Certains pourraient dire, après avoir vu l'article précédent, qu'on n'a pas à s'inquiéter de l'enfer, puisque saint Paul écrit : « Dieu veut que tous les hommes soient sauvés » (1 Timothée 2, 4). Si Dieu le veut, alors tout le monde est donc automatiquement sauvé, diront certains ; mais ils oublient que Dieu respecte la liberté de l'homme, qui peut accepter ou refuser ce salut. Il est vrai de dire que Dieu est amour, et que Sa miséricorde est infinie, mais précisément parce qu'Il est amour, Dieu respecte le libre arbitre, la liberté de choix des êtres humains. Sans liberté, il ne peut y avoir d'amour : Dieu ne nous oblige pas à L'aimer, il ne s'impose pas à nous ; notre décision de L'aimer, et d'aimer notre prochain, doit être entièrement libre.
En d'autres mots, même si Dieu est tout-puissant et est mort sur la croix (et ressuscité !) pour chacun de nous, Il ne peut pas nous sauver malgré nous, contre notre volonté. Nous devons faire un effort, collaborer à Son plan de salut, l'accueillir. On peut lire aussi dans l'Évangile ces paroles de Jésus : « Entrez par la porte étroite. Elle est grande, la porte, il est large, le chemin qui conduit à la perdition ; et ils sont nombreux, ceux qui s'y engagent. Mais elle est étroite, la porte, il est resserré, le chemin qui conduit à la vie ; et ils sont peu nombreux, ceux qui le trouvent » (Matthieu 7, 13).
Nous sommes tous pécheurs, des êtres faibles, et sans la grâce de Dieu, nous trébuchons. Nous avons été créés pour Dieu, mais le péché originel nous a brisés, nous entraîne à l'égoïsme et au repli sur soi, au lieu d'aimer Dieu et notre prochain. Saint Augustin va même jusqu'à employer cette formule (tirée de son livre La Cité de Dieu) : « Deux amours ont donc fait deux cités : l'amour de soi jusqu'au mépris de Dieu, (qui est) la cité terrestre ; l'amour de Dieu jusqu'au mépris de soi, (qui est) la cité céleste. »
La bonne nouvelle dans tout cela c'est que Dieu ne nous abandonne pas, Il ne nous laisse pas tout seul avec nos seuls moyens humains limités, Il est miséricorde. Le mot « miséricorde » vient d'ailleurs du latin « misereo » (avoir pitié) et « cor » (cœur), ce qui signifie littéralement que Dieu penche Son cœur sur nos misères — et vient à notre aide par les sacrements, spécialement l'Eucharistie et la Confession, pour que nous ayons part avec Lui à son banquet de noces éternel, au bonheur du Ciel.
Nous tombons, mais il ne faut pas demeurer dans le péché, il faut se relever. Pour citer encore saint Augustin : « Se tromper est humain, persister dans son erreur est diabolique. » Tomber dans le péché est humain, se relever est divin, mais pour cela, nous avons besoin de la grâce divine, du pardon de Dieu, de Sa miséricorde.
Pour bien comprendre tout cela, relisons ces extraits de la deuxième encyclique de saint Jean-Paul II portant sur la miséricorde divine, intitulée justement Dives in Misericordia (Dieu riche en miséricorde), datée du 30 novembre 1980 (paragraphe 13) :
« Des théologiens affirment que la miséricorde est le plus grand des attributs de Dieu, la plus grande de ses perfections ; la Bible, la Tradition et toute la vie de foi du peuple de Dieu en fournissent des témoignages inépuisables… L'Église vit d'une vie authentique lorsqu'elle professe et proclame la miséricorde, attribut le plus admirable du Créateur et du Rédempteur, et lorsqu'elle conduit les hommes aux sources de la miséricorde du Sauveur, dont elle est la dépositaire et la dispensatrice.
