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"Dieu ou le veau d'or" - V

le dimanche, 01 septembre 1940. Dans Autres

Par le R, Père PETER COFFEY, Docteur en Philosophie

V

Le Révérend Père Coffey, après avoir diagnostiqué le mal du système économique, le régime monétaire faux, et énuméré les principaux désordres qui en dérivent, démontre la futilité des palliatifs employés par les gouvernements et termine en exposant le seul remède direct et véritable.

PALLIATIFS

Les banquiers créent les conditions inhumaines dont souffre la société, mais ils laissent aux gouvernements la responsabilité de réparer les dégâts :

"Les dirigeants du système bancaire, ceux qui exercent un contrôle privé sur l'argent et le crédit de la société, ont rejeté sur les épaules de leurs gouvernements respectifs le soin de solutionner le problème de l'insuffisance du pouvoir d'achat. C'est par leur système de comptabilité antisociale que les banquiers ont créé cette pénurie grandissante de pouvoir d'achat, mais ils laissent les gouvernements se débattre avec les résultats."

Que font les gouvernements pour remettre un peu d'argent dans les poches absolument vides ?

"Les gouvernements ont essayé de plusieurs façons de faire face à la situation, mais surtout de deux manières :

a) par des travaux publics ;

b) par des dividendes aux chômeurs (secours directs)."

Et quel a été le résultat de ces palliatifs, résultat inévitable avec le système de finance actuellement en usage ?

"Mais les gouvernements ne peuvent se procurer l'argent nécessaire à ces remèdes que de deux façons :

a) Par des impôts, soutirés du revenu déjà insuffisant des consommateurs ;

b) Par des emprunts venant des banques : monnaie nouvelle faite par les banques, mais plus tard réclamée plus qu'en entier, vu l'intérêt qu'elle commande.

La futilité de ces remèdes est donc très évidente. Ils laisseront les consommateurs grevés d'une plus grosse dette et de plus en plus dépourvus d'argent. Aussi ne faut-il pas s'étonner de l'incapacité des gouvernements à boucler leurs budgets annuels dans les pays capitalistes."

LE VRAI REMÈDE

Le vrai remède est celui qui s'attaque à la source même du mal, à la fabrication de l'argent sous forme de dette. Puis, remède qui fait naître l'argent dans les mains du consommateur, puisque c'est là que l'argent manque. Il est inutile de chercher midi à quatorze heures, et le Père Coffey, philosophe et professeur de métaphysique, ne s'évade pas dans des détours :

"Pour solutionner ce problème, il est clair que les gouvernements doivent :

a) Reprendre leur prérogative, exercer eux-mêmes le contrôle sur le volume de l'argent nécessaire à leur peuple ;

b) Baser la monnaie sur la capacité productive de leur pays ;

c) Émettre l'argent nouveau, non plus comme une dette envers les banquiers et comme grevé d'intérêt, mais émettre de l'argent absolument libre de dette ;

d) Supprimer tout secours direct, toute assurance-maladie ou assurance-chômage, toute pension de vieillesse et autres allocations particulières, et les remplacer par un dividende national donné à chaque citoyen.

En même temps, pour empêcher automatiquement toute inflation comme toute déflation, pour maintenir un équilibre parfait et constant entre les prix et le pouvoir d'achat, les prix doivent être soumis à un escompte national, établi d'après les statistiques de la production et de la consommation. Cet escompte sera calculé de manière à combler l'écart entre les prix et le pouvoir d'achat collectif."

CONCLUSION

Comme on le voit, sans même mentionner une seule fois les mots "crédit social," c'est exactement la solution créditiste à laquelle aboutit le savant sociologue. La simple considération du mal et son analyse lucide conduisent nécessairement là lorsqu'on n'est pas aveuglé par des préjugés ou retenu par des faiblesses.

Mais pourquoi gouvernants, hommes d'état, économistes, industriels, commerçants ont-ils été si lents à découvrir le vice fondamental de notre mécanisme monétaire, cause principale du chaos économique actuel ? Le Père Coffey en signale trois causes :

"a) Parce qu'on croit encore, à tort, que la monnaie est une marchandise ayant une valeur intrinsèque. Cela pouvait être vrai lorsque l'or seul servait d'intermédiaire d'échange ; mais ce n'est plus vrai depuis que l'argent a une valeur conventionnelle ;

b) Parce qu'on ne s'est pas assez rendu compte que les banques créent la monnaie. On s'imagine encore trop généralement que les banques ne font que protéger et faire fructifier les dépôts de leurs clients ;

c) Parce qu'on ne tient pas assez compte du progrès mécanique moderne dans la production. La machine et l'énergie naturelle (vapeur, électricité, etc.) déplacent rapidement la force humaine et rendent superflu le travail musculaire. Elles diminuent graduellement le nombre des employés salariés. D'où la nécessité d'un dividende national pour compléter et remplacer graduellement les gages et les salaires à mesure que ceux-ci disparaissent. »

Le Père Coffey, qui écrivait son étude avant la guerre actuelle, la conclut par ce vœu qui, hélas ! n'a pas été réalisé assez tôt :

"Que Dieu permette aux hommes d'état de constater ces faits. Puis, ayant découvert dans notre système monétaire défectueux la cause de notre désarroi social et économique, qu'ils aient la sagesse et le courage d'appliquer le remède efficace, avant qu'une autre guerre mondiale détruise complètement la structure chancelante de la civilisation moderne."

Si l'on avait demandé à notre peuple, à nos familles faites d'hommes, de femmes et d'enfants, de choisir entre le dividende national et la guerre, quel aurait été leur choix ? Les heures terribles que nous traversons vont-elles enfin nous ouvrir les yeux ?

                Louis EVEN

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