Deux fois par année, nous invitons des évêques, prêtres et fidèles laïcs, surtout d’Afrique, à notre semaine d’étude sur la démocratie économique (crédit social) à notre maison-mère de Rougemont au Canada. Les participants à notre dernière session de mai 2014 ont été enthousiasmés et sont décidés à faire avancer notre cause dans leur diocèse. Voici les commentaires de quelques-uns des participants :
Professeur à l’université Toulouse 1-Capitole à Montauban, spécialiste d’histoire du droit :
Maurice Allais, dans son discours de la conférence Nobel en 1988, Maurice Allais disait : les idées dominantes, et avec l’argent-dette nous sommes dans des idées dominantes, si erronées qu’elles puissent être, finissent par acquérir par leur simple et incessante répétition le caractère de vérités établies que l’on ne saurait mettre en doute sans s’opposer à l’ostracisme des establishments. Donc les Pèlerins de saint Michel prennent beaucoup de risques en mettant en doute ces vérités établies par les establishments.
J’aime, dans L’Ile des naufragés, cette phrase du banquier Martin : mon affaire est bonne, bons travailleurs ces hommes mais ignorants ; leur ignorance et leur crédulité font ma force ; ils voulaient de l’argent, je leur passé des chaînes. C’est une phrase tout à fait extraordinaire qui signifie, vous le savez, on l’a compris tous, « Mon peuple se perd faute de connaissance » (Osée 4, 6).
Ici à Rougemont, durant les journées, parce que c’est le plus important, j’ai beaucoup appris et ce que j’ai appris venait confirmer pour moi — et c’était une joie extraordinaire — ce que j’avais compris en France, ce que j’avais compris à travers l’histoire de la pensée, à travers la doctrine sociale de l’Église. Et nous avons reçu un enseignement de bon sens, un enseignement clair, un enseignement rempli d’intelligence. Et cet enseignement lutte contre les deux grands lieux de servitude qui sont toujours dénoncés à travers l’histoire depuis l’antiquité, c’est-à-dire l’impôt et l’argent-dette.
Je trouve que les Bérets Blancs, lorsqu’ils disent « Mort aux taxes », c’est vraiment très courageux, c’est se lever contre l’esclavage, contre une forme d’esclavage. Et vous le savez, dans l’histoire de France, ceux qui payaient de l’impôt, c’était les vaincus, c’était les Gallorum ; les « Francs » c’était ceux qui étaient affranchis de l’impôt. Et le mot France signifie : le pays qui est libre d’impôts. Actuellement nous ne sommes pas libre d’impôts. Nous sommes donc des soumis. Et ceux qui étaient libres, en France, les « Francs », ne payaient pas l’impôt, ils donnaient des dons gratuits, des libéralités, et ce n’était pas du tout la même chose, c’était autre chose.
Puis ensuite l’autre lieu de servitude, c’est l’argent-dette : alors nous avons bien compris que c’est un lieu de servitude. Solon (homme d’État grec au 6e siècle avant Jésus-Christ) a dénoncé cette servitude pour dette qui pouvait aller jusqu’à la mort, et la dette, et cela je l’ai bien perçu, crée des liens matériels, mais la dette crée également des liens spirituels avec les forces de l’argent, avec ces forces de l’argent qui sont aussi spirituelles. Madame la directrice, Thérèse Tardif, nous l’a souvent dit, c’est un culte à Mammon, c’est un culte au dieu de l’argent. Et il y a cette phrase à laquelle nous sommes tous très attachés, de la lettre de saint Paul aux Romains (13, 8) : « Ne gardez aucune dette si ce n’est la dette de l’amour mutuel. » Et l’amour mutuel c’est aussi le Crédit Social, nous l’avons compris, cet amour mutuel peut prendre cette forme du Crédit Social.
Il y a une autre fulgurance, une autre chose qui m’a beaucoup intéressée, c’est d’avoir saisi le lien très fort qui existe entre l’enseignement de Clifford Hugh Douglas, entre l’enseignement de Louis Even et la pensée d’Aristote et de saint Thomas d’Aquin. C’est un lien qui est un peu difficile, avec mes étudiants parfois on travaille 10 heures sur cela, mais Aristote a décrit la vraie démocratie et il a dit que la vraie démocratie c’est la politeia, le régime mixte avec les trois éléments qui se retrouvent : l’élément démocratique, l’élément aristocratique, l’élément monarchique.
C’est la politeia, c’est cela la vraie démocratie. Et lorsque monsieur Pilote nous a expliqué ce qu’était le Crédit Social, il nous a cité cette phrase de Douglas qui parle d’une « aristocratie de producteurs au service d’une démocratie de consommateurs », et que l’état récupérait son droit de battre monnaie, il participait également à cette souveraineté. Et là, je crois qu’il y a des liens très forts qui se font entre la pensée, la tradition de l’Église et la pensée de Louis Even. Il y a vraiment une continuité extraordinaire qui existe entre Louis Even et la pensée de l’Église, de la philosophie traditionnelle avec le thomisme...
