Page 30 - Vers Demain 2024 janvier
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u  Jésus sur toutes les forces du mal par sa passion, sa   pauvre, vécue dans la simplicité de la foi. Jésus lui-
        mort et sa résurrection. Mue par la confiance, elle ose   même veut que Marie soit l’exemple de l’âme qui le
        écrire: «Jésus, fais que je sauve beaucoup d’âmes,   cherche avec une foi dépouillée. Marie a été la premiè-
        qu’aujourd’hui il n’y en ait pas une seule de damnée   re à vivre la “petite voie” dans la foi pure et l’humilité;
        [...]. Jésus, pardonne-moi si je dis des choses qu’il ne   c’est pourquoi Thérèse n’a pas peur d’écrire:
        faut pas dire, je ne veux que te réjouir et te conso-  «Je sais qu’à Nazareth, Mère pleine de grâces
        ler ». Cela nous permet de passer à un autre aspect    Tu vis très pauvrement, ne voulant rien de plus
        de l’air frais qu’est le message de Sainte Thérèse de   Point de ravissements, de miracles, d’extases
        l’Enfant Jésus et de la Sainte Face.                   N’embellissent ta vie, ô Reine des Élus!...
                     Le plus grand amour                       Le nombre des petits est bien grand sur la terre
                dans la plus grande simplicité                 Ils peuvent sans trembler vers toi lever les yeux.
                                                               C’est par la voie commune, incomparable Mère
            À la fin de l’Histoire d’une âme, Thérèse nous livre   Qu’il te plaît de marcher pour les guider aux Cieux.»
        son Offrande comme Victime d’Holocauste à l’Amour
        Miséricordieux du Bon Dieu. En se livrant pleinement      Au cœur de l’Église, je serai l’amour
        à l’action de l’Esprit, elle reçoit, sans bruit ni signes   Thérèse  a  hérité  de  sainte  Thérèse  d’Avila  un
        particuliers, la surabondance de l’eau vive: «Les fleu-  grand amour pour l’Église et a pu atteindre les profon-
        ves, ou plutôt les océans de  grâces qui sont venus   deurs de ce mystère. Nous le voyons dans sa décou-
        inonder mon âme…». C’est la vie mystique qui, même   verte du “cœur de l’Église”. Dans une longue prière à
        dépourvue de phénomènes extraordinaires, est pro-    Jésus, écrite le 8 septembre 1896, jour du sixième an-
        posée à tous les fidèles comme une expérience quoti-  niversaire de sa profession religieuse, la Sainte confie
        dienne d’amour.                                      au Seigneur qu’elle est animée d’un immense désir,
            Thérèse vit la charité dans la petitesse, dans les   d’une passion pour l’Évangile qu’aucune vocation ne
        choses les plus simples de la vie quotidienne, et elle   peut satisfaire à elle seule. Ainsi, à la recherche de sa
        le fait en compagnie de la Vierge Marie, en apprenant   “place” dans l’Église, elle relit les chapitres 12 et 13 de
        d’elle qu’«aimer c’est tout donner et se donner soi-  la première Lettre de saint Paul aux Corinthiens.
        même».  En effet,  alors que les prédicateurs de son     Au chapitre 12, l’Apôtre  utilise la  métaphore  du
        temps parlaient souvent de la grandeur de Marie de   corps et de ses membres pour expliquer que l’Église
        manière  triomphaliste,  éloignée  de  nous,  Thérèse   comprend une grande variété de charismes ordonnés
        montre, à partir de l’Évangile,  que Marie est la plus   selon un ordre hiérarchique. Mais cette description ne
        grande dans le Royaume des Cieux parce qu’elle est la   suffit pas à Thérèse. Elle poursuit ses recherches, lit
        plus petite (cf. Mt 18, 4), la plus proche de Jésus dans   l’“hymne à la charité” du chapitre 13, y trouve la gran-
        son humiliation. Elle voit que, si les récits apocryphes   de réponse et écrit cette page mémorable:
        sont remplis de  passages  frappants et  merveilleux,    «Considérant le corps mystique de l’Église, je ne
        les Évangiles nous montrent une existence humble et
                                                             m’étais reconnue dans aucun des membres décrits
                                                                                     par saint Paul, ou plutôt
                                                                                     je voulais me reconnaître
                                                                                     en tous... La Charité me don-
                                                                                     na la clef de ma  vocation.
                                                                                     Je  compris  que  si  l’Église
                                                                                     avait un corps, composé de
                                                                                     différents membres, le plus
                                                                                     nécessaire, le plus noble de
                                                                                     tous ne lui manquait pas, je
                                                                                     compris que l’Église avait
                                                                                     un  Cœur,  et  que  ce  Cœur
                                                                                     était  brûlant  d’amour.  Je
                                                                                     compris que l’Amour seul
                                                                                     faisait agir les membres de
                                                                                     l’Église, que si l’Amour ve-
                                                                                     nait à s’éteindre, les Apôtres
                                                                                     n’annonceraient plus l’Évan-
                                                                                     gile, les Martyrs refuseraient
                                                                                     de verser leur sang…
                                                                                         «Je    compris    que
                                                                                     l’Amour  renfermait  toutes
                                                                                     les Vocations, que l’Amour
                  «Thérèse effeuille des roses sur les premiers pas de l’Enfant Jésus»,   était  tout, qu’il embrassait
             aquarelle de Marie du Saint-Esprit, reproduisant un tableau de Pascal Blanchard.  tous les temps et  tous les


        30     VERS DEMAIN  janvier-février 2024                                           www.versdemain.org
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