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Canonisation de Jacinthe et François Marto

le lundi, 01 mai 2017. Dans Apparitions et miracles

13 mai 2017: centenaire des Apparitions de Notre-Dame du Rosaire à Fatima

Les apparitions de Fatima

(Note de l'éditeur.) Le 13 mai 2017, à Fatima au Portugal, 100 ans jour pour jour après la première apparition de la Vierge Marie à trois petits pastoureaux, le Pape François présidait devant plus de 500 000 fidèles une messe pour la canonisation de deux des trois petits voyants, Jacinthe et François Marto, décédés à l’âge de 9 ans et 10 ans, faisant d’eux les plus jeunes saints canonisés non martyrs de l’Église. Ils avaient d’abord été déclarés bienheureux par le Pape Jean-Paul II le 13 mai 2000, aussi à Fatima, et c’est au cours de cette cérémonie que le fameux «troisième secret» de Fatima fut rendu public .

De toutes les apparitions mariales de l’histoire, Fatima est sans contredit la plus marquante, avec un message qui est toujours aussi actuel et nécessaire: en bonne Mère qui se soucie du salut de tous ses enfants, Marie nous rappelle l’existence de l’enfer, et nous donne les moyens pour l’éviter, et obtenir aussi la paix pour le monde: conversion, pénitence, la récitation quotidienne du chapelet et la consécration à son Cœur immaculé.
Voici une biographie de ces deux nouveaux saints, tirée des lettres mensuelles d’août 2000 et de mars 2006 de l’Abbaye Saint-Joseph de Clairval, qui, tout en donnant le récit des apparitions, nous montrera jusqu’à quel degré héroïque ces deux jeunes enfants ont vécu et mis en pratique les demandes de la Mère de Dieu, devenant ainsi des modèles à imiter non seulement pour les autres enfants, mais pour les gens de tout âge du monde entier. (Fin de la note.)

François Marto est né le 11 juin 1908, et sa sœur Jacinthe, le 10 mars 1910. Leur cousine Lucie, qui verra avec eux la Sainte Vierge, est née le 22 mars 1907. Tous trois sont originaires d’un hameau nommé Aljustrel près de Fatima, au centre du Portugal. Dans le foyer Marto, on respire une ambiance chrétienne, fondée sur une solide honnêteté naturelle. L’amour de la vérité – on ne doit pas mentir – est une règle fondamentale soigneusement respectée. L’amour de la pureté est un autre trait distinctif de la famille: divertissements, paroles, attitudes, tout est honnête, délicat et pur. La piété chrétienne et la prière, l’assistance à la Messe dominicale, la réception des sacrements, sont habituelles.

Les trois enfants de Fatima
Les trois voyants de Fatima: Lucie Dos Santos, François et Jacinthe Marto. En juin 1917, Lucie avait demandé à la Sainte Vierge de les emmener tous trois au Paradis. «Oui, répondit Marie. Pour Jacinthe et pour François, je les prendrai bientôt. Mais toi tu resteras ici-bas encore quelque temps...» Lucie les rejoindra au Paradis plus de 85 ans plus tard, le 13 février 2005, à l’âge de 97 ans.

Les paysans d’Aljustrel vivent pauvrement des ressources de leurs terres pierreuses et de leurs brebis. Lucie, François et Jacinthe ont l’habitude de réunir leurs troupeaux pour les faire paître ensemble, et ils organisent des jeux qui n’empêchent pas la vigilance. Un jour du printemps 1916, un Ange leur apparaît; courbant le front jusqu’à terre, il dit par trois fois: «Mon Dieu, je crois, j’adore, j’espère et je vous aime! Je vous demande pardon pour ceux qui ne croient pas, qui n’adorent pas, qui n’espèrent pas, qui ne vous aiment pas!» Lors d’une deuxième apparition, en été, l’Ange leur recommande d’offrir à Dieu «des prières et des sacrifices». Il revient en septembre, tenant un calice surmonté d’une Hostie d’où coulent des gouttes de sang. L’Ange s’agenouille avec les enfants et leur fait répéter trois fois: «Très Sainte Trinité, Père, Fils et Saint-Esprit, je vous adore profondément, et je vous offre les très précieux Corps, Sang, Âme et Divinité de Notre-Seigneur Jésus-Christ, présent dans tous les tabernacles du monde, en réparation des outrages par lesquels Il est Lui-même offensé. Par les mérites infinis de son Cœur Sacré et par l’intercession du Cœur Immaculé de Marie, je vous demande la conversion des pauvres pécheurs».

