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Le milliard annuel

Louis Even le samedi, 01 mai 1943. Dans Éditorial

Donc, l'habitude en est prise. En vertu du précédent généreux de 1942, le Canada s'engage à sortir désormais de ses flancs un ca­deau d'un milliard par année.

Le premier milliard fut offert à l'Angleterre. À tout seigneur, tout honneur.

Certaines langues, plus canadiennes qu'impérialistes, ayant trouvé à redire, la formule a pris une variante cette année : c'est le cadeau aux Nations-Unies. Toutefois, comme les mêmes artères conduisent vers le même cœur, le gros du milliard ne s'éparpille pas trop, et la tape complimentaire sur l'épaule de Billy peut tou­jours venir de Winston.

Lorsque des orbites s'élargissaient trop devant l'idée d'une an­nuité d'un milliard ; notre ministre des finances eut soin de donner une explication. Ce ne sont point des piastres canadiennes qui s'en vont en Angleterre ou ailleurs. Non, non : que feraient ces vulgaires rectangles de papier en pays étranger ? Ce qui s'en va, c'est le droit aux produits du Canada. Et une fois le droit parti, les produits sui­vent aussi vite que les torpilles allemandes veulent bien les res­pecter.

Le Canada s'en porte-t-il plus mal ? demanderont des observa­teurs ?

Est-ce que le champ qui a fourni cent poches de patates, dont on ne savait que faire avant l'invention du milliard, ne peut pas renouveler son rendement cette année ? Et les minots de blé, qu'on entassait avec désespoir dans des élévateurs avant la trouvaille du cadeau, et que des cultivateurs changent maintenant joyeusement en chair de cochon pour les amis d'outre-mer, ces minots de blé-là, que la terre donne fidèlement chaque année, ne peuvent-ils conti­nuer chaque année leur même service dans les mêmes laboratoi­res ?

Assurément. Et nous sommes de l'avis de ceux qui disent que la consommation active la production. Nous sommes même d'avis qu'il vaut mieux donner que d'entasser inutilement.

Mais, comme nous croyons que les Canadiens et les Canadien­nes auraient autant de plaisir que les Anglais ou les Russes à rece­voir en cadeau les surplus du Canada, nous espérons bien qu'une fois la grande folie des supercivilisés terminée, on continuera tout bonnement le cadeau du milliard de produits canadiens en le fai­sant simplement aux familles du Canada.

C'est le gouvernement libéral d'Ottawa qui a inauguré le divi­dende national. Un milliard par an, donné gratuitement, c'est en effet un dividende national, actuellement fait à des étrangers, qui n'appauvrira pas plus le pays lorsqu'il sera fait à des nationaux.

Un milliard par an distribué par le Canada aux Canadiens, ce serait $84.00 par année à chaque homme, femme et enfant du Ca­nada. Ce serait $7.00 par mois à chaque personne dans chaque fa­mille du pays.

Le dividende est-il possible, ou est-il impossible ? S'il est possi­ble quand on le fait à des étrangers, pourquoi ne serait-il plus pos­sible lorsqu'il s'agit de le faire à des nationaux ? S'il ne tarit pas la production canadienne aujourd'hui, comment la tarirait-il lorsque bras et machines seront redevenus disponibles pour une plus grosse production ? S'il ne fait aucun tort physique ou moral ! à John Bull qui le reçoit, comment ferait-il un tort physique ou moral lorsqu'il irait à Baptiste ?

Louis Even

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