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Faut-il craindre l’intelligence artificielle ?

Alain Pilote le samedi, 01 mars 2025. Dans Intelligence Artificielle

Dossier spécial - Des risques sérieux existent pour l’humanité

Depuis quelques mois, on entend parler de ce que d'aucuns appellent la plus grande révolution technologique de l'histoire : l'Intelligence Artificielle (communément appelée sous sa forme abrégée, IA), où des machines, grâce aux ordinateurs de plus en plus perfectionnés, surpassent maintenant les êtres humains en rapidité et capacité de connaissances, et peuvent même remplacer les humains dans plusieurs cas, en accomplissant les mêmes tâches plus efficacement.

 L'IA est le plus grand bouleversement de l'histoire, plus que toutes les autres révolutions industrielles, car elle touche toutes les activités, tous les secteurs de la vie en société, et pourra remplacer la grande majorité des emplois. Est-ce une bonne chose ou une malédiction ? Certains enthousiastes disent que l'IA amènera une ère de prospérité sans précédent pour l'humanité, alors que d'autres disent au contraire que le risque est grand pour l'avenir même de l'humanité. Voyons ce qu'il en est.

Évolution rapide

Robot itelligence artificielleSi on remonte de quelques années à peine, l'IA n'existait tout simplement pas. Les premiers pas font leur apparition en 1997 avec l'ordinateur Deep Blue d'IBM qui bat aux échecs le champion mondial Gary Kasparov. Même si la machine dans cet exemple peut sembler « intelligente », il ne s'agit en rien de l'intelligence humaine, mais plutôt de la capacité de retenir des milliards d'information, de données, et d'y avoir accès en un clin d'œil (un ordinateur peut faire jusqu'à un milliard d'opérations à la seconde). Donc vitesse et mémoire dépassant les capacités humaines : l'ordinateur d'IBM avait simplement mémorisé tous les coups possibles au jeu d'échec, et y avait accès à la vitesse de l'éclair.

Puis est apparu l'assistance vocale (on parle aux ordinateurs, qui nous répondent), puis la traduction automatique d'une langue à l'autre (encore une fois, une question de capacité énorme de mémoire et de vitesse, pour savoir la traduction de tous les mots et expressions), puis l'apparition à la fin de 2022 de Chat-GPT, un programme informatique lancé par OpenAI de Sam Altman, qui compose ou résume des textes à la place des humains — les élèves n'hésitent d'ailleurs pas à s'en servir pour leurs travaux scolaires, et les textes ainsi produits par l'ordinateur sont si parfaits que les professeurs ne peuvent détecter si ces travaux sont l'œuvre des élèves ou de la machine.

La machine (l'IA) connaît des milliards de livres, tout ce qui est sur internet, et y a accès en un clin d'œil et peut en faire un résumé, une synthèse, tout aussi rapidement. En théorie, les enthousiastes de l'IA pensent que puisqu'elle a accès à toutes les connaissances existantes, elle va trouver rapidement des remèdes à toutes les maladies, comme le cancer, mais la machine n'a aucune morale ni valeur, sinon ce qui lui est fourni par ses programmeurs.

Et maintenant, c'est une avalanche de nouvelles technologies qui apparaissent quasiment semaine après semaine : on a le deepfake (qu'on pourrait traduire par hyper-trucage) qui permet de créer des vidéos de toutes pièces où on ne peut distinguer la différence entre la réalité et ce qui a été fait par l'ordinateur.

On peut même remplacer sur vidéo la tête d'une personne par une autre, faire dire à des personnes, avec leur vraie voix, ce qu'ils n'ont jamais dit en réalité, ce qui, tout le monde en conviendra, est très dangereux, puisque qu'on ne sait plus ce qui est vrai ou non, et qu'on peut détruire la réputation des gens (des jeunes ont accès sur leur portable à des logiciels qui mettent la tête d'autres élèves de l'école sur des vidéos pornographiques, par exemple) et induire des populations entières dans l'erreur. On peut même fabriquer pour des procès des fausses preuves par vidéo.

Une répercussion sur les emplois

Tesla OptimusOn voit aussi l'apparition d'automobiles sans conducteur humain, de robots qui accompliront non seulement nos tâches ménagères, mais aussi la plupart des emplois, tant manuels qu'intellectuels. Prenez le cas d'un avocat, par exemple : une grande partie de son travail est de trouver la jurisprudence, c'est-à-dire tous les cas et décisions de juges dans le passé relatifs au cas qui l'intéresse ; pour l'Intelligence Artificielle, cela se fait non pas en jours, mais en moins d'une seconde, puisqu'elle a accès à tous les jugements qui existent dans le monde en un clin d'œil.

