Page 17 - Vers Demain - mai 2020
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Une fois le nécessaire obtenu,

             l’homme qui a le sens de la

            liberté peut refuser des pro-
        grammes qui l’enchaîneraient.

             Quant à l’homme insatiable
           qui court toujours après plus

               d’argent, il est un esclave:
                          esclave de l’argent.



            Il reste à admettre que chacun, à seul titre de   capitalistes, sans exclure la part supplémentaire spé-
        membre de la société, possède un droit individuel à   ciale due à ceux qui contribuent à mettre le capital en
        une part de cette abondante production. Voyons si ce   rendement.
        droit est réel.                                          S'il suffisait de 1 pour cent de la population pour
                 Un grand héritage commun                    faire  sortir  la  production  moderne  de  cet  immense

            L’abondante production moderne est due, pour     capital réel, bien, plus réel que les bouts de papier
        une part, à l’existence de richesses naturelles, créées   ou chiffres appelés dollars, pourrait-on logiquement
                                                             soutenir que seul ce 1 pour cent de la population
        par Dieu pour tous les hommes. Elle est aussi le fait   aurait droit aux produits? Le même argument tient,
        de  découvertes  scientifiques  et  de  leur  application,   si au lieu de 1 pour cent, il faut y employer 40 pour
        d'inventions et de procédés perfectionnés, d'une or-  cent de la population. Les autres, 60 pour cent, ne
        ganisation sociale qui permet la division du travail,   peuvent être exclus du droit à une part des produits
        faisant  de  tout  le  système  producteur  une  vaste  et   ils gardent leur statut de co-héritiers; de coproprié-
        féconde coopérative de production.                   taires du capital commun mis en oeuvre, par les 40
            Or, ces choses-là — ces acquisitions scientifiques,   pour cent. Ces 40 pour cent aussi sont co-héritiers et,
        ces perfectionnements ajoutés les uns aux autres, ces   comme tels, doivent obtenir leur part de co-héritiers
        progrès de toutes sortes, n'ont point été gagnés par le   en plus de leur part comme producteurs.
        travail de ceux que la production emploie présente-      L'effort  du  producteur  doit  rester récompensé.
        ment. Ils ne sont pas, non plus, l'oeuvre seulement des   Mais la plus grande part de la production, est due
        savants et techniciens vivants qui s'activent à poursui-  à l'enrichissement par l'association et par l'héritage
        vre les recherches et à accroître les développements.   social. C'est là un enrichissement non gagné (en
        Pas même l'oeuvre uniquement des quatre ou cinq      anglais, unearned increment of association), dont le
        dernières générations. C'est le fruit de siècles de lutte   fruit doit aller à tous les membres de l'association, de
        pour vaincre la pénurie; de siècles d'efforts, d'étude   la société.
        des forces de la nature pour les maîtriser, de recher-
        ches, de découvertes, d'inventions et, de perfection-    Cette part est potentiellement suffisante pour
        nement  d'inventions  conduisant  à  des  inventions  et   couvrir le nécessaire à tous. Le dividende à tous et
        perfectionnements nouveaux. C'est tout un héritage   à chacun, à seul titre de membre de la société, doit
        d'acquisitions ajoutées les unes aux autres, — héritage   donc être un montant suffisant pour garantir au moins
        transmis et accru de génération en génération. Et c'est   le nécessaire à la vie, et graduellement davantage à
        l'existence d'une société organisée, bien commun, qui   mesure que le progrès supplante davantage le travail
        a permis ces transmissions.                          individuel dans la production globale du pays.
            Notre génération, comme les précédentes, est         Il faut donc admettre que, non seulement l'abon-
        donc héritière des générations passées. C'est un héri-  dance est à notre disposition, mais aussi que la sécu-
        tage commun, immense, sur lequel nul ne peut récla-  rité économique sans condition restrictive, donc avec
        mer un droit prioritaire. L'héritage appartient à tous.  la  sauvegarde  de  la  liberté  personnelle,  est  un  droit
            Chaque membre de la société est, avec les autres   de naissance de chaque homme, femme et enfant du
        membres,  co-héritier  de  cette  richesse,  de  cet  im-  pays.
        mense capital devenu le facteur prépondérant de la       Les règlements financiers actuels méconnaissent
        production actuelle.                                 ce droit. Le socialisme l'ignore. L'application des pro-
            Il faut certainement que ce grand capital commun   positions financières du Crédit Social en assurerait la
        soit mis en rendement. Mais tous et chacun ont droit   réalisation. v
                                                                                                                   Louis Even
        à une part du résultat, à titre de co-héritiers, de co-

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