Le 13 mai 1917, Lucie, François et Jacinthe ont conduit leurs brebis en un lieu appelé Cova da Iria. Il est midi et le ciel est limpide. Soudain, un éclair traverse les airs. Croyant à la venue d’un orage, les enfants poussent le troupeau vers le fond de la combe. Là, se tient devant eux une jeune fille d’une beauté extraordinaire, toute lumineuse, vêtue d’une longue robe blanche et d’un voile qui descend jusqu’aux pieds; ceux-ci sont posés sur un léger nuage qui effleure un petit chêne vert. Elle paraît avoir dix-huit ans. Lucie lui demande: «De quel endroit êtes-vous, Madame? – Je suis du Ciel. – Et que désirez-vous de nous? – Je viens pour vous demander de vous trouver ici six fois de suite, à cette même heure, le 13 de chaque mois. Après, je vous dirai qui je suis et ce que je désire de vous. – Vous venez du Ciel!... et moi, irai-je au Ciel? – Oui, tu iras. – Et Jacinthe? – Aussi – Et François? – Il ira aussi; mais il devra dire beaucoup de chapelets…»

Qui nous fera voir le bonheur? (Ps 4,7)

Le premier enseignement de la Sainte Vierge à Fatima est le rappel de la réalité du Ciel. Dieu nous a mis au monde pour Le connaître, L’aimer et Le servir, et ainsi parvenir au Paradis. Ceux qui meurent dans la grâce et l’amitié de Dieu, et qui sont parfaitement purifiés, entrent au Ciel où ils sont pour toujours semblables à Dieu, parce qu’ils Le voient tel qu’il est (1 Jn 3, 2), face à face (cf. 1 Co 13, 12). Cette vie parfaite de communion et d’amour avec la Très Sainte Trinité, avec la Vierge Marie, les anges et les saints, tout en résultant d’un don gratuit de Dieu, est la fin ultime et la réalisation des aspirations les plus profondes de l’homme, l’état de bonheur suprême et définitif. Dieu, en effet, a mis dans le cœur de l’homme le désir du bonheur afin de l’attirer à Lui.

L’espérance du Ciel nous apprend que le vrai bonheur ne réside ni dans la richesse ou le bien-être, ni dans la gloire humaine ou le pouvoir, ni dans aucune œuvre humaine, si utile soit-elle, comme les sciences, les techniques et les arts, ni dans aucune créature, mais en Dieu seul, source de tout bien et de tout amour. «Dieu seul rassasie», dit saint Thomas d’Aquin.

Après avoir fortifié les enfants par la promesse inestimable du Ciel, la Dame les introduit dans le mystère de la Rédemption auquel, avec une exquise délicatesse, elle leur demande de s’associer: «Voulez-vous vous offrir à Dieu pour faire des sacrifices et accepter volontiers toutes les souffrances qu’Il voudra vous envoyer en réparation des péchés qui offensent sa divine Majesté? Voulez-vous souffrir pour obtenir la conversion des pécheurs, pour réparer les blasphèmes ainsi que toutes les offenses faites au Cœur Immaculé de Marie? – Oui, nous le voulons! répond Lucie. – Vous aurez beaucoup à souffrir, mais la grâce de Dieu vous assistera et vous soutiendra toujours». Tout en parlant, l’Apparition ouvre les mains et ce geste répand sur les voyants un faisceau de lumière mystérieuse, qui, pénétrant leurs âmes, les fait se voir eux-mêmes en Dieu.

D’abord consoler Jésus

Cette grâce, par laquelle Dieu a rejoint les trois enfants au plus profond d’eux-mêmes, émerveille François. Par un étonnant mystère, Dieu se fait connaître à lui comme «triste» à cause des péchés des hommes. Il s’opère alors en ce garçon d’à peine neuf ans une transformation radicale. À première vue, il paraît être moins favorisé que ses compagnes: Lucie voit Notre-Dame et parle avec Elle; Jacinthe la voit et l’entend, mais ne parle pas; François la voit seulement, mais ne l’entend pas et ne parle pas avec Elle. Il s’engage pourtant dans une vie spirituelle intense. Sachant que son entrée au Ciel est conditionnée par la récitation de beaucoup de chapelets, il n’en demeure pas moins dans un état merveilleux de tranquillité et de confiance. Il se met à réciter jusqu’à deux rosaires, et même plus, chaque jour.