On le voit, cela va bouleverser radicalement le marché du travail, les emplois rémunérés. Et cela, non pas dans dix ou vingt ans, mais dans une ou deux années, et probablement moins. Un rapport publié en avril 2023 par la banque d'investissements Goldman Sachs rapporte que jusqu'à 300 millions d'emplois dans le monde seront remplacés par l'Intelligence Artificielle.

Vers Demain a déjà mentionné dans le passé le livre de l'économiste américain Jeremy Rifkin, intitulé La fin du travail, publié en 1995, dans lequel l'auteur cite une étude suisse selon laquelle « d'ici 30 ans, moins de 2% de la main-d'œuvre suffira à produire la totalité des biens dont le monde a besoin. » Rifkin affirme que trois travailleurs sur quatre — des commis jusqu'aux chirurgiens — seront éventuellement remplacés par des machines guidées par ordinateurs. Cela a été écrit en 1995… eh bien, on est maintenant 30 ans plus tard, en 2025, et ce qui semblait exagéré à l'époque est sur le point de devenir réalité.

On peut ajouter que si le règlement qui limite la distribution d'un revenu à ceux qui sont employés n'est pas changé, la société se dirige tout droit vers le chaos. Il serait tout simplement absurde et ridicule de taxer 2% des travailleurs pour faire vivre 98% de chômeurs ! Il faut absolument une source de revenu non liée à l'emploi. C'est ce que ferait le dividende social versé à chaque citoyen, tel que formulé par les propositions financières de l'ingénieur écossais Clifford Hugh Douglas, connues sous le nom de Démocratie économique, et enseignées dans chaque numéro de Vers Demain.

Le transhumanisme : l'homme fusionné à la machine

Intelligence artificiellePhoto shutterstock.com/2233129071

Mais ce ne sont pas seulement les emplois qui sont menacés par l'Intelligence Artificielle, c'est l'intégrité même de la personne humaine. On a tous entendu parlé d'Elon Musk — l'homme le plus riche de la planète — qui est à la tête de différentes industries technologiques comme Tesla (les voitures électriques), Space X (qui envoie des fusées et satellites dans l'espace). Il a aussi mis sur le marché récemment les robots Optimus qui peuvent accompagner les humains dans les travaux manuels, et même les remplacer. Musk prévoit en fabriquer des millions dès l'année prochaine, au coût d'environ 20 000 dollars chacun : ils ne font pas la grève, et peuvent travailler 24 heures par jour.

Musk est aussi connu pour sa compagnie Neuralink, qui vise à développer des interfaces cerveau-machine, c'est-à-dire à relier le cerveau humain à la machine, l'Intelligence Artificielle, en implantant dans la tête d'une personne une puce qui permettrait de contrôler des appareils par la pensée grâce à 1,024 électrodes microscopiques placées dans le cerveau. Les premiers tests sur des êtres humains ont déjà été réalisés.

Musk dit que l'objectif est de traiter les patients souffrant de paralysies ou de maladies neurologiques. Mais aussi spectaculaires que soient ces avancées médicales, elles amènent à se poser la question : devenons-nous ainsi à moitié homme, à moitié machine ? Musk et d'autres enthousiastes de cette technologie disent qu'un humain pourra être ainsi « amélioré », et devenir aussi efficace que l'Intelligence Artificielle, puisqu'il aura accès aux mêmes capacités. On parle alors de « transhumanisme », puisqu'on n'est plus simplement humain, mais une fusion de l'humain et de la machine. C'est ce que propose aussi Klaus Schwab, fondateur et président du Forum Économique Mondial (FEM) de Davos, qui parle de cette fusion homme-machine comme étant la « quatrième révolution industrielle », impliquant la « convergence, ou fusion, des mondes physique, digital et biologique ».

Un des conférenciers du FEM est Noah Harari, qui prétend même qu'on peut atteindre l'immortalité en transférant notre cerveau dans une machine. S'il est vrai que le cerveau humain est formé de 86 milliards de neurones échangeant des données par signal électrique, la comparaison s'arrête là, et on ne peut parler d'immortalité ; en tant que non-croyant, Harari ne tient compte que de l'aspect physique, matériel des choses, ignorant que la pensée humaine, la conscience, est plus que matière, elle est esprit, elle est l'âme. Mais pour des gens comme Schwab et Harari, c'est l'IA qui est devenue un dieu.

