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Deux objections au dividende:


                      paresse et communisme




            Ceux qui entendent parler pour la première fois de   sonne, c’est un dividende social. Dans son encyclique
        dividendes, ou d’un revenu minimum garanti distribué   Caritas in veritate, Benoît XVI reprend aussi l’idée que
        à tous, soulèvent souvent les deux objections suivan-  le travail ne doit pas être l’unique source de revenu (n.
        tes: plus personne ne voudra travailler, et/ou que c’est   37): «La vie économique a sans aucun doute besoin
        du communisme, se faire vivre par les taxes des contri-  du contrat (les salaires en échange du travail fourni)
        buables. Il est vrai que si ce revenu garanti est financé   pour réglementer les relations  d’échange entre  va-
        par les taxes, la dernière accusation sera valable, mais   leurs équivalentes. Mais elle a tout autant besoin de
        cette accusation ne tiendrait pas avec le dividende du   lois justes et de formes de redistribution guidées par
        Crédit Social, puisqu’il serait financé non pas par les   la politique, ainsi que d’œuvres qui soient marquées
        taxes, mais par de l’argent nouveau, créé sans intérêt,   par l’esprit du don.»
        et n’appauvrirait personne.                              Dans un autre encyclique, Deus caritas est (Dieu
            Certains  économistes, comme Milton Friedman,    est amour, n. 25-26), Benoît XVI écrivait aussi: «L’Égli-
        aiment à répéter qu’on n’a rien pour rien, qu’il n’exis-  se est la famille de Dieu dans le monde. Dans cette
        te rien de gratuit dans la vie («there is no such thing   famille,  personne ne doit souffrir par  manque du
        as a free lunch»). Mais la nature abonde d’exemples   nécessaire… Le but d’un ordre social juste consiste
        qui prouvent le contraire. L’air que nous respirons, le   à garantir à chacun, dans le respect du principe de
        soleil,  l’eau,  etc.,  sont  tous  des  dons gratuits  de  no-  subsidiarité, sa part du bien commun.»
        tre Créateur. Dieu Lui-même nous comble de gratui-       Ce sont les lois de sécurité sociale actuelles qui
        tés avec les ressources naturelles et la nourriture qu’Il   découragent le travail: on les donne à condition que
        donne en abondance: le dividende serait le reflet de   les gens ne travaillent pas; si les gens veulent avoir un
        cette générosité, de ces gratuités de Dieu.          revenu supplémentaire, on leur coupe leur chèque de
            Ceux qui sont contre le dividende aiment bien aus-  sécurité sociale. De plus, ce chèque de sécurité socia-
        si citer cette phrase de saint Paul, dans sa deuxième   le est financé par les taxes de ceux qui travaillent, et
        lettre aux Thessaloniciens: «Si quelqu’un ne veut pas   qui parfois, malgré leur salaire, se retrouvent à avoir
        travailler, il ne doit pas manger non plus.» (2 Th 3, 10.)     moins d’argent à la fin du mois que ceux qui ne tra-
        À les écouter, on ne devrait même pas verser d’aide à   vaillent pas et qui reçoivent le chèque. Cela crée du
        ceux qui ont perdu leurs revenus en raison du confi-  mécontentement, avec raison.
        nement  actuel.  Le pape  Pie XI, dans son encyclique    Le dividende du Crédit Social est versé sans condi-
        Quadragesimo anno sur l’instauration de l’ordre social,   tions à tous les citoyens, qu’ils soient salariés ou non,
        datée du 15 mai 1931, donne une réponse à cette accu-  du seul fait qu’ils sont tous héritiers du progrès et des
        sation, au paragraphes 63 et 64:                     richesses naturelles du pays. Et il n’est pas financé par
            «Observons à cet égard combien c’est hors de pro-  les taxes des travailleurs, donc personne n’est pénali-
        pos et sans fondement que certains en appellent ici au   sé: tous reçoivent un dividende, et ceux qui travaillent
        témoignage de l’Apôtre: “Si quelqu’un ne veut pas tra-  reçoivent leur salaire en plus.
        vailler, il ne doit pas manger non plus.” L’Apôtre, en ef-                                                             Alain Pilote
        fet, condamne par ces paroles ceux qui se dérobent au    Dans la brochure du Syllabaire du Crédit Social,
        travail qu’ils peuvent et doivent fournir; il nous presse   Louis Even répond à ces deux objections de paresse
        de mettre soigneusement à profit notre temps et nos   et de communisme, ou égalitarisme:
        forces d’esprit et de corps, et de ne pas nous rendre à           Objection: la paresse
        charge à autrui alors qu’il nous est loisible de pourvoir
        nous-mêmes à nos propres nécessités.                     — Le Crédit Social va faire des paresseux.
            «En aucune manière  il  ne présente  ici  le  travail   — Pourquoi?
        comme l’unique titre à recevoir notre subsistance. Il    — Parce qu'il veut augmenter l'argent, et l'argent
        importe donc d’attribuer à chacun ce qui lui revient   fait des paresseux.
        et de ramener aux exigences du bien commun ou aux        — C'est justement quand il y a de l'argent que les
        normes de la justice sociale la distribution des res-  produits se  vendent;  et  c'est  quand  les  produits se
        sources de ce monde, dont le flagrant contraste entre   vendent que l'industrie donne du travail à son person-
        une poignée de riches et une multitude d’indigents   nel. Or, ce n'est pas le travail, mais la réduction à l'inac-
        atteste de nos jours, aux yeux de l’homme de cœur,   tion, qui tend à faire des paresseux.
        les graves dérèglements.»                                D'ailleurs, la paresse est un vice — un péché capi-
            Ce qui revient à chacun, ce qui est dû à chaque per-  tal. Ce n'est pas par des moyens financiers que l'on


        26     VERS DEMAIN  mai-juin-juillet 2020                                          www.versdemain.org
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