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Traits de moeurs politiques

le vendredi, 15 décembre 1939. Dans Politique

Distribution de prix

Les journaux d'hier soir (28 novembre) nous apportent une longue liste de récompenses décernées à de bons élèves de l'École Libérale provinciale. Il y a des prix de toutes les grosseurs depuis la Régie des Liqueurs jusqu'à la modeste fonction de coroner-adjoint.

Grande jubilation chez les nouveaux gradués. Nous voudrions nous associer à leurs réjouissances, mais nous songeons que le palmarès des prix présuppose une distribution de pensums, liste moins porteuse de joie celle-là.

C'est le règlement, dira-t-on. Chacun son tour. Les perdants sortent, les gagnants rentrent. Pour que les uns exultent, il faut que d'autres pleurent.

Est-ce bien un règlement, ou un dérèglement ? Les postes de confiance requièrent-ils de la compétence ou de la couleur ? La compétence s'acquiert-elle par l'expérience, ou s'inculque-t-elle tout d'un coup par simple investiture sous la chaude impulsion du grand esprit de parti ?

Si les services publics ne sont que des fromages, il est évident que le premier venu, moyennant tant soit peu d'appétit, peut les absorber. Et ce doit être des fromages recherchés, à voir l'activité endiablée des concurrents pendant les grandes courses de vingt jours.

Le poste paie, c'est ce qui compte. Quant à la fonction qui en découle, faut pas s'en faire, la grâce d'état est là. N'a-t-on pas vu des ministres passer d'un département à un autre aussi rapidement qu'on change de chaussures en arrivant chez soi, et ça n'a été ni pire ni mieux dans l'un ou l'autre département ?

Il y a parenté frappante entre la politique de partis qu'on pratique et le système financier déséquilibré qu'on adore. L'un et l'autre disposent d'appâts beaucoup plus rares que les aspirants. Dans l'un comme dans l'autre, pour arriver au succès, il faut savoir fouler aux pieds ses frères. Ni l'un ni l'autre ne se soucient du bien commun. L'un et l'autre font plus de mécontents que d'heureux. L'un et l'autre réclament notre respect en méprisant nos intérêts les plus chers. L'un et l'autre entretiennent une mentalité de loups dans le corps social. L'un et l'autre sont fortement enracinés, disposent de moyens puissants, frappent sans pitié comme sans remords. L'un et l'autre exercent une dictature qui étend son réseau jusqu'au plus humble de nos villages. L'un et l'autre ne déguerpiront que devant la force unie de tout un peuple conscient et éclairé.

Député de qui ?

- Qui votre député représente-t-il donc, monsieur Lalumière ?

- Ses électeurs.

- Les a-t-il consultés avant le fameux vote du 8 septembre ?

- Certainement.

- Et c'est leur avis qu'il a suivi ?

- Absolument.

Protestations dans le groupe d'une quinzaine de citoyens de Sherbrooke présents au dialogue :

- Quand donc les a-t-il consultés ? Nous avons tenu des assemblées groupant des milliers de personnes, pour exprimer notre idée, et il n'y était pas !

- Mais il nous a consultés.

- Qui et quand donc, Monsieur Lalumière ?

- Il est venu rencontrer l'organisation libérale de Sherbrooke. Nous sommes une trentaine. On a discuté, et on est venu à la conclusion qu'il fallait voter la participation, mais pas la conscription.

- Mais une trentaine, ce n'est pas le comté !

- Mais nous représentons l'opinion du comté.

Nouvelles protestations :

- Qui vous a donné un mandat ? Nous avez- vous consultés ?

- M. Howard trouve que ça ne sert à rien de consulter des foules. Il n'y aurait jamais d'entente. Si 245 députés ne peuvent s'entendre, comment 18,000 électeurs le pourraient-ils ?

- Mais il y a une chose qu'on appelle la majorité.

- C'est nous qui représentons la majorité ! Nous, l'organisation du parti.

Député du comté ou député du parti ?

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Liberté démocratique

Monsieur L... était le meilleur propagandiste de nos idées dans St-M... Or le fils de Monsieur L... vient d'obtenir un emploi du gouvernement. C'est une faveur, évidemment, dans un monde où le travail est aussi rare que la production est abondante et où les conventions reçues obligent à travailler pour avoir part à cette abondance.

Mais pour que le jeune homme puisse garder sa place, il faut que désormais toute la famille de M. L... cesse de parler de réforme monétaire. Adore ou crève !

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