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www.versdemain.org

Tiré à part gratuit de la revue Vers Demain

parable aux tribunaux humains que par analo-

gie, en ce sens que le pécheur y dévoile ses pé-

chés et sa situation de créature sujette au péché;

et ce pécheur s’engage à renoncer au péché et

à le combattre, il accepte la peine (

pénitence

sacramentelle

) que le confesseur lui impose et

il reçoit l’absolution de ses fautes.

Mais, en réfléchissant sur la fonction de ce

sacrement, la conscience de l’Eglise y voit, en

plus du caractère judiciaire dans le sens déjà

évoqué, un aspect 

thérapeutique

 ou

médicinal

.

Et ceci se rattache au fait de la présentation du

Christ comme médecin (Lc 5, 31-32), fréquente

dans l’Evangile, son œuvre rédemptrice étant

d’ailleurs souvent appelée, depuis l’antiquité

chrétienne, «remède de salut». (...)

Tribunal de miséricorde ou lieu de guéri-

son spirituelle, sous les deux aspects en même

temps, le sacrement exige une connaissance de

la vie intime du pécheur, pour pouvoir le juger

et l’absoudre, pour le soigner et le guérir. C’est

justement pour cela que le sacrement implique,

de la part du pénitent, l

accusation sincère et

complète des péchés

, motivée non seulement

par des fins ascétiques (celles de l’humilité et

de la mortification), mais par la nature même du

sacrement.

III. La troisième conviction que je tiens à

faire ressortir concerne les réalités ou les élé-

ments qui composent le signe sacramentel du

pardon et de la réconciliation.

Quelques-unes

de ces réalités sont des 

actes du pénitent

, d’im-

portance diverse, chacun étant toutefois indis-

pensable ou bien à la validité, ou bien à l’inté-

grité, ou bien à la fécondité du signe.

Une condition indispensable est, avant tout,

la rectitude et la limpidité de la

conscience du

pénitent

.

On ne s’achemine pas vers une vérita-

ble pénitence tant qu’on ne se rend pas compte

que le péché est contraire à la norme éthique ins-

crite au plus intime de l’être, tant qu’on n’avoue

pas avoir fait l’expérience personnelle et coupa-

ble d’une telle opposition, tant qu’on ne dit pas

seulement «c’est un péché», mais «j’ai péché»,

tant qu’on n’admet pas que le péché a introduit

dans la conscience une rupture qui envahit tout

l’être et le sépare de Dieu et du prochain.

Le signe sacramentel de cette transparence

de la conscience est l’acte traditionnellement

appelé 

e

xamen de conscience

, acte qui doit

toujours être, non point une introspection psy-

chologique angoissée, mais la confrontation sin-

cère et sereine avec la loi morale intérieure, avec

les normes évangéliques proposées par l’Eglise,

avec le Christ Jésus lui-même, notre Maître et

notre modèle de vie, et avec le Père céleste, qui

nous appelle au bien et à la perfection.

La contrition

Mais l’acte essentiel de la Pénitence, de la

part du pénitent, est la

 contrition

, à savoir un

rejet net et ferme du péché commis, en même

temps que la résolution de ne plus le commettre

à cause de l’amour que l’on a pour Dieu et qui

renaît avec le repentir. Ainsi comprise, la contri-

tion est donc le principe et l’âme de la 

conver-

sion

, de cette

metánoia

évangélique qui ramène

l’homme à Dieu, à la manière du fils prodigue re-

venant vers son père, et qui a dans le sacrement

de Pénitence son signe visible, où l’attrition

trouve son accomplissement. C’est pourquoi,

«de cette contrition du cœur dépend la vérité de

la pénitence».

En renvoyant à tout ce que l’Eglise, inspirée

par la Parole de Dieu, enseigne sur la 

contrition

,

je tiens à souligner ici un seul aspect de cette

doctrine qu’il importe de mieux connaître et

d’avoir présent à l’esprit. On considère souvent

la 

conversion

 et la 

contrition

sous l’aspect des

exigences incontestables qu’elles comportent,

et de la mortification qu’elles imposent en vue

d’un changement radical de vie.

Mais il est bon de rappeler et de souligner

que 

contrition et conversion 

sont plus encore

que cela: c’est s’approcher de la sainteté de

Dieu, c’est retrouver sa propre vérité intérieu-

re, troublée et même bouleversée par le péché,

c’est se libérer au plus profond de soi-même, et

par suite recouvrer la joie perdue, la joie d’être

sauvé, que la majorité de nos contemporains

ne sait plus apprécier.

Accusation des fautes

On comprend donc que, dès les débuts du

christianisme, en lien avec les Apôtres et avec

le Christ, l’Eglise ait inclus dans le signe sacra-

mentel de la Pénitence 

l’accusation des fautes.

Celle-ci paraît si importante que, depuis des

siècles, le nom habituellement donné au sacre-

ment a été et est toujours celui de

 confession

.

L’accusation des péchés est avant tout exigée

par la nécessité que le pécheur soit connu par

celui qui exerce le 

rôle de juge

 dans le sacre-

ment, car il lui revient d’évaluer aussi bien la gra-

vité des péchés que le repentir du pénitent.

Et, exerçant également le 

rôle de médecin

,

il a besoin de connaître l’état du malade pour le

soigner et le guérir. Mais la confession individuel-

le a aussi la valeur de 

signe

: signe de la rencon-

tre du pécheur avec la médiation de l’Eglise dans

la personne du ministre; signe qu’il se reconnaît

pécheur devant Dieu et devant l’Eglise, qu’il fait

la clarté sur lui-même sous le regard de Dieu.

