence de
pouvoir d’achat dans nos poches.
L’existence de produits devant nous — produits dans les ma-
gasins, produits dans les entrepôts — cela ne semble pas poser de
problème aujourd’hui. Les produits viennent aussi vite qu’on les
emporte, sauf peut-être en temps de guerre, quand on arrête déli-