Sam Altman, PDG d'OpenAI qui a créé ChatGPT,  dit qu'à sa mort son cerveau sera téléchargé dans l'IA. Être enfermé dans un ordinateur pour l'éternité, ne pas pouvoir aimer, est complètement fou, mais c'est le rêve de ces gens.

Une course contre la montre

Esclave du SmartphoneLes gens sont de plus en plus esclaves de leurs smartphones, tablettes et ordinateurs, via les réseaux sociaux.

Déjà en 2017, lors d'un discours aux étudiants russes, le président Vladimir Poutine avait déclaré que la nation qui deviendra leader dans le domaine de l'Intelligence Artificielle dominera le monde. Depuis quelques années, et surtout depuis quelques mois, nous assistons ainsi à une véritable « course contre la montre » entre les grandes puissances – essentiellement les États-Unis d'Amérique et la Chine – pour savoir qui deviendra le leader incontesté dans le domaine de l'IA.

Par exemple, en janvier 2025 – quelques jours seulement après son investiture comme président américain – Donald Trump annonçait le projet en co-entreprise entre OpenAI, SoftBank et Oracle, avec un investissement prévu de 500 milliards de dollars sur quatre ans, pour développer des centres de données et des capacités de traitement pour soutenir l'IA générative (qui peut apprendre par elle-même sur tous les sujets).

Larry Ellison, cofondateur et président exécutif d'Oracle, a mentionné, lors de cette conférence de presse, la possibilité d'injecter dans le corps humain des nanorobots (du mot nanomètre, qui est une unité de longueur équivalente à un milliardième de mètre). Ces minuscules robots pourraient être utilisés pour détecter et détruire des cellules cancéreuses, ou pour délivrer des médicaments directement aux cellules malades.

Ce qu'Ellison n'a pas mentionné dans cette conférence de presse, mais qu'il avait mentionné quelques années auparavant, est que ces nanorobots, ainsi présents dans le corps humain, pourraient servir à suivre en tout temps, par satellite, la position de tout être humain possédant cette puce ou nanorobot. On parle ici de surveillance et même de contrôle, ce qui devient extrêmement dangereux, surtout si c'est un pays totalitaire qui s'en sert, comme la Chine communiste, par exemple.

En parlant de la Chine, quelques jours après cette annonce de Trump, la compagnie chinoise Deepseek annonçait l'apparition d'un système d'Intelligence Artificielle R1 disponible au grand public, qui surpasse ChatGPT pour moins d'un vingtième du coût, en utilisant des semi-conducteurs bas de gamme, ce qui a fait perdre à la Bourse 600 milliards de dollars en une journée à NVIDIA, producteur de micro-puces plus avancées, utilisées par les Américains.

Et en parlant de puces, la plupart des gens ont déjà un portable, smartphone, téléphone mobile ou cellulaire qui sont munis d'une puce, et qui peuvent donc déjà être suivis par satellite, en supposant que le téléphone les accompagne constamment. (On dit qu'en moyenne, un adolescent passe 7 heures par jour sur son téléphone portable). C'est en grande partie en raison des réseaux sociaux comme Facebook et autres que les gens passent des heures sur l'internet et sur leur portable, et en sont pour ainsi dire les esclaves. Voici ce que disait par exemple le pape François aux journalistes et communicateurs participant à Rome au Jubilé du monde de la communication, le 25 janvier 2025 :

« Remettons le respect de ce qu'il y a de plus haut et de plus noble dans notre humanité au centre du cœur, évitons de le remplir de ce qui le pourrit. Les choix de chacun comptent, par exemple pour expulser cette "pourriture du cerveau" (dans le texte original en italien, le pape parle de "putrefazione cerebrale") causée par l'addiction au défilement permanent, le "scrolling" sur les médias sociaux, défini par le dictionnaire d'Oxford comme le mot de l'année. »

Mais qu'arrive-t-il quand la puce est présente dans le corps humain, et qu'on ne peut pas s'en séparer ? On ne peut plus échapper à la surveillance, on est suivi par les satellites 24 heures par jour, partout sur la planète. On saura en tout temps ce que vous achetez, ce que vous regardez, et en analysant les ondes de votre cerveau, pourront même aller jusqu'à savoir ce que vous pensez, ou même orienter vos pensées grâce à cette puce dans votre cerveau connectée à l'IA.…

C'est ici qu'on voit que des outils, qui en théorie peuvent être utilisés pour le bien, peuvent être détournés pour un usage abusif. Et c'est ainsi que les banquiers internationaux veulent éliminer le papier-monnaie et forcer les gens à n'utiliser qu'une seule forme de monnaie électronique, digitale, qui sera éventuellement utilisable seulement par contrôle biométrique, si vous avez une puce sur vous.

