La contrition, pour être sincère, doit comporter ce que le catéchisme appelle « le ferme propos ». Mais le terme propos n'est pas la certitude de ne plus pécher dans l'avenir. Cela, ce serait de la présomption. Nous sommes, et nous serons, jusqu'à notre dernier soupir, des pécheurs.
Le ferme propos, c'est le désir sincère, maintenant, au moment où vous vous confessez, de faire tout ce qui dépend de vous pour ne plus retomber.
Il y a deux moyens de vérifier qu'on a le ferme propos :
Réparer, le plus tôt possible, les fautes qui peuvent être réparées : demander pardon à ceux qu'on a peinés ; rectifier, à la première occasion, le jugement téméraire ou la calomnie qu'on a lancée ; rendre ce qu'on a volé…
Supprimer les occasions qui dépendent de nous et qui nous entraîneront presque sûrement dans de nouveaux péchés : rompre ou espacer les relations avec telle personne ; éviter l'oisiveté ou les grasses matinées ; changer tel itinéraire de promenade ; renoncer à tel genre de lecture, de spectacle ou de conversation…
Et après ? Chaque péché nouveau exige une nouvelle confession et une nouvelle absolution. Dieu ne se lasse pas de pardonner.
Mais si je commets toujours les mêmes péchés, c'est que je ne fais aucun progrès, par conséquent mes confessions ne servent à rien…
Qu'en savez-vous ? Il est si difficile de se connaître. Nous pouvons accuser des péchés qui portent la même étiquette, qui correspondent aux mêmes catégories, et cependant faire des progrès réels, si l'attachement au péché diminue, et si nos rechutes nous rendent plus humbles et plus méfiants envers nous-mêmes.
La contrition est une « douleur » d'avoir offensé Dieu. Mais cette douleur n'est pas dans la sensibilité, elle ne s'accompagne pas forcément de larmes, ni même d'une tristesse vivement éprouvée. Cette douleur doit être le désir, peut-être bien imparfait, de ne plus retomber. Si vous êtes prêt à faire ce qui dépend de vous pour éviter les occasions de rechute, vous avez une contrition suffisante. La grâce du sacrement fera le reste.
Bien souvent nous manquons de contrition parce que nos examens de conscience sont trop rapides, nos confessions trop machinales. Si nous prenions un peu plus de temps pour nous examiner ; si nous apprenions à mieux connaître ce que Dieu attend de nous, en lisant l'Évangile et la vie des saints ; si nos prières étaient plus prolongées et plus sérieuses, nous aurions davantage de contrition.
Et puis la contrition est un don de Dieu. Comme tous les dons de Dieu, elle s'obtient par la prière. Vous vous plaignez de ne pas avoir la contrition. Mais l'avez-vous demandé à Dieu ?
Il y a des personnes qui ne peuvent sortir de chez elles sans remonter dix fois l'escalier pour vérifier qu'elles n'ont pas oublié de fermer le compteur à gaz.
Il y a des gens qui, une fois leur confession achevée et l'absolution reçue, voudraient revenir pour ajouter des détails, compléter une accusation. En quittant l'église, ils découvrent encore un péché oublié, et ils s'inquiètent, ils voudraient tout recommencer : pourrai-je communier demain, avec ce péché sur la conscience ?
La confession ni l'absolution ne sont des actes magiques et matériels. Sans doute faut-il loyalement accuser tous ses péchés graves. Mais la contrition concerne tous les péchés que nous avons commis : nous regrettons tous nos manquements, même ignorés de nous. Si j'ai la douleur d'avoir offensé Dieu, c'est parce que je l'aime. Or on n'aime pas quelqu'un par pièces détachées, on l'aime tout entier et on déteste tout ce qui le contrarie. De même l'absolution nous délie de tous nos péchés, à la mesure de notre contrition et non pas de notre aveu, si celui-ci, malgré nous, a été incomplet.
La prochaine fois que vous vous confesserez, vous accuserez le péché oublié. Pour l'instant, tenez-vous en à ce que dit le prêtre en refermant le volet du confessionnal : « Allez en paix. » Si le Seigneur a institué ce sacrement, c'est pour apaiser les âmes et non pour les tourmenter.
Et pourtant, les plus grands saints se confessaient souvent, et se jugeaient les plus grands pécheurs de la terre. Ce n'était pas par exagération, c'est parce qu'ils aimaient vraiment Dieu. Et l'amour est délicat et exigeant.
Si vous n'avez « rien à dire » c'est peut-être parce que vous vous examinez trop vite, trop superficiellement. Avez-vous jamais lu un examen de conscience bien fait, en essayant sérieusement de l'appliquer à votre vie réelle, en n'examinant pas seulement l'aspect extérieur des péchés les plus scandaleux, mais vos intentions, vos pensées secrètes, le fond de votre cœur.
Vous n'avez jamais tué. Mais n'avez-vous jamais eu de haine, de jalousie ou d'envie envers votre prochain ? Ne lui avez-vous jamais fait de tort, ou voulu lui en faire ?
Vous n'avez jamais volé. Mais n'aimez-vous pas exagérément l'argent ?
Vous n'avez jamais commis l'adultère. Mais votre cœur est-il vraiment chaste ?
Lisez les béatitudes, lisez le sermon sur la montagne. Cet idéal chrétien, est-ce que vous vous y conformez, dans ce que vous faites, dans ce que vous désirez et pensez, dans ce que vous êtes ?
Et puis, êtes-vous si sûr que cela d'aimer le prochain ? Vous n'avez jamais critiqué personne. Mais avez-vous rendu tous les services que le prochain pouvait attendre de vous ?
Allez, allez, vous avez beaucoup de choses à dire.
La plupart des « examens de conscience » suivent le plan suivant : commandements de Dieu, commandements de l'Église, péchés capitaux. Ce plan a pourtant des inconvénients : il comporte des répétitions ; il comporte surtout de graves lacunes : on risque tout simplement d'oublier le précepte essentiel de la charité et les devoirs d'état.
Un ordre beaucoup plus simple et plus positif est celui des devoirs envers Dieu, envers le prochain, envers soi-même.
Enfin, un ordre plus complet et plus naturel est celui des vertus : foi, espérance, charité (envers Dieu et envers le prochain), justice, prudence (ai-je pris mes responsabilités ?), force (courage dans les épreuves, courage au travail, patience) et tempérance (désirs de la chair et bon usage du manger et du boire).
Quel que soit l'ordre adopté, n'oubliez jamais de vous interroger sur quelques points essentiels : Ai-je approfondi et développé ma foi ? Ai-je prié (non seulement le matin et le soir, mais dans la tentation, dans l'épreuve, dans la joie ?). Ai-je rendu service à mon prochain dans le besoin ? Ai-je été trop attaché à l'argent ? Ai-je payé consciencieusement mon personnel ? Ai-je été consciencieux dans mes tâches professionnelles, à l'égard de mes responsabilités familiales et sociales ? Ai-je pardonné à ceux qui m'ont fait du tort ? Ai-je réparé le tort que j'ai fait ?
Une question qui pourrait à elle seule, sinon remplacer, du moins éclairer tout un examen de conscience, est celle-ci : ceux qui m'entourent sont-ils heureux ou malheureux par ma faute ? Suis-je un semeur de paix et de joie ?
Et pourquoi ne pas faire parfois notre examen de conscience en relisant les béatitudes, qui sont le code positif de la perfection chrétienne, au lieu de chercher seulement si nous sommes arrivés en retard à la messe, par exemple ?
Source : Les Albums Liturgiques, La Confession, 1961, édité par Fêtes et Saisons.