Page 16 - Vers Demain - mai 2020
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u  ter au peuple l’acquisition des biens que les citoyens,    «Seigneur, ne me donne
        dans leur ensemble, s’accordent à désirer.                  ni pauvreté ni richesse,
            Les besoins d’une population sont certainement    laisse-moi goûter ma part de
        nombreux et variés. Parmi les individus qui la com-
        posent, les uns peuvent vouloir ardemment des cho-    pain, de crainte que, comblé,
        ses qui en laissent d’autres totalement indifférents. Et   je ne me détourne et ne dise:
        l’ordre social serait bien imparfait s’il donnait la prio-  ‘Qui est Yahvé?’ ou encore,
        rité à la satisfaction d’un petit nombre, pendant que le
        grand nombre souffrirait de frustrations dans la pour-  qu’indigent, je ne vole et ne
        suite d’objectifs fondamentaux.                      profane le nom de mon Dieu»
            Or, il est certainement deux choses que chacun               (Proverbes 30, 8-9)
        cherche premièrement et avant tout dans la société
        où il vit. Ces deux choses sont:
            1.  La sécurité économique;                      mique à tous — mais moyennant centralisation, diri-
                                                             gisme, plans, conduite de l’économie par I’État, avec
            2.  La liberté personnelle.                      bureaucratie, inspections, enquêtes, enrégimenta-
            Par sécurité économique, entendons l’accès aux   tions et tout le reste. Une société de citoyens classés;
        choses nécessaires à la vie, le moyen de satisfaire   attelés et nourris. Comme les animaux domestiques,
        les besoins essentiels de l’individu. Donc: nourriture,   comme les chevaux dans l’écurie.
        vêtement, logement, soins de santé, et le degré d’ins-   L’école créditiste ne veut point de cette sécu-
        truction indispensable à tout citoyen dans le monde   rité  économique-là.  Elle veut  pour chaque citoyen
        actuel.                                              la sécurité du capitaliste, qui n’a point besoin d’être
            Théoriquement, la liberté personnelle, est d’un   embauché, inspecté, enquêté, pour toucher les divi-
        rang supérieur à la sécurité économique. Mais dans   dendes de son capital. Ce n’est pas lui-même qui met
        la pratique, la liberté ne peut guère s’affirmer avant la   son capital en rendement – c’est le producteur. Le
        satisfaction au moins du nécessaire. Le nécessiteux   producteur a sa récompense (salaire ou profit), et le
        est l’esclave des conditions qu’on lui impose pour   capitaliste a son dividende.
        avoir le droit de vivre. Il n’est pas libre, à moins de   Eh bien, l’école créditiste, considérant chaque ci-
        renoncer à vivre.                                    toyen comme co-héritier d’un capital communautaire
            D’autre part, une fois le nécessaire obtenu, sur-  que des travailleurs mettent en rendement, maintient
        tout au niveau d’une honnête subsistance, l’homme    la récompense à ces travailleurs, mais introduit le di-
        qui a le sens de la liberté peut refuser des program-  vidende à tous, employés ou non dans la production.
        mes qui l’enchaîneraient, tout en l’enrichissant maté-
        riellement. Il considère la liberté comme une richesse      Abondance suffisante pour tous
        supérieure à l’argent ou à un plus grand confort maté-   Le but d’un système économique est de fournir
        riel.                                                les produits et services répondant à des besoins hu-
            Quant à l’homme insatiable qui court toujours    mains, dans la mesure, au temps et au lieu où ils sont
        après une fortune plus grosse, qui poursuit l’argent,   requis.
        plus d’argent, et encore plus d’argent, il est, lui aussi,   Ce but est, physiquement, facile à réaliser
        un esclave: esclave de l’argent.                     aujourd’hui. La caractéristique de notre époque, c’est
            Disons que la liberté commence avec la satis-    la possibilité de produire en abondance les biens va-
        faction du nécessaire et cesse avec la poursuite du   riés nécessaires à la vie. Et de le faire avec une dimi-
        superflu.                                            nution constante du besoin de labeur humain.
                 Socialisme ou Crédit Social?                    C’est de tout temps que l’homme a essayé de suf-
            En matière de sécurité économique, des hom-      fire à ses besoins matériels avec un minimum d’ef-
        mes politiques, des économistes aussi, et même des   forts, de façon à pouvoir disposer de son temps et
                                                             de ses activités pour d’autres fonctions humaines que
        sociologues, disent que la garantie de la sécurité éco-  la  fonction  purement  économique.  Et  aujourd’hui,
        nomique exige le sacrifice d’une partie de la liberté   ce but, une production suffisante, abondante même,
        personnelle.  En  quoi  ils  tiennent,  inconsciemment
        peut-être, de l’école socialiste. Ils peuvent bien citer   avec des efforts décroissants — est atteint, au point
                                                             de pouvoir fournir assez pour tous sans que tous
        des exemples pris dans les législations actuelles;   aient besoin d’être employés dans la production.
        mais  c’est  justement  parce  que  les  gouvernements
        actuels, de n’importe quel nom, cherchent des amé-       Nul ne peut nier le fait que la capacité moderne de
        liorations dans cette ligne plutôt que de s’attaquer au   production soit globalement capable de répondre aux
        système financier qui les y force.                   besoins de tous, quand on ne l’entrave pas financiè-
            Les socialistes promettent bien la sécurité écono-  rement ou autrement, et quand on fait les biens aller
                                                             là où sont les besoins.

        16     VERS DEMAIN  mai-juin-juillet 2020                                          www.versdemain.org
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