Et je vais finir par cela, je crois que le Crédit Social pour réussir, nécessite une véritable prise de conscience, mais aussi que l’on choisisse de façon radicale Jésus. Et que ce ne soit que Jésus, et que ce soit Jésus tout entier, sans compromission, sans compromission avec la banque, sans compromission avec nos autres idoles. Et ce que nous avons pu remarquer parmi les fondateurs et parmi les Pèlerins de saint Michel, c’est qu’il n’y a pas de tiédeur, il n’y a pas de cœur partagé. Donc vous nous donnez cette envie de ne pas être tiède et de ne pas avoir de cœur partagé.
Et le Crédit Social, j’en suis de plus en plus persuadée, c’est le christianisme appliqué. J’en suis de plus en plus persuadée. Avec ma petite famille nous finissons avec une chanson : « Le peuple de Dieu se lève, armée puissante au cœur de feu, pour dire et proclamer, amour et vérité, le peuple de Dieu se lève ». Et je voudrais que l’on applaudisse ensemble très fort : Jésus, la cour céleste, Louis Even, Gérard Mercier, Gilberte Côté-Mercier et tous les Pèlerins de saint Michel.
Ce que notre professeur, M. Alain Pilote, a expliqué m’a éclairé et j’admire beaucoup la clarté, la simplicité et la profondeur de son enseignement. Hier (avant de venir ici) j’étais dans le noir, aujourd’hui je suis dans la lumière. La lumière du crédit social, qui vient de M. Louis Even. Merci à ce grand homme dont l’œuvre nous invite à créer ensemble un monde meilleur où règnent la confiance et la justice.
Après avoir suivi cette formation, nous sommes tous invités à nous impliquer activement, corps et âme, pour le changement positif du système bancaire. J’ai compris que le crédit social est un christianisme appliqué, un christianisme vécu. Une fois de retour dans mon pays, je dois donc vivre et enseigner le crédit social. Cet enseignement va m’aider à réaliser des actions de développement économique dans ma paroisse et dans l’ensemble de mon diocèse.
Je voudrais vous dire que ma présence ici a été une providence et tout s’est passé sous le sceau de la Providence, et Dieu soit loué. Je peux dire que cette session a été l’occasion d’une prise de conscience de plus en plus grande d’un monde d’exclusion avec un régime économique produisant de plus en plus de pauvres. Oui quand je dis que c’est une providence, je vais vous l’expliquer.
En 1993, lorsque j’écrivais mon mémoire de théologie de Grand Séminaire sur le thème « Argent et biens matériels au service du Royaume », j’étais loin de m’imaginer que je me traçais un chemin de combat à la fois spirituel et social. Et je suis sociologue. Chemin qui me mènerait un jour au Canada pour me former à l’école des Pèlerins de Saint Michel. Dieu soit loué.
En lisant le petit document Du régime de dettes à la prospérité, j’y ai trouvé l’intervention de Son Éminence le Cardinal Saliège, archevêque de Toulouse qui disait, en 1954 : « Un régime économique qui fabrique des pauvres en série, des sans-toit en série, des ayant-faim en série, tout chrétien se doit de le combattre et de le remplacer. » C’est profond, et je me suis senti interpellé en regardant ma propre histoire. Je me suis toujours préoccupé de cette question de la pauvreté...
En 2009, ce souci de lutter contre la pauvreté et d’aider d’autres à s’en sortir m’a poussé à écrire un livre avec deux autres confrères, intitulé Lutter contre la pauvreté en Afrique par l’Évangile avec en sous-titre La production des biens économiques. Jusqu’alors j’avais compris que la pauvreté n’était pas une fatalité et qu’on pouvait s’en sortir. Les communautés chrétiennes pauvres d’Afrique peuvent s’en sortir avec l’aide de leurs pasteurs. Tout le problème est dans la méthode, la manière de la lutte. Et j’en ai appris durant cette formation.
Ma deuxième conviction, en écrivant ce livre, est que si le salut apporté par Jésus-Christ est total, il prend en compte à la fois la dimension matérielle, donc corporelle et spirituelle de l’homme. Et il faut convaincre les communautés chrétiennes d’Afrique de cette réalité. Ora et labora (Prier et travailler, la devise de saint Benoît). A l’école de Louis Even et des Pèlerins de Saint Michel, j’ai appris que le combat contre la pauvreté a une dimension internationale, un visage caché qu’on appelle la finance internationale.
