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Moïse et le buisson ardent (Exode 3)




        la doublure de son manteau, et que l’on n’a découvert    Avant la nuit du 23 novembre 1654, cela est clair,
        qu’après sa mort. S’il est impossible de savoir exac-  Pascal  «n’a  aucun  doute  sur  l’existence  de  Dieu.
        tement quelle est la nature de ce qui s’est passé dans   Il sait aussi que ce Dieu est le souverain bien. […]
        l’âme de Pascal cette nuit-là, il apparaît qu’il s’agit   Ce qui lui manque et ce qu’il attend, ce n’est pas
        d’une  rencontre  dont  lui-même  a  reconnu  l’analo-  un savoir mais un pouvoir, ce n’est pas une vérité
        gie avec celle, fondamentale dans toute l’histoire de   mais une force». Or cette force lui est donnée par
        la révélation et du salut, vécue par Moïse devant le   grâce: il se sent attiré, avec certitude et joie, par
        buisson ardent (cf. Ex 3).                           Jésus-Christ: «Nous ne connaissons Dieu que par
            Le terme «Feu», que Pascal a voulu placer en tête   Jésus-Christ. Sans ce médiateur est ôtée toute com-
        du  Mémorial,  nous  invite,  toute  proportion  gardée,   munication avec Dieu». Découvrir Jésus-Christ, c’est
        à proposer ce rapprochement. Le parallèle semble     découvrir le Sauveur et Libérateur dont j’ai besoin:
        indiqué par Pascal lui-même qui, immédiatement       «Ce Dieu-là n’est autre chose que le réparateur de
        après l’évocation du feu, a repris le titre que le Sei-  notre misère. Ainsi nous ne pouvons bien connaître
        gneur s’était donné devant Moïse: «Dieu d’Abraham,   Dieu qu’en connaissant nos iniquités». Comme tou-
        Dieu d’Isaac, Dieu de Jacob» (Ex 3, 6.15), en ajoutant:   te conversion authentique, la conversion de Blaise
        «non des philosophes et des savants. Certitude. Cer-  Pascal se joue dans l’humilité qui nous délivre « de
        titude. Sentiment. Joie. Paix. Dieu de Jésus-Christ».  notre conscience isolée et de l’autoréférence».
            Oui,  notre  Dieu  est  joie,  et  Blaise  Pascal  en  té-  L’intelligence immense et inquiète de Blaise Pas-
        moigne à toute l’Église ainsi qu’à tout chercheur de   cal, emplie de paix et de joie devant la révélation de
        Dieu: «Ce n’est pas le Dieu abstrait ou le Dieu cosmi-  Jésus-Christ, nous invite, selon l’«ordre du cœur», à
        que, non. C’est le Dieu d’une personne, d’un appel,   marcher sûrement à la clarté de ces «célestes lumiè-
                                                             res». Car si notre Dieu est un «Dieu caché» (cf. Is 45,
        le Dieu d’Abraham, d’Isaac, de Jacob, le Dieu qui est   15), c’est parce qu’il «a voulu rester caché», de sorte
        certitude, qui est sentiment, qui est joie». Cette ren-  que notre raison, illuminée par la grâce, n’aura jamais
        contre, qui a confirmé à Pascal la «grandeur de l’âme   fini de le découvrir. C’est donc par l’illumination de
        humaine», l’a comblé de cette joie vive et inépuisa-  la grâce que l’on peut le connaître. Mais la liberté de
        ble: «Joie, joie, joie, pleurs de joie».             l’homme doit s’ouvrir, et déjà Jésus nous console:
            Et cette joie divine devient pour Pascal le lieu de   «Tu ne me chercherais pas si tu ne m’avais trouvé».
        la confession et de la prière: «Jésus-Christ. Je m’en
        suis séparé: je l’ai fui, renoncé, crucifié. Que je n’en               Foi et raison
        sois jamais séparé». C’est l’expérience de l’amour         Si  la  foi  est  raisonnable,  elle  est  aussi  un  don
        de ce Dieu personnel, Jésus-Christ, puisqu’il a pris   de Dieu, et ne saurait s’imposer: «On ne prouve pas
        part à notre histoire et que sans cesse il prend part   qu’on doit être aimé en exposant d’ordre les causes
        à notre vie, qui entraîne Pascal sur le chemin de la   de l’amour, cela serait ridicule», relève Pascal avec
        conversion profonde, et donc de cette «renonciation   la finesse de son humour, en traçant un parallèle
        totale et douce», parce que vécue dans la charité, à   entre l’amour humain et la façon dont Dieu nous fait
        «l’homme ancien corrompu par les convoitises qui     signe. Pas plus que l’amour, «qui se propose mais ne
        l’entraînent dans l’erreur» (Ep 4, 22).              s’impose pas – l’amour de Dieu ne s’impose jamais». u


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