Nos chefs religieux nous invitent à la pénitence et à la prière, si nous voulons fléchir le Ciel et espérer une paix chrétienne.
Il paraît qu'ils se trompent. Le moyen de gagner la guerre, c'est de boire de la bière et encore plus de bière.
C'est du moins ce que l'Institut des Brasseries du Canada nous fait comprendre. Un communiqué à la presse, daté du 24 février et signé Henri-Paul Lemay, débute ainsi :
"Suivant une dépêche récemment reçue de Londres, le gouvernement britannique a fait appel aux brasseurs pour leur demander d'accroître leur production de bière, de telle façon qu'elle atteindra un niveau qui ne s'est jamais vu dans l'histoire du monde. Le gouvernement britannique a de plus décrété que le nombre des cantines où l'on sert de la bière sera augmenté dans toutes les usines de guerre.
"Une pareille décision de l'Angleterre, à une heure aussi tragique de son histoire, ne peut être fondée que sur une raison sérieuse. Cette raison, elle est toute trouvée.
"Engagée dans une lutte décisive, pour sa survivance contre les plus terribles ennemis qu'elle ait jamais eu à combattre, la Grande-Bretagne a vite compris qu'il importait à tout prix de conserver chez son peuple un bon moral."
Le communiqué continue pour en venir à conclure que nous devons faire comme la Grande-Bretagne, et que chercher à diminuer la consommation de bière c'est entraver la réalisation de l'idéal de guerre.
Vous suivez le raisonnement. Il faut conserver un bon moral aux soldats et aux ouvriers des usines de guerre. Pour cela, multiplier les cantines et offrir de la bière en abondance. On gagnera la plus grande guerre de tous les temps en produisant de la bière "à un niveau qui ne s'est jamais vu dans l'histoire du monde".
Les évêques devront sans doute reviser leurs mandements de carême !
Allez au fond de tout cela : vous trouverez, non pas une guerre à gagner, mais de l'argent à faire venir dans les coffres des brasseurs.