Sa piété, loin d’être une répétition mécanique des prières du chapelet, le plonge dans un état habituel d’oraison. Sa préoccupation est de tenir compagnie à Notre-Seigneur et de le consoler. Une nuit, son père l’entend sangloter: «Je pense à Jésus qui est si triste à cause des péchés que l’on accomplit contre Lui», lui confie François. À la demande de Lucie: «Qu’est ce qui te plaît le plus: consoler Notre-Seigneur ou convertir les pécheurs pour que les âmes n’aillent pas en enfer?», il répond: «Je préférerais consoler Notre-Seigneur, mais ensuite convertir les pécheurs pour qu’ils ne L’offensent plus».

La parabole de l’enfant prodigue nous révèle que le drame du péché n’est pas seulement celui d’un fils qui s’éloigne de la maison paternelle, mais aussi la tragédie du père qui souffre de cet éloignement. Dieu se trouve, mystérieusement, dans cette situation lorsque nous commettons le péché. Dans notre langage humain, nous disons alors que Dieu «souffre» de notre éloignement. Les âmes habitées par un amour de Dieu très intense se préoccupent des répercussions du péché dans le Cœur de Dieu, qu’elles veulent «consoler». Tel paraît avoir été le cas de François. Ce petit voyant, qui semblait défavorisé au plan des apparitions, est parvenu aux sommets les plus élevés de la spiritualité chrétienne.

La vision de l’enfer

La vision de l'EnferL’effet des apparitions sur Jacinthe se manifeste surtout après le 13 juillet. Ce jour-là, Notre-Dame montre l’enfer aux trois enfants. Lucie écrira: «Elle nous fit voir un océan de feu... et, plongés dans ce feu, les démons et les âmes comme des braises noires et transparentes... au milieu de cris et de gémissements de douleur et de désespoir qui épouvantaient et faisaient trembler de frayeur». La Sainte Vierge demande de garder cette vision secrète. Elle ne permettra à Lucie de la révéler qu’en 1941.

Jacinthe en retire une impression qui la marque profondément. À partir de ce jour, elle se montre très préoccupée du sort des pauvres âmes qui tombent en enfer. Elle s’assoit souvent par terre ou sur une pierre, et, toute pensive, elle dit: «Oh, l’enfer! Que j’ai de peine pour les âmes qui vont en enfer!» Cependant, elle ne s’en tient pas à une peine stérile, mais, sous la motion d’une charité très élevée, elle prie et se sacrifie héroïquement pour ceux qui sont en péril de se perdre.

Une pénible réalité

La vision de l’enfer dont les trois enfants ont été favorisés, n’est pas une exagération de la réalité qu’elle représente. C’en est une présentation à la portée de l’esprit humain. Le Pape Paul VI, dans son «Credo du Peuple de Dieu», expose d’abord la perspective de l’amour et de la miséricorde de Dieu, qui nous conduisent à la vie éternelle. Mais il ajoute que «ceux qui refusent jusqu’au bout cet amour et cette miséricorde iront au feu qui ne s’éteint pas».

En 1992, Lucie, qui est Carmélite à Coïmbre (Portugal) depuis 1948, disait à un Cardinal venu la visiter: «L’enfer est une réalité... Continuez à prêcher sur l’enfer, car Notre-Seigneur lui-même a parlé de l’enfer et c’est dans la Sainte Écriture. Dieu ne condamne personne à l’enfer. Ce sont les personnes qui se condamnent elles-mêmes à l’enfer. Dieu a donné aux hommes la liberté de choix, et Il respecte cette liberté humaine».

Sœur Lucie écrivait, quelques années avant sa mort survenue le 13 février 2005: «Dans le monde, il ne manque pas d’incrédules pour nier ces vérités, mais celles-ci n’en continuent pas moins d’exister malgré le fait qu’elles sont niées; et cette incrédulité ne les délivre pas des affres de l’Enfer si leur vie de péché les y conduit... À Fatima, (Dieu) nous a envoyé son Message comme une preuve de plus de ces vérités. Ce Message nous les rappelle pour que nous ne nous laissions pas tromper par les fausses doctrines des incrédules qui les nient et des dévoyés qui les déforment. À cette fin, le Message nous assure que l’Enfer est une vérité et que les âmes des pauvres pécheurs y tombent» (Appels du Message de Fatima, éd. Secrétariat des Pastoureaux, 2003, chapitre 14).

