Pour être, bon, l'argent doit être basé sur l'or. Si l'or ne sort pas de la terre, quand bien même toutes sortes de bonnes choses en sortent en quantité et en qualité, vous devez laisser la nourriture moisir, tout tomber en ruines et les humains aller au diable. Les novateurs qui prétendent qu'on peut manger, s'habiller, se loger, sans avoir d'or dans les caves du gouvernement, sont d'odieux charlatans. Ne les écoutez pas.
Travaillez, mais privez-vous. Produisez le plus possible, mais achetez le moins possible. Mettez vos salaires en conserves. L'accumulation des produits ralentira la production. Vous chômerez, vos voisins chômeront. Vous serez content de retrouver votre salaire mis en conserve, pour traverser la crise de chômage et payer des secours directs à vos voisins.
Lorsque le chômage couvre le pays, lorsque les années se succèdent sans solution à la crise, priez la Providence de faire pousser un dictateur turbulent, avec ou sans moustaches, la prospérité reviendra avec le régime des bombes. Les torpilles régleront le problème de la surproduction ; l'enrôlement militaire et la fabrication de tanks et d'obus régleront le problème du chômage.
* * *
Si le Ciel vous donne une surabondance de récoltes, payez les fermiers pour qu'ils cessent de produire ; puis dites aux contribuables de se serrer la ceinture, parce qu'il y a trop de blé et qu'il faut débourser pour en avoir moins.
Votre pays déborde-t-il de richesses, consultez des économistes pour vous tirer d'embarras. S'ils sont bien élevés, ils vous diront:
Otez l'argent des maisons, par des taxes, 1° pour un Office de Tourisme qui va inviter les étrangers à venir prendre la première part, 2° pour des octrois aux exportateurs afin qu'ils puissent expédier ces produits à l'étranger à un prix réduit.
De cette façon, vous maintiendrez un niveau élevé des prix pour les consommateurs domestiques. Si les Canadiennes se plaignent, faites-leur un sermon, puis que le diable les emporte !
Ayez de bonnes écoles. Formez des techniciens qui vont inventer des machines et faire augmenter les produits en diminuant le travail des hommes. Puis, décrétez que les hommes qui ne travaillent plus à cause des machines ne doivent pas manger.
En temps de guerre, liguez-vous avec vos voisins pour détruire le plus possible. En temps de paix, luttez contre vos voisins pour avoir le privilège de reconstruire ce qui a été détruit.
Si vous voulez demeurer sages et continuer de marcher sur la tête et sur les mains, lisez L'Écho du Saint-Maurice, La Tribune et d'autres feuilles de cette venue ; méditez les discours des banquiers reproduits pieusement dans les grands journaux de Québec et de Montréal. Mais fermez l'oreille aux propos insensés des créditistes, bannissez impitoyablement leur littérature révolutionnaire ; sinon, vous marcherez bientôt sur les pieds, comme ce fou qui lit régulièrement le journal VERS DEMAIN.