Durant ces quelques jours, j’ai révisé les aspects importants de la doctrine sociale de l’Église que nous avons apprise au Grand Séminaire, et j’étais content de revisiter cela. Nous sommes donc appelés au combat sur la base des quatre principes de la doctrine sociale de l’Église : la personne, les biens communs, la subsidiarité et la solidarité. Principes à ne jamais perdre de vue.
Fondatrice et supérieure de la « Fraternité des Servantes du Christ » à Maradi, au Niger :
Je commence par remercier les organisateurs de ce séminaire d’études qui nous ont permis d’être là à Rougemont... Grâce à votre générosité, à votre solidarité et à votre grand désir de répandre l’œuvre de votre fondateur Louis Even, nous avons pu bénéficier des enseignements riches et profonds de Monsieur Pilote qui nous interpelle aujourd’hui pour aller plus loin dans notre pastorale. Parce que ces enseignements nous donne de l’espoir et nous ouvre des horizons.
Pour ma part, je retiens deux grandes idées. La première : l’être humain est au centre et non l’argent. Parce que la personne a été créée à l’image de Dieu. Et Dieu a donné la Terre au genre humain.
La deuxième idée c’est le crédit. Crédit qui est synonyme de confiance. Cette confiance qui nous lie ensemble quelque soit notre appartenance sociale, culturelle, religieuse ou politique. Cette confiance en Dieu, en nous mêmes et aux autres. Cette confiance nous donne un élan pour produire et distribuer car malheureusement cette distribution fait défaut et nous tue.
Ces enseignements m’ont donné personnellement des outils de travail, de réflexion et de discernement pour faire du crédit social un christianisme appliqué. Pour essayer de faire vivre les centaines d’enfants mal nourris que nous recevons régulièrement dans notre centre de nutrition.
De la République Démocratique du Congo (RDC) :
Dieu ne sommeille pas. Il fait lever parmi nous des lumières comme Douglas et ensuite l’honorable monsieur Louis Even, à la suite de qui nous nous rangeons dès maintenant. Le mot clé que j’ai pu entendre dès le premier jour de notre étude est le crédit social, non pas sous forme d’argent, mais de confiance. Tous ceux qui sont passés avant nous en ont parlé.
On nous a dit que le crédit social met l’argent à sa place. Premier concept : l »argent est créé pour la production des biens de consommation. Deuxième élément : le crédit social libère définitivement la société des problèmes purement financiers. Troisième sens : le crédit social fait de chaque être des bénéficiaires du progrès. Derechef, chaque citoyen est ayant droit d’une part de production de son pays, ce que nous appelons le dividende. Bref, le crédit social ôte le sacré à l’argent.
Maintenant que je suis à l’école de monsieur Louis Even, je m’engage à mener un combat pour être son disciple partout où je me trouverai. Mon travail consistera d’abord à la sensibilisation du peuple de Dieu, au combat pour le développement de mon peuple et comme je le disais, ce sont les communautés de base qui en auront besoin. Ces communautés de base qui sont parsemées dans notre pays surtout dans notre diocèse. Ce sont des communautés vivantes qui travaillent avec les prêtres, avec tout le monde, sans distinction de religion. Que ces communautés de base soient ravivées pour recevoir un enseignement où le crédit social aura une place de choix.
De la République Démocratique du Congo :
Comme partout où l’Évangile est annoncé, chaque fois qu’une session de formation sur le Crédit Social a lieu, la lumière du Christ avance, les ténèbres reculent.
Quant aux enseignements, je voudrais dire un grand merci à notre frère monsieur Pilote, à notre frère François (De Siebenthal), parce que votre expertise et la maîtrise de ces choses qui souvent nous semblent compliquées, nous a permis, grâce à la clarté de vos explications, doublées d’une pédagogie fort attrayante, nous ont permis de saisir le drame d’une humanité menacée par les loges maçonniques qui utilisent l’argent, l’argent-dette des banques, pour le retourner contre nous leurs frères et sœurs, contre les hommes. Ainsi, au lieu d’assurer la satisfaction de besoins, l’argent est devenu une prison, un lieu d’appauvrissement inexorable, l’argent s’est érigé en idole. Voilà le nouveau veau d’or qui avec d’autres constituent le royaume chimérique que nous présente le monde d’aujourd’hui.
Merci à Louis Even, merci à madame Gilberte Côté-Mercier et à leur inspirateur Douglas, d’avoir mis à jour, grâce à l’Évangile et à la doctrine sociale de l’Église, la réalité que le concept du Crédit Social pour une libération non violente de l’humanité. En réalité, le combat dans le lequel nous nous engageons à la suite de Louis Even, c’est le combat de Jésus-Christ lui-même. N’a-t-il pas dit : « L’Esprit du Seigneur est sur moi, afin que je puisse libérer les prisonniers, annoncer la bonne nouvelle aux pauvres, faire voir les aveugles et faire marcher les boiteux, car Dieu a décidé une année de grâce pour son peuple » (Luc 4, 18-20). Oui, je fais mien le sentiment de Paul, malheur à moi si je n’annonce la parole du Seigneur qui a pris visage à travers le Crédit Social. N’a-t-on pas dit qu’il était l’Évangile appliqué ?