« Dans ce cadre, la méditation constante de la parole de Dieu, et surtout la participation consciente et réfléchie à l'Eucharistie et au sacrement de pénitence ou de réconciliation, ont une grande signification. L'Eucharistie nous rapproche toujours de cet amour plus fort que la mort… La liturgie eucharistique, célébrée en mémoire de celui qui dans sa mission messianique nous a révélé le Père par sa parole et par sa croix, atteste l'inépuisable amour en vertu duquel il désire toujours s'unir à nous et ne faire qu'un avec nous, allant à la rencontre de tous les cœurs humains.
« C'est le sacrement de la pénitence ou de la réconciliation qui aplanit la route de chacun, même quand il est accablé par de lourdes fautes. Dans ce sacrement, tout homme peut expérimenter de manière unique la miséricorde, c'est-à-dire l'amour qui est plus fort que le péché… Parce que le péché existe dans ce monde que "Dieu a tant aimé qu'il a donné son Fils unique" (Jean 3, 16), Dieu qui "est amour" (1 Jean 4, 8) ne peut se révéler autrement que comme miséricorde. Cela correspond non seulement à la vérité la plus profonde de cet amour qu'est Dieu, mais aussi à la vérité intérieure de l'homme et du monde qui est sa patrie temporaire.
« La miséricorde, en tant que perfection du Dieu infini, est elle-même infinie. Infinie donc, et inépuisable, est la promptitude du Père à accueillir les fils prodigues qui reviennent à sa maison. Infinies sont aussi la promptitude et l'intensité du pardon qui jaillit continuellement de l'admirable valeur du sacrifice du Fils.
« Aucun péché de l'homme ne peut prévaloir sur cette force ni la limiter. Du côté de l'homme, seul peut la limiter le manque de bonne volonté, le manque de promptitude dans la conversion et la pénitence, c'est-à-dire l'obstination continuelle qui s'oppose à la grâce et à la vérité, spécialement face au témoignage de la croix et de la résurrection du Christ. »
Et le Saint-Père ajoute que si nous voulons être pardonnés par Dieu, nous devons nous-mêmes être miséricordieux envers nos frères et sœurs, comme Jésus nous l'enseigne dans la prière du Notre Père : « Pardonnez-nous comme nous pardonnons aussi à ceux qui nous ont offensés ». Donc, accepter le pardon de Dieu non seulement dans nos paroles, mais par nos actions. En effet, comme il est écrit dans l'Évangile, ce ne sont pas ceux qui disent « Seigneur, Seigneur » qui auront la vie éternelle, mais ceux qui font la volonté de Son Père. Et la volonté du Père, c'est que nous l'aimions Lui, bien sûr, mais aussi notre prochain, puisque comme il est écrit dans Matthieu 25 : « Ce que vous avez fait au plus petit d'entre vos frères, c'est à Moi (Jésus) que vous l'avez fait. » Alors, il faut orienter notre vie en conséquence, en venant en aide à notre prochain, par des œuvres de miséricorde, temporelles et spirituelles.
Les sept œuvres de miséricorde corporelles sont :
Les sept œuvres de miséricorde spirituelles sont :
En 1931, Jésus apparut à une religieuse polonaise, Faustina Kowalska (1905-1938), lui demandant que soit faite une peinture le représentant avec les mots « Jésus, j'ai confiance en Toi », et que soit instituée dans l'Église universelle une fête de la miséricorde divine. Le 30 avril 2000, sœur Faustine était déclarée sainte par le pape Jean-Paul II, qui instituait le même jour, pour l'Église universelle, le dimanche de la Miséricorde, devant être célébré chaque année le premier dimanche après Pâques.
« Je suis Saint, dit Jésus à sœur Faustine, et le moindre péché me fait horreur. Mais lorsque les pécheurs se repentent, ma Miséricorde est sans limites... Les plus grands pécheurs pourraient devenir de très grands saints s'ils se fiaient à ma Miséricorde... On ne puise ma Miséricorde qu'avec la coupe de la confiance. Plus on a confiance et plus on obtient... Ce m'est une joie lorsque les pécheurs recourent à ma Miséricorde. Je les comble au-delà de leur espérance ».