Les enfants de Fatima après la vision de l'Enfer
Photo des trois voyants de Fatima prise le 13 juillet 1917, après la vision de l’enfer.
Souvent Jacinthe s’agenouillait, les mains jointes, pour réciter la prière que Notre-Dame leur avait enseignée: «O mon Jésus, pardonnez-nous nos péchés, préservez-nous du feu de l’enfer, conduisez au Ciel toutes les âmes, spécialement celles qui ont le plus besoin de votre miséricorde.» Et elle restait de longs moments en prière, invitant les deux autres voyants à faire de même. «François, Lucie, priez-vous avec moi? Il faut prier beaucoup pour empêcher les âmes d’aller en enfer! Il y en a tant, tant!» D’autres fois Jacinthe demandait à Lucie: «Pourquoi la Sainte Vierge ne fait-Elle pas voir l’enfer aux pécheurs? S’ils le voyaient ils ne pécheraient plus, pour ne pas tomber dedans! Tu dois dire à cette Dame qu’Elle montre l’enfer à tous ces gens (présents au moment de l’apparition); tu verras comme ils se convertiront!»

Décrivant par avance le jugement dernier, Jésus affirme: Alors le Fils de l’homme dira à ceux qui seront à sa gauche: «Allez-vous-en loin de moi, maudits, dans le feu éternel préparé pour le démon et ses anges»... Et ils s’en iront, ceux-ci au châtiment éternel, et les justes, à la vie éternelle (Mt 25, 41 et 46). Au cours de sa vie publique, notre Sauveur Jésus revient souvent sur le thème de l’Enfer, de la géhenne, du feu qui ne s’éteint pas (cf. Mc 9, 43-48), réservé à ceux qui refusent jusqu’à la fin de leur vie de croire et de se convertir, et où peuvent être perdus à la fois l’âme et le corps (cf. Mt 10, 28). Le Compendium du Catéchisme de l’Église catholique (n. 395) nous le rappelle: «Le péché mortel détruit en nous la charité, nous prive de la grâce sanctifiante et conduit à la mort éternelle de l’Enfer s’il n’y a pas de repentir».

Le Magistère de l’Église s’est exprimé bien souvent à ce sujet; le Pape Pie XII soulignait, le 23 mars 1949: «La prédication des premières vérités de la foi et des fins dernières, non seulement n’a rien perdu en nos jours de son opportunité, mais elle est devenue plus que jamais nécessaire et urgente, même la prédication sur l’Enfer. Sans doute faut-il traiter ce sujet avec dignité et avec sagesse. Mais, quant à la substance de cette vérité, l’Église a, devant Dieu et devant les hommes, le devoir sacré de l’annoncer, de l’enseigner, sans aucune atténuation, telle que le Christ l’a révélée, et il n’y a aucune circonstance de temps qui puisse diminuer la rigueur de cette obligation. Elle lie en conscience chaque prêtre auquel, dans le ministère ordinaire ou extraordinaire, est confié le soin d’instruire, d’avertir et de guider les fidèles. Il est vrai que le désir du Ciel est un motif en soi plus parfait que la crainte des peines éternelles; mais il ne s’ensuit pas que ce soit pour tous les hommes aussi le motif le plus efficace pour les retenir éloignés du péché, et pour les convertir à Dieu».

Devant les événements d’Aljustrel, les partisans de la politique anticléricale au Portugal s’agitent. L’administrateur de l’arrondissement de Vila Nova de Ourém, dont dépend le hameau, est un homme sectaire. Le 13 août, il se rend à Fatima, et emmène par ruse les trois enfants à Ourém. Les petits voyants sont consternés de manquer le rendez-vous donné par la Sainte Vierge. Ils offrent ce grand sacrifice à Notre-Seigneur. Interrogés sur les apparitions, ils racontent ce qu’ils ont vu, mais restent fidèles au secret. On leur promet des pièces d’or: rien ne peut les ébranler. En dernier recours, l’administrateur les conduit à la prison et leur dit: «Si vous tardez trop à parler, on vous fera frire dans l’huile». Le soir, les trouvant inébranlables, il commande de préparer une chaudière pleine d’huile. Puis, se tournant vers Jacinthe: «Dis le secret que tu prétends avoir reçu. – Je ne puis pas. – Tu ne peux pas?... Eh bien, je vais faire en sorte que tu puisses!...» Un gendarme emmène Jacinthe. Au bout de quelques minutes, l’administrateur s’adresse à François: «Voilà ta sœur frite!... Maintenant à toi!... dis-moi ton secret. – Je ne puis le dire à personne». Et, on l’entraîne pareillement. Puis, vient le tour de Lucie. En réalité, ce n’est qu’une mise en scène; cependant Lucie avouera plus tard: «Je croyais que c’était pour de bon et que j’allais mourir. Mais je n’avais pas peur et je me recommandais à la Sainte Vierge». Un tel courage, chez des enfants, manifeste une intervention surnaturelle de Dieu par l’octroi du don de force.