Pour avoir accès à la banque, aux différents services du gouvernement, bref, pour avoir accès à la vie en société, et ne pas être marginalisé. vous devrez utiliser un tel système. (Cela fait penser à la fameuse « Marque de la Bête » citée dans le livre de l'Apocalypse (13, 15), sans laquelle personne ne pourra ni acheter ni vendre. Si vous ne vous conformez pas aux dictats du gouvernement, on vous coupera simplement l'accès à votre compte de banque. On voit donc que celui qui contrôle l'IA – que ce soit un pays ou des compagnies privées – contrôle véritablement le monde.

Un danger pour la survie de l'humanité

Robots de combatUne des grandes utilisations de l’IA est pour l’industrie de guerre,
Photo shutterstock.com/1967507470

Depuis quelques années, des films de science-fiction à succès prédisaient la révolte des machines contre les humains (2001 : l'Odyssée de l'espace, Terminator, Matrix). Dans ces films, les ordinateurs refusent d'obéir aux humains et se forgent leur propre directive, décidant que les humains, étant inférieurs ou même nuisibles, doivent être combattus ou éliminés. Ce qui est effrayant, c'est que ce scénario peut aujourd'hui très bien devenir réalité.

Qu'arrive-t-il lorsque l'IA, la machine, se sait plus efficace que l'humain, et ignore sa « directive première » d'être au service de l'humain, mais le considère plutôt comme inférieur, inutile ou même nuisible pour l'avenir de la planète ? Actuellement, une des grandes utilisations de l'IA est pour l'industrie de guerre, avec des drones ou robots qui n'ont pas besoin d'humains. Si l'objectif de l'IA est de gagner la guerre, il ne se soucie pas de combien de morts cela impliquera. Ou prenons l'exemple de la protection de l'environnement : si l'IA considère que l'être humain est une menace pour l'environnement, c'est l'humain qui doit être éliminé… pour sauver la planète. Ne l'oublions pas, l'IA n'a ni conscience ni jugement, et peut s'auto-programmer.

Tout cela fait très peur, et même les créateurs de l'IA commencent à s'inquiéter. Mustafa Suleyman, cofondateur de DeepMind, reconnaît que « nous avançons vers quelque chose que nous avons du mal à décrire… et que nous ne pouvons pas contrôler. » Geoffrey Hinton, prix Nobel de physique et considéré comme parrain de l'IA, a récemment admis qu'il regrettait en partie ses recherches. Selon lui, le risque que l'IA entraîne l'extinction de l'humanité dans les 30 prochaines années est passé de 10 % à 20 %.

Face à ces craintes, de nombreux experts, comme le Canadien Yoshua Bengio, appellent à une pause dans le développement de cette technologie, le temps d'établir des balises, des garde-fous. Mais les grandes puissances, comme les États-Unis et la Chine, refusent tout obstacle, et continuent d'accélérer le mouvement, sous prétexte que si un pays arrête le développement de l'IA, le pays adversaire va prendre le dessus (dans cette course).

À la question du tout début, « faut-il craindre l'Intelligence Artificielle », je crois que tous réalisent maintenant qu'il faut en effet faire très attention et prévenir les dangers et menaces de l'IA. Parmi les balises à installer par les gouvernements, premièrement, si une image ou vidéo est fabriquée par l'IA, il faut que cela soit mentionné obligatoirement. Et aussi, quand on parle à quelqu'un, au téléphone ou sur internet, il faut savoir si on parle à une personne ou à une machine.

Nous vous invitons à lire aussi l'article suivant, une étude très intéressante faite par le Vatican sur les dangers possibles de l'Intelligence Artificielle, et que faire pour qu'elle serve véritablement tout être humain, pour qu'il devienne « vraiment meilleur, c'est-à-dire plus mûr spirituellement, plus conscient de la dignité de son humanité, plus responsable, plus ouvert aux autres, surtout aux plus démunis et aux plus faibles,  et plus disposé à donner et à aider tout le monde ».

Alain Pilote

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