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Pourquoi pas?

L’article qui suit, écrit par Mme Gilberte Côté-
Mercier, est un résumé de la fable de l’Île des Nau-
fragés de Louis Even, qui fait comprendre le systè-
me financier actuel de création d’argent sous forme
de dettes par les banques privées, alors qu’on de-
vrait avoir un argent «social» créé sans dette par la
société:
Supposons une île isolée, inaccessible au reste
du monde.
Vivent dans cette île dix hommes.
Nos dix hommes sont de bons travailleurs, et
exploitent les richesses de l’île.
Chacun exerce son métier. Pierre cultive la ter-
re. Louis élève des bêtes. Etc...
* * *
Un jour, Pierre, qui est fatigué de se nourrir de
légumes, va trouver Louis pour lui demander de
bien vouloir lui échanger un veau contre des pom-
mes de terre. Et tout le monde est d’accord pour dire que
Mais, Louis n’aime pas les pommes de terre, et c’est l’argent qui manque dans l’île.
refuse de passer son veau à Pierre. * * *
Mais, Pierre: «Je t’en prie, Louis, vends-moi Grande découverte! C’est l’argent qui manque
donc ce veau-là!» dans l’île.
«Et qu’est-ce que tu me donneras en retour?» Comme nos hommes ont du bon sens dans la
«Mais, vingt poches de patates», dit Pierre. tête, et qu’ils ne se rassemblent pas pour parlemen-
«Ça ne m’intéresse pas, les patates, dit Louis, je ter et ne rien faire, ils décident, puisque c’est l’ar-
n’en mange pas.» gent qui leur manque, de se faire de l’argent.
Et Pierre s’en retourne chez lui avec son petit Nos dix hommes, ils ne font pas comme nos
bonheur. Il faut qu’il se résigne à se nourrir de lé- gouvernements qui trouvent que l’argent manque
gumes encore un bout de temps. Cependant Louis dans le pays, et qui en concluent qu’il faut augmen-
avait, pour lui, trop de veaux, et aurait bien voulu en ter les taxes ou faire la guerre.
échanger quelques-uns, mais pas contre des pata- Nos dix hommes raisonnent ainsi: L’argent
tes, contre d’autres produits qu’il aime mieux. manque. Donc, faisons de l’argent.
Il en est de même à chaque fois que l’un des * * *
dix veut faire un échange avec les autres. Ou c’est «Faisons de l’argent. Faisons-nous de l’argent»,
difficile d’accorder les goûts. Ou ce n’est pas le bon disent-ils.
moment. Ou les calculs sont impossibles à faire: «Nous allons nous faire de l’argent, nous, les
souvent il faudrait couper un veau en deux pour hommes de l’île». Ils ne songent pas un seul instant
ajuster le besoins. à aller chercher les esprits d’un autre monde, ni des
* * * hommes d’autres pays pour leur faire de l’argent. Ils
Voyant les difficultés qu’ils ont à s’entendre, les décident de s’en faire eux-mêmes, pour eux.
dix habitants de l’île se réunissent en une petite as- «Justement, parmi nous, il y a Jacques, qui fut
semblée pour discuter leur problème. jadis gérant de banque. Il sait très bien compter.
Ils constatent que l’île leur fournit tout ce qu’ils Jacques, fais-nous de l’argent.»
lui demandent, que ce n’est pas la richesse qui Et Jacques: «Parfait, je vais vous faire de l’ar-
manque, ni le travail, mais autre chose. gent. Combien vous faut-il d’argent dans l’île, pour
Qu’est-ce que cette chose qui manque pour que les affaires marchent?»
que les échanges se fassent facilement entre les dix «Si nous avions 1000 dollars dans l’île, les
hommes?

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