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Gingues gigote et gingue

le dimanche, 01 décembre 1940. Dans La politique

Qui est Gingues? Pourquoi gigote-t-il? Pourquoi gingue-t-il?

M. Maurice Gingues est le dernier des députés libéraux du comté de Sherbrooke au fédéral.

Il gingue, parce que les jeunes — et les moins jeunes — de Sherbrooke, au lieu de fréquenter des clubs libéraux, restent au foyer et passent leurs soirées à lire le journal Vers Demain.

C’est La Tribune, le journal rouge de Sherbrooke, qui nous le rapporte dans son numéro du 5 novembre dernier. C’était à une réunion de l’Association de la Jeunesse Libérale de Sherbrooke, la veille du départ de M. Gingues pour Ottawa, où il doit prêter son concours à la manufacture de nouvelles lois pour lier, endetter et appauvrir les Canadiens:

“Rappelant qu’il fut l’un de ceux qui jetèrent les bases de l’Association de la Jeunesse Libérale, il y a plus de cinq ans, M. Gingues dit que son rêve sera complètement réalisé quand la Jeunesse Libérale aura organisé chez elle des cercles d’études pour analyser les problèmes que les députés ont à envisager chaque jour.”

Fort bien, des cercles d’études. Mais pour étudier quoi? Quelle doctrine? De quoi est donc fait le crédo libéral ?

— Pour analyser les problèmes que les députés ont à envisager? Nous croyions que le député avait pour mission de transmettre au gouvernement l’objectif exprimé par ses électeurs. Mais nous sommes des idiots. Le problème quotidien du député, c’est de trouver le moyen de servir le parti, donc d’obéir aux dictats de la finance, sans trop soulever l’ire de ses électeurs. Rude problème, en effet, qui mérite bien $4,000 par année et qui réclame en plus l’appui combiné de tous les cerveaux rouges du comté.

La Tribune continue:

“M. Gingues dit qu’il circule en notre pays, en notre province, en notre ville, des théories et des projets de réformes qui ne peuvent aboutir qu’à saboter notre vie nationale.”

Notre vie nationale, qui consiste à laisser chômer quelques centaines de mille bras tout en prêchant l’étude d’un métier; qui consiste à faire la cour aux touristes et à conduire à coup de fouet les pauvres diables de chez nous; qui consiste à travailler pour tous les pays du monde avant de permettre à la famille canadienne d’avoir sa part ; qui consiste à clouer les administrations au pilori et imposer des taxes de vente pour rencontrer les exigences du système rothschildien. Saboter cela! Pensez donc! Et dire que, même dans notre bonne ville de Sherbrooke, on trouve des esprits croches, depuis le chanoine Bourassa jusqu’aux petits salariés de la Kayser, pour oser réclamer contre un ordre aussi merveilleux !

Toujours La Tribune:

“C’est pour cela que M. Maurice Gingues recommande à la jeunesse de ne pas se bercer au coin du feu, durant les longues soirées d’hiver, tout en lisant des journaux comme Vers Demain, mais d’étudier les faits et les réalités de la vie, afin de démontrer aux autres pays que la jeunesse du Canada n’a pas besoin d’une chemise noire ou d’une chemise brune pour faire quelque chose.”

C’est justement cela, cher Maurice, que la jeunesse de Sherbrooke étudie dans son journal Vers Demain, les faits et les réalités de la vie, même de la vie nationale. Et elle a appris qu’elle n’a besoin d’aucune chemise de couleur, pas même d’une camisole rouge.

Comme quoi Gingues va continuer de gigoter et de ginguer, parce que, pendant qu’il exerce ses méninges dans la succursale canadienne de Westminster, chaque abonné de Vers Demain à Sherbrooke va recruter un nouveau lecteur sherbrookois à Vers Demain.

Henri DUBUC

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