Page 60 - La démocratie économique vue à la lumière de la doctrine sociale de l'Église
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60 Leçon 4
gent ne fait pas de petits. Or le banquier ne met l’argent au monde
qu’à condition qu’il fasse des petits. Comme ni le gouvernement ni
les particuliers ne font d’argent, personne ne fait les petits réclamés
par le banquier. Même légalisé, ce mode d’émission reste vicieux
et insultant.
Déchéance et abjection
Cette manière de faire l’argent du pays, en endettant gouverne-
ments et particuliers, établit une véritable dictature sur les gouver-
nements comme sur les particuliers.
Le gouvernement souverain est devenu un signataire de dettes
envers un petit groupe de profiteurs. Le ministre, qui représente
des millions d’hommes, de femmes et d’enfants, signe des dettes
impayables. Le banquier, qui représente une clique intéressée à
profiter et à dominer, manufacture l’argent du pays.
En l’absence de sang, les humains ne peuvent survivre: alors il
est approprié de comparer l’argent au sang
économique de la nation. Le Pape Pie XI
écrivait en 1931 dans son encyclique Qua-
dragesimo anno (n. 106):
«Ce pouvoir est surtout considérable
chez ceux qui, détenteurs et maîtres abso-
lus de l’argent et du crédit, gouvernent le
crédit et le dispensent selon leur bon plai-
sir. Par-là, ils distribuent le sang à l’orga-
nisme économique dont ils tiennent la vie Pie XI
entre leurs mains, si bien que, sans leur consentement, nul ne
peut plus respirer».
Quelques lignes plus loin, dans la même encyclique, le Pape par-
le de la déchéance du pouvoir: les gouvernements sont déchus de
leurs nobles fonctions et sont devenus les valets des intérêts privés.
Le gouvernement, au lieu de piloter le pays, s’est transformé en
percepteur d’impôts; et une grosse tranche du revenu des taxes, la
tranche la plus sacrée, soustraite à toute discussion, est justement
l’intérêt sur la dette publique.
Aussi la législation consiste-t-elle surtout à taxer le monde et à
placer partout des restrictions à la liberté.
On a des lois pour protéger les remboursements aux faiseurs
d’argent. On n’en a pas pour empêcher un être humain de mourir
de misère.