Le 13 septembre, la Sainte Vierge confirme sa promesse d’un grand miracle pour le 13 octobre. Ce jour-là, la Dame donne son nom: «Je suis Notre-Dame du Rosaire. Je désire que l’on fasse ici une chapelle en mon honneur, et que l’on continue à dire le chapelet tous les jours». La foule est évaluée à 70.000 personnes. À la fin de l’apparition, le soleil se met à danser, à émettre toutes sortes de couleurs, puis il semble se précipiter par bonds en zigzag sur la foule, et enfin reprend sa place, miracle qui accrédite les apparitions. Les jours qui suivent, les petits sont harcelés d’interrogatoires interminables de la part de toutes sortes de personnes. Suivant les recommandations de la Sainte Vierge, ils offrent leurs souffrances à Dieu. Pour sauver les pécheurs, ils sont devenus insatiables de sacrifices.

Entrez dans l'EspéranceDans le livre Entrez dans l’Espérance, publié en 1994, le journaliste Vittorio Messori demande à saint Jean-Paul Il pourquoi tant de gens d’Église n’osent plus parler de l’enfer. Le Saint-Père répond:

«Certains se rappelleront qu’il n’y a pas si longtemps, dans les sermons prononcés à l’occasion des retraites spirituelles ou des missions, les “fins dernières”, les réalités ultimes de la mort, du jugement, de l’enfer, du paradis et du purgatoire, constituaient le sujet immuable des méditations, que les prédicateurs savaient mener avec un art très pédagogique de révocation. Combien d’hommes se sont convertis et confessés grâce à ces sermons et à ces descriptions de l’au-delà!

«Il faut avoir l’honnêteté de reconnaître que oui, l’homme s’est égaré, les prédicateurs se sont égarés, les catéchistes se sont égarés, les éducateurs se sont égarés. C’est pourquoi ils n’ont plus le courage de «mena-cer de l’enfer... Pourtant, les paroles du Christ sont sans équivoque. Chez Matthieu (25, 46), il parle clairement de ceux qui connaîtront des peines éternelles...»

«Quelle belle lumière!»

À l’automne 1918, François tombe gravement malade de la «grippe espagnole»: il attend la mort avec autant de certitude que de patience. Même aux moments de la plus forte fièvre, il n’oublie pas son chapelet. Un jour Lucie lui demande: «Souffres-tu beaucoup? – J’ai tellement mal à la tête! répond-il, mais je veux le supporter pour consoler Notre Seigneur». Le 2 avril 1919, il se confesse et, le lendemain, fait sa première Communion qui est aussi son dernier Viatique. Depuis qu’il a communié, il n’éprouve plus la moindre douleur. Vers 10 heures du soir, il dit à sa mère: «Regarde, maman, quelle belle lumière, là, près de la porte». Au bout d’un moment: «Je ne la vois plus». Son visage s’illumine d’une clarté angélique et, sans agonie, avec un léger sourire sur les lèvres, son âme se détache de son corps et va rejoindre la Dame dont, sur la terre, il a entrevu la Beauté. Le dernier à la Cova, François entre le premier en Paradis.

Saints Jacinthe et François MartoJacinthe, elle aussi, est frappée par l’épidémie. De petite fille boudeuse, délicate, aimant à la folie les jeux et la danse, l’enfant est devenue patiente, forte et même rude devant la souffrance. Cependant elle n’est pas morne. Conduisant les brebis ou cueillant des fleurs, elle chante, sur des airs improvisés: «Doux Cœur de Marie, soyez mon salut! Immaculé Cœur de Marie, convertissez les pécheurs, préservez leurs âmes de l’enfer». Son amour du Pape est singulier. Lors de l’apparition du 13 juillet 1917, la Sainte Vierge avait dit: «Le Saint-Père aura beaucoup à souffrir». Un peu plus tard, Jacinthe reçoit deux révélations particulières. Un jour, elle dit à Lucie: «J’ai vu le Saint-Père, dans une très grande maison, à genoux devant une table, la tête dans les mains, et pleurant. Dehors, il y avait beaucoup de monde. Les uns lui jetaient des pierres, d’autres lui adressaient des injures et lui disaient de vilaines paroles. Pauvre Saint-Père! Il nous faut prier beaucoup pour lui!» Une autre fois, elle voit le Pape priant, avec une foule, devant le Cœur Immaculé de Marie. Ces révélations inspirent à Jacinthe une ferveur pleine d’amour dans ses prières pour le Saint-Père.