L’accusation des péchés ne saurait donc

être réduite à une tentative quelconque d’auto-

libération psychologique, même si elle répond

à un besoin légitime et naturel de se confier à

quelqu’un, besoin inscrit dans le cœur humain.

L’accusation est un geste liturgique, solennel par

son aspect quelque peu dramatique, humble et

sobre dans la grandeur de sa signification. C’est

vraiment le geste du fils prodigue, qui revient

vers son Père et qui est accueilli par lui avec un

baiser de paix; c’est un geste de loyauté et de

courage; c’est un geste de remise de soi-même,

au-delà du péché, à la miséricorde qui pardonne.

On comprend alors pourquoi 

l’accusation

des fautes

doit être ordinairement individuelle et

non collective, de même que le péché est un fait

profondément personnel. Mais en même temps,

cette accusation arrache d’une certaine façon

le péché des secrètes profondeurs du cœur et

donc du cercle de la pure individualité, en met-

tant aussi en relief son caractère social: en effet,

par l’entremise du ministre de la Pénitence, c’est

la Communauté ecclésiale, lésée par le péché,

qui accueille de nouveau le pécheur repenti et

pardonné.

L’absolution

L’autre moment essentiel du sacrement de

Pénitence est, cette fois, du ressort du confes-

seur juge et médecin, image du Dieu-Père qui ac-

cueille et pardonne celui qui revient: c’est 

l’

abso-

lution

. Les paroles qui l’expriment et les gestes

qui l’accompagnent dans l’ancien et dans le nou-

veau 

Rituel de la Pénitence

 revêtent une simpli-

cité significative dans leur grandeur. La formule

sacramentelle: «Je te pardonne ...», et l’imposi-

tion de la main suivie du signe de la croix tracé

sur le pénitent, manifestent qu’

en cet instant

 le

pécheur contrit et converti entre en contact avec

la puissance et la miséricorde de Dieu.

C’est le moment où la Trinité, en réponse

au pénitent, se rend présente à lui pour effacer

son péché et lui redonner son innocence; et la

«La confession individuelle et

intégrale des péchés avec abso-

lution également individuelle

constitue l’unique moyen ordi-

naire qui permet au fidèle,

conscient de péché grave,

d’être réconcilié avec Dieu et

avec l’Eglise. – Saint Jean-Paul II

force salvifique de la Passion, de la Mort et de

la Résurrection de Jésus est communiquée au

même pénitent, en tant que «miséricorde plus

forte que la faute et que l’offense», comme j’ai

eu l’occasion de le préciser dans l’encyclique

Di-

ves

in misericordia

.

Dieu est toujours le principal offensé par le

péché – «contre Toi seul, j’ai péché» – et Dieu

seul peut pardonner. C’est pourquoi, l’absolu-

tion que le prêtre, ministre du pardon, tout en

étant lui-même pécheur, accorde au pénitent, est

le signe efficace de l’intervention du Père dans

toute absolution et de cette «résurrection» de la

«mort spirituelle» qui se renouvelle chaque fois

qu’est donné le sacrement de Pénitence. Seule

la foi peut assurer qu’

en

cet instant

 tout péché

est remis et effacé par la mystérieuse interven-

tion du Sauveur.

La satisfaction

La 

satisfaction

 est l’acte final qui couron-

ne le signe sacramentel de la Pénitence. Dans

certains pays, ce que le pénitent pardonné et

absous accepte d’accomplir après avoir reçu

l’absolution s’appelle précisément

pénitence

.

Quel est le sens de cette 

satisfaction

 dont

on s’acquitte, ou de cette 

pénitence

 que l’on

accomplit ? Ce n’est assurément pas le prix que

l’on paye pour le péché absous et pour le par-

don acquis: aucun prix humain n’est équivalent

à ce qui est obtenu, fruit du sang très précieux

du Christ. Les actes de la satisfaction – qui, tout

en conservant un caractère de simplicité et d’hu-

milité, devraient mieux exprimer tout ce qu’ils

signifient – sont l’indice de choses importantes:

ils sont le signe de 

l’engagement personnel

que

le chrétien a pris devant Dieu, dans le sacre-

ment, de commencer une existence nouvelle

(et c’est pourquoi ils ne devraient pas se réduire

seulement à quelques formules à réciter, mais

consister dans des œuvres de culte, de charité,

de miséricorde, de réparation).

Ces actes de la satisfaction incluent l’idée

que le pécheur pardonné est capable d’unir sa

propre mortification corporelle et spirituelle,

voulue ou au moins acceptée, à la Passion de

Jésus qui lui a obtenu le pardon; ils rappellent

que, même après l’absolution, il demeure dans

le chrétien une zone d’ombre résultant des bles-

sures du péché, de l’imperfection de l’amour qui

imprègne le repentir, de l’affaiblissement des fa-

cultés spirituelles dans lesquelles agit encore ce

foyer d’infection qu’est le péché, qu’il faut tou-

jours combattre par la mortification et la péni-

tence. Telle est la signification de la satisfaction

humble mais sincère. (...)

Le Synode a rappelé dans l’une de ses

Pro-

positions

 l’enseignement inchangé que l’Eglise

a puisé dans la Tradition la plus ancienne, et la

loi dans laquelle elle a codifié l’ancienne pra-

tique pénitentielle: la confession individuelle

et intégrale des péchés avec absolution éga-

lement individuelle constitue

l’unique moyen

ordinaire

qui permet au fidèle, conscient de

péché grave, d’être réconcilié avec Dieu et

avec l’Eglise. De cette confirmation nouvelle de

l’enseignement de l’Eglise il ressort clairement

que

tout péché grave doit être toujours avoué,

avec ses circonstances déterminantes, dans

une confession individuelle.

Saint Jean-Paul II