Article de Mme Monik Faucher, tiré de la revue diocésaine « L’Envoi de Saint-Hyacinthe » d’avril 2011. Publié avec la permission de l’auteur et du bon Frère Charbel. Un bel exemple à suivre pour les jeunes dégoûtés de la vie sans Dieu, et pour les mères qui prient pour la conversion de leur fils. Confiance, Dieu a son heure. Th.T
Il y a des rencontres qui s’apparentent à des visites de Dieu dans nos vies ! C’est ainsi que Claire Dumesnil et moi nous avons vécu ce rendez-vous avec le frère Charbel. L’Objectif premier de notre entrevue visait un tout autre thème à préparer pour le mois de mai. Mais voilà que d’emblée, le « mystère » d’une vocation nous intrigue et s’impose à nous comme un cadeau inespéré. Mes mots ne sont que trop pauvres pour traduire tout le rayonnement qui traverse le regard et la vie de cet homme de Dieu. Après avoir trop brièvement résumé son parcours, j’emprunterai ses propres mots qui coulent de source lorsqu’il nous partage son vécu.
Loin de lui l’idée de devenir moine un jour ! Tout jeune, il ne croit ni à Dieu, ni à diable. Devant un avenir prometteur, il plonge à plein dans les aventures qui s’offrent à lui. Informaticien de profession, il saisit l’opportunité d’aller travailler dans ce domaine au Koweït ; il séjourne là de 1985 à 1990. C’est en janvier de cette même année que se déclare la guerre du Golfe. Avec d’autres travailleurs de divers pays, il a été pris en otage, personne ne pouvait sortir hors du pays. Il a donc été reclus et pris en otage dans son propre appartement pendant 4 mois ; il n’a pas hésité à cacher chez lui des amis dont la vie était encore plus en danger que la sienne.
Rapatrié et suite à tous ces événements bouleversants, il juge bon de prendre une année sabbatique au pays. Il cherche une auberge pour s’y réfugier et se reposer. Suite à une consultation, il est plus qu’étonné lorsque trois amis totalement différents sont unanimes à lui conseiller d’aller à l’abbaye de Rougemont. Il s’y rend pour une semaine sans aucune conviction.
Pour la suite de sa belle histoire, j’emprunte ses propres mots, mais vous êtes malheureusement privés de la sérénité lumineuse qui émane de lui. Le frère Charbel se raconte ainsi : « C’est alors que ma vie bascule pour de bon ! Pour la première fois dans toute mon existence, je ne suis pas seul. Il y a quelque chose, je me sens devant sa présence. Je prends alors conscience que ce n’est pas quelque chose, mais quelqu’un, pas un fantôme, mais une présence ravissante, je me sens aimé d’un amour totalement gratuit et sans retour...
C’est très clair et déterminant. Moi qui étais chef de projets, voilà que je tombe radicalement dans un projet qui n’est pas le mien. Alors là, je n’étais pas intéressé et je réponds spontanément : prends un autre ! Une voix me répond : “Je t’aime !” Je me décide d’aller à un office du matin ; l’évangile du jeune homme riche m’interpelle profondément : “Viens, suis-moi !” Dans ma tête, ça n’a aucun sens, mais mon cœur profond me dit que c’est en plein ça… J’ai le sentiment que ce n’est pas l’appel, c’est l’amour ! Après une semaine vécue au monastère, le Père Thomas me conseille d’aller voir ma mère. En la voyant, je lui apprends que Dieu est entré dans ma vie. Ma mère pleure et elle m’avoue que ça fait 25 ans qu’elle prie pour que je trouve Dieu. Cette histoire, c’est la grâce du baptême, on sous-estime cette grâce… mais de là à apprendre à ma mère que je rentre au monastère, la surprise est plus grande pour elle, elle trouve que ça n’a aucun sens !
Ici au monastère, tout me parle ! J’y suis depuis 19 ans. Je vis avec la certitude que je fais ici ce que Dieu veut que je fasse. Il n’y a rien de perdu… tout est utile ! Voilà, ma conversion… un retournement du cœur, pour moi, en obéissant à cet appel, tout le cours de mon existence est infléchi par quelqu’un d’autre que moi. C’est ma même vie qui se continue… mais tout autrement. Je n’étais pas malheureux, je suis tout simplement plus heureux et libre. Je réalise que ce qui me manquait, c’est l’amour authentique. Dieu m’invite à aimer et à donner en retour. Je n’ai pas de connaissances de Dieu, mais j’ai une expérience de Dieu.
Je suis l’exemple parfait que la prière existe… je sais que, dans le plan de Dieu, toute prière à sa raison d’être, elle est relation et dialogue amoureux. Le silence est une prière. Je suis à la foi solitaire et solidaire, et je vis avec la certitude que je suis ici, et tout aussi intimement lié à mes frères et sœurs du monde entier. Jésus me dit : “Sois mes mains ! Soulage l’autre par ta présence, ton écoute, ton entraide”. »
Voilà ! Que c’est beau et bon de croiser ce grand frère qui témoigne hautement d’un Christ ressuscité. Une fois de plus, comment ne pas croire profondément à ces vies consacrées qui s’enracinent dans l’essentiel !
Monik Faucher