«C’est si bon d’être avec Lui!»

Un jour, Jacinthe confie à Lucie: «Notre-Dame est venue me voir. Elle veut que j’aille dans deux hôpitaux. Mais ce n’est pas pour guérir: c’est pour souffrir davantage par amour pour Notre-Seigneur et pour les pécheurs». En attendant, elle prie beaucoup et ne manque aucune occasion de faire des sacrifices: elle se lève la nuit pour réciter à genoux la prière de l’Ange, accepte de boire des tasses de lait qui lui soulèvent le cœur, fait le sacrifice de ne pas se retourner dans son lit en dépit de la douleur. Lorsque Lucie revient de la Messe, elle lui dit: «Approche-toi tout près de moi puisque tu portes dans ton cœur Jésus caché... Je ne sais comment, je sens Notre-Seigneur en dedans de moi, et, sans Le voir ni L’entendre, je comprends ce qu’Il me dit. C’est si bon d’être avec Lui!...»

On la transporte à l’hôpital de Vila Nova de Ourém. La séparation de Lucie lui coûte plus que tout, car seule sa cousine est à même de la comprendre. Une fistule s’est ouverte à son côté gauche. «Ne dis à personne que la plaie me fait mal, confie-t-elle à Lucie qui est venue la visiter… Dis à Jésus au Tabernacle que je l’aime beaucoup». Un jour, elle rapporte à Lucie: «La Sainte Vierge m’a annoncé que j’irai à Lisbonne dans un autre hôpital. Je ne te reverrai plus, ni mes parents. Après avoir souffert beaucoup, je mourrai seule». Cette perspective la fait beaucoup souffrir: «Que t’importe, lui fait remarquer Lucie, si la Sainte Vierge vient te chercher! – Oui, c’est vrai. Mais il y a des moments où j’oublie qu’Elle viendra me prendre avec Elle».

Jacinthe est transférée à Lisbonne pour une intervention chirurgicale d’autant plus douloureuse que la faiblesse de la malade ne permet pas une anesthésie totale. L’opération achevée, les pansements font atrocement souffrir l’enfant. La Très Sainte Vierge vient la visiter et lui enlève toutes ses douleurs.

Jacinthe fait part à Sœur Marie-Purification des paroles reçues de Notre-Dame: «Les péchés qui jettent le plus d’âmes en Enfer sont les péchés d’impureté. Il viendra certaines modes qui offenseront beaucoup Notre-Seigneur. Les personnes qui servent Dieu ne doivent pas suivre ces modes».

Quelques jours après l’opération, des complications surviennent. Le 20 février 1920, au soir, Jacinthe se confesse; le prêtre croit pouvoir attendre le lendemain pour lui apporter la Sainte Eucharistie. Pourtant, le soir même, vers dix heures trente, elle expire doucement. (C’est le 20 février qu’on célèbre la fête liturgique des deux nouveaux saints.)

Encore quelque temps...

Le pape François à Fatima
Le pape François priant devant la tombe de Jacinthe et François, dans la basilique de Fatima. Depuis février 2005, la troisième voyante, Sœur Lucie Dos Santos, est enterrée à côté des deux autres pastoureaux.

Le 13 juin 1917, Lucie avait demandé à la Sainte Vierge de les emmener tous trois au Paradis. «Oui, répondit Marie. Pour Jacinthe et pour François, je les prendrai bientôt. Mais toi tu resteras ici-bas encore quelque temps. Jésus veut se servir de toi pour me faire connaître et aimer. Il veut établir dans le monde la dévotion à mon Cœur Immaculé... Je ne t’abandonnerai jamais. Mon Cœur Immaculé sera ton refuge et la voie qui te conduira à Dieu». En prononçant ces paroles, raconte Lucie, «la Sainte Vierge écarta les mains et, pour la seconde fois nous communiqua le reflet de la lumière intense qui l’enveloppait, dans laquelle nous nous vîmes comme plongés en Dieu. Jacinthe et François paraissaient être dans une partie qui s’élevait vers le Ciel et moi dans celle qui se répandait sur la terre. Au-dessus de la paume de la main gauche de Notre-Dame, il y avait un Cœur entouré d’épines qui s’y enfonçaient. Nous comprîmes que c’était le Cœur Immaculé de Marie, outragé par les péchés de l’humanité, qui demandait réparation».

