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«Dieu est notre allié, pas celui du virus!»




            Voici des extraits de l’ho-                          Dieu le Père a-t-il voulu lui-même la mort de son
        mélie  donnée  le  Vendredi                          Fils, pour en tirer un bien? Non, il a simplement laissé
        Saint 10 avril  2020 dans  la                        la liberté humaine suivre son cours, en lui faisant servir
        basilique Saint-Pierre, en pré-                      son plan, pas celui des hommes. Ceci s’applique éga-
        sence du pape François, par le                       lement aux maux naturels, comme les tremblements
        père  Raniero Cantalamessa,                          de terre et les pestes. Ce n’est pas lui qui les suscite.
        capucin (photo de droite), pré-                      Il a donné aussi à la nature une sorte de liberté, qua-
        dicateur de la Maison pontifi-                       litativement différente certes de la liberté morale de
        cale:                                                l’homme, mais toujours une forme de liberté. Liberté
            Et cette année, nous lisons                      d’évoluer selon ses lois de développement. Il n’a pas
        le récit de la Passion avec une question – ou plutôt   créé  le monde  comme une horloge  programmée  à
        avec un cri – dans le cœur, qui s’élève de partout sur   l’avance dans son moindre mouvement. C’est ce que
        la terre. Nous devons chercher à saisir la réponse que   certains  appellent  le  hasard,  et  que  la  Bible  appelle
        la parole de Dieu y apporte.                         plutôt «la sagesse de Dieu». (…)
            La pandémie du coronavirus nous a brutalement        La parole de Dieu nous dit quelle est la première
        fait prendre conscience du danger le plus grand qui   chose que nous devons faire dans des moments com-
        soit que les hommes et l’humanité ont toujours cou-  me ceux-ci: crier vers Dieu, car c’est lui-même qui met
        ru, celui de l’illusion de la toute-puissance… Il a suffi   sur les lèvres des hommes les mots qu’ils lui adres-
        du plus petit et plus informe élément de la nature, un   sent, parfois même des mots durs, de lamentation et
        virus, pour nous rappeler que nous sommes mortels,   presque  d’accusation.  «Debout! Viens à  notre  aide!
                                                             Rachète-nous, au nom de ton amour… Ne nous rejette
            Alors qu’il peignait les fresques de la cathédrale   pas pour toujours (Ps 43, 24.27).» «Maître, nous som-
        Saint-Paul à Londres, le peintre James Thornhill était   mes perdus; cela ne te fait rien? (Mc 4, 38)»
        si enthousiasmé  par  son travail  que,  revenant  à  un
        moment donné sur ses pas pour mieux admirer sa           Peut-être Dieu aime-t-il se faire prier pour accorder
        fresque, il ne remarqua pas qu’il était sur le point de   ses bienfaits? Peut-être notre prière peut-elle amener
        tomber de l’échafaudage dans le vide. Un de ses assis-  Dieu à changer ses plans?... Il y a des choses que Dieu
        tants, terrifié, comprit que s’il criait, il ne ferait qu’ac-  a décidé de nous accorder comme fruit à la fois de sa
        célérer la catastrophe. Sans y réfléchir à deux fois, il   grâce et de notre prière, comme pour partager avec
        trempa un pinceau dans la couleur et le balança  en   ses créatures le mérite du bienfait  reçu (S. Thomas
        plein sur la fresque. Le maître, sidéré, bondit en avant.   d’Aquin,  Somme théologique II-IIae, q.83, a.2). C’est
        Son travail était compromis, mais il était sauvé.    lui qui nous exhorte à le faire: «Demandez, on vous
            C’est ainsi parfois que Dieu fait avec nous,  il   donnera; dit Jésus; frappez, on vous ouvrira (Mt 7, 7 )».
        bouleverse nos plans et notre tranquillité, pour nous    Lorsque, dans le désert, les Juifs étaient mordus
        sauver de l’abîme que nous ne voyons pas. Mais ne    par des serpents venimeux,  Dieu  ordonna à Moïse
        soyons pas dupes. Ce n’est pas Dieu qui a balancé le   d’élever un serpent de bronze sur un poteau, et ceux
        pinceau en plein sur le fresque éblouissant de notre   qui le regardaient ne mouraient pas. Jésus s’est appro-
        civilisation  technologique. Dieu est  notre  allié,  pas   prié ce symbole. «De même que le serpent de bronze
        celui du virus! «Je forme à votre sujet des pensées   fut élevé par Moïse dans le désert, dit-il à Nicodème,
        de paix, et non de malheur», dit-il lui-même dans la   ainsi  faut-il  que  le  Fils  de  l’homme  soit  élevé,  afin
        Bible (Jr 29, 11). Si ces fléaux étaient des châtiments   qu’en lui tout homme qui croit ait la vie éternelle (Jn
        de Dieu, il ne serait pas expliqué pourquoi ils frappent   3, 14-15)». Nous aussi, en ce moment, nous sommes
        également justes et pécheurs, et pourquoi les pauvres   mordus par un «serpent» venimeux invisible.
        sont ceux qui en supportent les pires conséquences.      Regardons celui qui a été «élevé» pour nous sur la
        Sont-ils plus pécheurs que les autres?               croix. Adorons-le pour nous et pour toute l’humanité.
            Non! Celui qui a un jour pleuré la mort de Lazare   Qui le regarde avec foi ne meurt pas. Et s’il meurt, ce
        pleure aujourd’hui le fléau qui est tombé sur l’huma-  sera pour entrer dans une vie éternelle. «Après trois
        nité. Oui, Dieu «souffre», comme chaque père et cha-  jours, je me lèverai», avait prédit Jésus (Mt 9,31). Nous
        que mère. Quand nous le découvrirons un jour, nous   aussi, après ces jours que nous espérons courts, nous
        aurons honte de toutes les accusations que nous avons   nous lèverons et sortirons des tombeaux que sont de-
        portées contre lui dans la vie. Dieu participe à notre   venu nos maisons. Non pas pour revenir à l’ancienne
        douleur pour la surmonter. «Dieu – écrit saint Augus-  vie comme Lazare, mais à une nouvelle vie, comme
        tin – étant suprêmement bon, ne laisserait aucun mal   Jésus.  Une  vie  plus fraternelle,  plus humaine.  Plus
        exister dans ses œuvres, s’il n’était pas assez puis-  chrétienne! v
        sant et bon, pour tirer le bien du mal lui-même».                 Père Raniero Cantalamessa, O.F.M. CAP


        6      VERS DEMAIN  mai-juin-juillet 2020                                          www.versdemain.org
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