Dans notre dernier numéro, nous relevions la Leçon XVI du cours d'économie politique servi aux lecteurs de La Terre de Chez Nous par M. Gérard Filion, secrétaire de l'U.C.C.
Nous avons, depuis, reçu copie de la lettre suivante, adressée à M. Filion, par un modeste cultivateur de Saint-Pascal de Kamouraska. Nous la publions, laissant à nos lecteurs le soin de tirer leurs conclusions :
Saint-Pascal ; 6 janvier 1942.
M. Gérard Filion,
Secrétaire-Général de l'U.C.C.
615 Avenue Viger,
Montréal.
Monsieur,
En suivant votre cours sur l'économie politique et sociale, dont je faisais un sujet d'étude dans notre équipe, j'ai remarqué, dans votre numéro du 31 décembre, que l'article 3, Substitut de la Monnaie, disait, en substance, en parlant du Crédit Bancaire :
Lorsqu'un individu emprunte $1,000 et que la banque lui ouvre un compte dans ses livres, la banque ne crée pas pour cela de la monnaie. Ceux qui disent que la banque crée de la monnaie et ceux qui y croient sont dans l'erreur.
Je dois vous dire que ceux qui prétendent cela sont moins dans l'erreur que celui qui donne ces cours. Pour preuve, je vous fais parvenir un rapport dont les deux auteurs cités sont connus : le Dr W. C. Clark, sous-ministre des Finances à Ottawa, et M. Graham Towers, gouverneur de la Banque du Canada.
Si vous êtes plus savant que ces deux messieurs-là, vous voudrez bien nous dire tout simplement où commence l'argent, quand commence l'argent, comment commence l'argent, quelle volonté ou quel jugement préside à la naissance de l'argent, puis par quelle porte ou quelle fenêtre l'argent entre en circulation.
Après étude de ce rapport, vous aurez sans doute assez de largeur d'esprit, assez d'esprit de justice et de charité, pour corriger consciencieusement votre erreur.
Dans l'économique, il y a bien des rouages, et je vois que vous ne les connaissez pas tous, surtout ce qui a rapport à la monnaie. À vous de l'étudier avant de l'enseigner à la classe agricole.
Ce n'est pas surprenant que vous ne soyez pas favorable à la résolution d'étudier la monnaie dans les équipes d'étude de l'U. C. C., résolution qui fut présentée et rejetée sans lecture au Congrès régional tenu à Saint-Pascal en septembre 1941.
Lors des études des autres résolutions adoptées le même jour — résolutions demandant toujours l'aide des gouvernements par octrois et autrement — à entendre tout cela, je me croyais rendu dans un pays à base de socialisme.
Sur la question de l'étude de la monnaie, vous avez dit que l'argent pour les cultivateurs, c'est secondaire. Cela, après nous avoir dit toute la journée que, pour être défendu, il fallait payer et appartenir à notre association.
La monnaie est secondaire dans la pensée et dans la décision, mais pas dans l'exécution. Je décide de faire partie de mon association, l'U. C. C. : je dois payer ma contribution, donc accompagner mon nom d'une somme d'argent. Puis, l'agriculture est aujourd'hui un commerce et une industrie ; ne faut-il pas de l'argent pour la faire marcher ? Vous voyez que l'argent n'est pas tant que ça secondaire.
Si vous voulez enseigner tous les points de l'économique à la classe agricole et ne pas l'induire en erreur, il vous faudra étudier le système monétaire. Vous y arriverez par l'étude du Crédit Social.
Vous demeurez à Montréal. Eh bien, allez au numéro 4885, Apt. 1, rue Chabot, et prenez un abonnement au petit journal VERS DEMAIN, journal qui fait la lumière : il n'en coûte qu'un dollar par année.
Je demeure toujours en faveur des bonnes causes et du bien-être de la société.
Votre dévoué,
Nap. MIGNAULT,
U. C. C., — C. S.