Durant sa maladie, Jacinthe avait dit à Lucie: «Il ne s’en faut plus beaucoup pour que j’aille au Ciel. Toi, tu resteras ici pour dire que Dieu veut établir dans le monde la dévotion au Cœur Immaculé de Marie... Quand tu auras à le dire, ne te cache pas!... Dis à tout le monde que Dieu nous accorde ses grâces par le moyen du Cœur Immaculé de Marie; qu’il faut les lui demander à Elle; que le Cœur de Jésus veut qu’on vénère, à côté de lui, le Cœur Immaculé de Marie. Que l’on demande la paix au Cœur Immaculé de Marie, parce que Dieu la lui a confiée à Elle! Ah! si je pouvais mettre dans le cœur de tout le monde le feu que j’ai là dans la poitrine, qui me brûle, et me fait tant aimer le Cœur de Jésus et le Cœur de Marie!»

Le souci d’une Mère

Jacinta Marto et Lucia Dos SantosComme une bonne Mère qui se soucie de nous, Marie donne des avertissements en vue de notre salut éternel et de notre conversion. Le 13 octobre 1917, elle dit aux petits voyants: «Il faut que les hommes se corrigent, qu’ils demandent pardon de leurs péchés; qu’ils n’offensent plus Dieu Notre-Seigneur, qui est déjà trop offensé». Dès lors, les enfants ne pouvaient retenir leurs larmes en se rappelant la tristesse du visage de l’Apparition. Lucie commentera ainsi ces paroles de Notre-Dame: «Quelle amoureuse plainte elles contiennent et quelle supplication! Oh! que je voudrais qu’elles résonnent dans le monde entier et que tous les enfants de la Mère céleste écoutent sa voix!»

Se convertir, changer de vie, signifie revenir vers Dieu en Lui témoignant notre regret de L’avoir offensé. Particulièrement frappé par la tristesse de Notre-Dame lorsqu’elle demande que l’on n’offense plus son Fils, François désirait consoler Celui-ci, en commençant par s’abstenir de tout péché. «J’aime tant Notre-Seigneur! Mais Il est si triste à cause de tous les péchés. Non! nous ne ferons plus aucun péché». Aussi, les trois enfants sont-ils prêts à affronter les persécutions et la mort plutôt que de mentir pour se libérer des contradictions. Mais le changement de vie comprend, en plus de la confession sacramentelle pour recevoir le pardon des péchés, la mortification du cœur et des sens pour réparer les péchés passés et s’unir au Christ dans sa Passion.

Fait très remarquable: les apparitions allumèrent dans les cœurs des trois voyants un zèle ardent de prendre part aux souffrances du Christ. Par exemple, ils décident de donner leur goûter quotidien à des enfants pauvres et de se contenter de ce qu’ils pourraient trouver dans la nature. Un jour, la mère de l’un des enfants les appelle pour leur faire manger des figues d’une variété succulente. Jacinthe s’assoit à côté du panier et déjà se délecte à la pensée de manger de si beaux fruits. Elle en prend un. Puis, subitement, elle se ravise: «Nous n’avons encore fait aucun sacrifice pour les pécheurs. Faisons celui-ci». Et elle replace la figue dans le panier.

La pénitence que Dieu attend

Quels sont les sacrifices qui plaisent davantage à Dieu? Quelques mois avant la première apparition de Notre-Dame, les enfants eurent la visite d’un Ange. Celui-ci leur dit: «Surtout, acceptez et supportez les souffrances que le Seigneur vous enverra». Bien des années plus tard, le 20 avril 1943, Sœur Lucie écrira à l’évêque de Leiria: «Le Bon Dieu désire grandement le retour de la paix, mais Il est peiné de voir un si petit nombre d’âmes en état de grâce et disposées à pratiquer les renoncements qu’Il leur demande pour adhérer à sa Loi. Et c’est précisément la pénitence que le Bon Dieu exige maintenant, c’est le sacrifice que chacun doit s’imposer afin de vivre une vie juste en conformité avec sa Loi. Il veut pour mortification l’accomplissement simple et honnête des tâches quotidiennes et l’acceptation des peines et des soucis; et Il désire que l’on fasse connaître clairement cette voie aux âmes, car beaucoup, prenant le mot de pénitence dans le sens de «grandes austérités», et ne s’en sentant ni les forces ni la générosité, se découragent et tombent dans une vie d’indifférence et de péché». Notre-Seigneur dira encore à Lucie: «Le sacrifice exigé de chacun est l’accomplissement de son propre devoir et l’observation de ma Loi; c’est la pénitence que maintenant je demande et j’exige».