Je n’ai ni la force, ni les moyens de vous promettre de grandes choses que je risque de ne pas réaliser. Comptant sur la force de l’Esprit-Saint, je voudrais simplement lancer, de manière explicite, la conscientisation de mes paroissiens sur la réalité du Crédit Social. La paroisse dont je suis le curé, qui a 60 000 âmes, la paroisse universitaire Notre-Dame de la Sagesse, publie chaque semaine un bulletin paroissial. Je voudrais simplement, chaque semaine, y mettre quelques extraits, en français et en lingala, de la pensée de Louis Even.
Je voudrais aussi avec ma commission paroissiale Justice et Paix, créer un petit noyau, d’une dizaine de personnes, pour qu’ensemble nous réfléchissions en profondeur sur la pensée de Louis Even. De telle sorte que nous arrivions à nous posséder pleinement de ce savoir, faire de ses amis des formateurs, pour qu’à leur tour ils aillent vers d’autres paroisses assurer cette même formation.
Évêque de Djibouti et administrateur apostolique de Mogadiscio (Somalie)
En écoutant l’histoire des Pèlerins de saint Michel, Louis Even, Gilberte Côté ; son mari et les autres, j’ai pensé à la première communauté chrétienne de Jérusalem, qui avait un seul cœur et une seule âme. Ils partageaient tout et personne ne manquait de quelque chose. C’est la première impression que j’ai eue en écoutant les enseignements par Alain Pilote.
Je vais vous parler de la situation en Somalie et au Djibouti. Notre communauté est réduite, composée de personnes de passage. Au Djibouti avec cinq mille chrétiens, la moitie est composée de militaires français qui ne pratiquent pas ; en Somalie, avec le désordre qui y règne, il y a cent chrétiens seulement.
Première chose à faire alors : A mon arrivée, j’aurai à m’adresser à la minorité des catholiques qui ne viendront peut-être pas. Je devrai alors m’adresser aux habitants du lieu, c’est-à-dire des musulmans ; si par contre cette petite communauté chrétienne parvient à m’écouter, j’organiserai à mon arrivée, une sensibilisation pendant les mois d’hiver ; peut être que je vous inviterai et vous viendrez nous mettre sur pied.
Deuxième chose : Correction du livre de M. Pilote en langue italienne. Je vais aussi le traduire en langue somalienne. Je ferai une édition réduite en langue somalienne. Donc le livre de Monsieur Pilote en italien et en langue somalienne.
Un autre petit programme sur le crédit social que je pense à ajouter au programme en langue somalienne à Radio Vatican, qui est de 12 minutes le samedi soir et dimanche matin.
Je vais donc reprendre la traduction en langue italienne du livre des 10 leçons et le corriger et le retravailler encore, même en langue somalienne, je vais l’envoyer à Rome par le biais de la nonciature, et il va être utile pour toute la corne de l’Afrique. À Djibouti existe une liberté religieuse. Je ferai donc aussi avec des associations musulmanes cette sensibilisation, car le climat est bon avec eux.
Un exemple, c’est que pour le jubilé de l’an 2000, on nous avait demandé des initiatives ; j’ai alors traduit les quatre évangiles en somalien, et j’ai fait un document que j’ai appelé « évangile des catéchumènes ». Je ferai donc sortir ce message pour qu’il soit aussi adapté aux non chrétiens. Mais l’idée du crédit social restera la même, car les notes, je vais les adresser à ceux qui ne sont pas chrétiens. Le message du crédit social est un message de l’évangile. Dieu nous a donné l’intelligence, et pour faire passer certains messages, il faut avoir la docilité des colombes et la ruse des serpents. Il faudra le faire ainsi et j’ai l’intuition de sortir de nos poches ce message comme quelqu’un l’a dit ; mais je l’adapterai aux autres qui ne sont pas chrétiens.
Le dimanche 11 mai, les prêtres et l’évêque (Mgr Georgio Bertin) participant à notre session d’étude ont célébré la messe à la cathédrale Notre-Dame de Québec, dans le cadre d’un pèlerinage à la porte sainte (voir Vers Demain de janvier-février 2014), et ont aussi prié sur la tombe des deux nouveaux saints de Québec, François de Laval et Marie de l’Incarnation. Providentiellement, l’Évangile du jour portait sur Jésus qui est le bon pasteur et la porte des brebis (Jn 10, 1-10).