Page 225 - Sous le Signe de l'Abondance
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Chapitre 45
La leçon du chauffeur de fournaises
(Radio-causerie préparée par Louis Even, reproduite dans Vers
Demain du 15 novembre 1944.)
Trois chaudières à vapeur, reliées ensemble, avec un foyer sous
chacune. Dans un appartement à côté, du charbon.
Laissons de côté les détails de la tuyauterie, les pompes d’ali-
mentation et autres choses, trop techniques pour nous. Mais nous
remarquons, bien en évidence, quelque chose qui ressemble à un
réveille-matin: un cadran chiffré, avec une aiguille qui recule, avan-
ce, reste en place en vibrant presque continuellement.
Sans être ni ingénieurs, ni physiciens, nous pouvons tout de
même lire sur le cardan: 20, 30, 100, 200.
Dans l’appartement des chaudières, un chauffeur: l’homme en
charge des feux, que l’on a souvent coutume d’appeler l’ingénieur.
Il n’est pas très occupé en ce moment; posons-lui quelques
questions:
— Qu’est-ce donc que ce cadran-là, monsieur?
— C’est le cadran indicateur de pression. Les savants disent:
un manomètre.
— Que signifient les chiffres sur le cadran?
— Ils indiquent le nombre de livres de pression de vapeur, dans
les chaudières, au pouce carré.
— Ça vous sert-il à vous, monsieur le chauffeur?
— Mais certainement. C’est pour moi l’indication capitale. Je vois
à ce que la vapeur se tienne constamment autour de 100 livres.
— Pourquoi? Et à quoi sert cette vapeur?
— Cette vapeur sert à faire tourner les moteurs dans l’usine. Si
la pression était trop faible, les moteurs marcheraient au ralenti ou
s’arrêteraient. C’est pourquoi je la maintiens à 100 livres.
— Combien mettez-vous de pelletées de charbon par heure
pour maintenir la vapeur à la pression de 100 livres?
— Cela dépend de ce que font les moteurs. S’ils dépensent
beaucoup de vapeur, l’aiguille indique une baisse de pression, et
j’active les feux. Si les moteurs forcent moins, s’il y en a qui arrê-
tent, la pression monte, l’aiguille l’indique et je modère les feux.