La recommandation du Rosaire est, elle aussi, au cœur des apparitions de Fatima. La Sainte Vierge en parle à plusieurs reprises. En 1917, le monde connaît encore les horreurs de la première guerre mondiale, sans que personne n’en voie l’issue. Lors de la troisième apparition, le 13 juillet, Notre-Dame insiste: «Il faut réciter tous les jours le chapelet en l’honneur de la Sainte Vierge pour obtenir la fin de la guerre par son intercession, parce qu’il n’y a qu’Elle qui puisse nous venir en aide». Et le 13 octobre, elle se nomme elle-même, «Notre-Dame du Rosaire». Lors de cette prière traditionnelle, elle demande d’ajouter, à la fin de chaque dizaine, l’invocation: «Ô mon Jésus, pardonnez-nous nos péchés; préservez-nous du feu de l’Enfer, et conduisez au Ciel toutes les âmes, surtout celles qui ont le plus besoin de votre miséricorde».

«Aie pitié du Cœur de ta Mère!»

Le Coeur Immaculé de MarieLe message de Fatima comporte également la dévotion au Cœur Immaculé de Marie. Le 13 juin 1917, la Vierge montre aux enfants son Cœur blessé au milieu des épines, et dit à Lucie: «Il faut que tu restes sur la terre. Jésus veut se servir de toi pour Me faire connaître et aimer; Il veut répandre dans le monde la dévotion à mon Cœur Immaculé. Je promets le salut à ceux qui embrasseront cette dévotion. Leurs âmes seront aimées de Dieu d’un amour de prédilection, comme des fleurs placées par Moi devant son Trône». Lors d’une apparition postérieure, au couvent de Pontevedra (Espagne), le 10 décembre 1925, Notre-Dame a montré son Cœur à Sœur Lucie, tandis qu’auprès d’elle se tenait l’Enfant-Jésus. Celui-ci dit à Lucie: «Aie pitié du Cœur de ta sainte Mère, qui est couvert d’épines, que les hommes ingrats lui enfoncent à tout instant sans qu’il y en ait qui fassent acte de réparation pour les arracher».

Et Marie d’ajouter: «Regarde, ma fille, mon Cœur entouré d’épines que les hommes ingrats y enfoncent à tout instant par leurs blasphèmes et leurs ingratitudes. Toi, du moins, aie soin de me consoler, et dis de ma part à tous ceux qui, le premier samedi de cinq mois consécutifs, après s’être confessés, recevront la sainte Communion, diront un chapelet et me tiendront compagnie pendant un quart d’heure en méditant les mystères du Rosaire afin de me faire amende honorable, que je promets de les assister à l’heure de la mort, avec toutes les grâces nécessaires pour le salut de leurs âmes».

On peut se demander quels sont ces outrages qui font tant de peine au Cœur de Notre-Dame. Généralement, ce sont tous les péchés qui offensent Dieu. Parmi eux, certains offensent spécialement le Cœur de notre Mère du Ciel: d’abord les blasphèmes contre ses trois grands privilèges, sa Conception Immaculée, sa Virginité perpétuelle, sa Maternité divine; puis, les outrages contre les images qui la représentent, enfin le crime de ceux qui enseignent aux enfants le mépris, la moquerie, et jusqu’à la haine de leur Mère du Ciel. Sans doute faut-il aussi compter comme offensant particulièrement son Cœur Immaculé les manquements à la vertu de pureté.

Puissions-nous contribuer à l’établissement dans le monde de la dévotion au Cœur Immaculé de Marie pour amener un grand nombre d’âmes à la conversion et à un ardent amour pour Jésus et Marie.

Dom Antoine Marie o.s.b.


 

Reproduit avec la permission de l’Abbaye Saint Joseph de Clairval, en France, qui publie chaque mois une lettre spirituelle sur la vie d’un saint. Adresse postale: Abbaye Saint Joseph de Clairval, 21150 Flavigny sur Ozerain, France. Site internet: www.clairval.com.

Fatima 2017

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