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En lisant les journaux - No. 18

Louis Even le mardi, 01 octobre 1940. Dans En lisant les journaux

Qui veut l'étalon d'or ?

De la Presse Associée du 16 août, reproduit dans tous les journaux et à la radio :

Parlant devant le 63e congrès annuel de l'American Bar Association, M. F.-Cyril James, principal de l'Université McGill, déclare : "Si les démocraties remportent la victoire au cours de la présente guerre, une base monétaire internationale devra être établie d'après l'étalon-or, car personne n'osera plus faire confiance au seul papier-monnaie. Mais si l'Allemagne gagne, l'or n'aura plus qu'une valeur décorative."

Le principal du McGill veut-il nous faire souhaiter le triomphe de l'Allemagne ? Qui donc veut l'étalon-rareté aujourd'hui, sauf les financiers internationaux, les Juifs et leurs valets ou courtisans ?

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Les onguents de Colette

Dans La Presse du 24 août, une correspondante féminine expose ses misères à l'ineffable Colette. Celle qui signe Découragée se plaint de ne disposer que de $35.95 par mois pour nourrir quatre personnes, les habiller, les soigner et entretenir la maison. Une mère et une sœur malades sont incapables de payer un médecin ou des remèdes. La plaignante a subi une opération et ne s'est pas bien remise, faute de pouvoir payer des toniques. Et voici la réponse de Colette :

Vos ennuis sont bien réels et je les comprends, mais il ne faut pas vous décourager ainsi. Songez à tous ceux dont le sort est encore plus pénible que le vôtre... Cherchez le moyen d'améliorer votre situation, soit en accomplissant à la maison, avec votre mère et votre sœur, quelques petits travaux payants, soit en réduisant peut-être certains item dans votre train de vie... Vos épreuves seront moins lourdes si vous les supportez en bonne chrétienne.

Que trois femmes malades travaillent lorsque les hommes valides chôment ! Vous souffrez de privations ? Le remède : privez-vous encore plus ! Votre sort est pénible : regardez un voisin qui crève, ça va vous mettre du pain dans la bouche ! Vous êtes dans la misère en face de l'abondance mise sous verrou par le banquier : supportez pieusement, ça remplace nourriture et vêtement !

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Suons pour le Chili

Un dépliant imprimé aux frais de la province, à l'occasion de l'Exposition Provinciale, donne le mot d'ordre suivant de l'Honorable Oscar Drouin, c.r., ministre des Affaires municipales, de l'industrie et du Commerce :

L'Exportation, Salut du Québec — Le développement du commerce et de l'industrie dans notre province en est à un point stratégique de son histoire. Les produits les plus variés inondent nos marchés ; mais, hélas ! nous avons négligé de nous préparer à l'exportation. Notre mentalité commerciale doit être transformée : convainquons-nous que le salut de l'industrie, à tous les degrés, réside dans cet impératif : exportons ! Pour cela, révolutionnons, s'il le faut, nos méthodes routinières, notre train de vie, si nous voulons être prêts à envisager bien en face le grand problème de l'heure, l'exportation.

Nos produits inondent nos marchés, et nos maisons en sont vides ! Poussons donc nos produits chez les autres, ça va nourrir nos Canadiens... Mais le but des artistes qui pilotent Québec n'est pas de permettre aux Canadiens de manger, c'est de les faire suer. En quoi Drouin et Bouchard pincent leurs cordes respectives en accord parfait.

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Ni pain ni gîte

De M. Louis Dupire, dans Le Devoir du 19 septembre :

Les journaux d'hier rapportent un fait qui suscite de sérieuses réflexions. Une quarantaine de mères de famille de la paroisse du Sacré-Cœur se sont présentées devant le président du comité exécutif de la ville pour faire entendre leurs doléances. Elles en étaient à leur deuxième pèlerinage.

L'une d'elles a exposé ainsi son cas, qui est celui de ses compagnes : "La semaine dernière, nous avions reçu l'avis de trois jours (de la part des propriétaires). Aujourd'hui, nous sommes sur le pavé pour de bon. C'est le curé Bourassa (curé de la paroisse du Sacré-Cœur) qui nous envoie, car la Saint-Vincent-de-Paul ne peut plus rien faire. Nous avons reçu notre dernier dollar et demi (de la part de cette dernière société) et c'est fini. On s'arrache tout de la bouche pour nos enfants. On voudrait leur donner du beurre... à nous, on le fait payer 26 sous la livre. Aux bureaux provinciaux, parce qu'on est du pauvre monde, on nous regarde avec un petit sourire piteux... On nous fait des promesses, on prend nos noms, puis on ne fait rien."

Voilà le témoignage d'une des pétitionnaires. Lisez celui d'une autre : "J'ai un fils de seize ans qui pèse 76 livres... et l'on fait des discours sur la tuberculose. Pas étonnant que l'on soit malade quand on n'a rien à manger."

Sur quoi M. Dupire remarque :

Les sociétés de charité, quelle que soit leur dénomination religieuse, sont totalement à sec. La raison, c'est qu'elles ont été débordées par une révision subite, mécanique, arbitraire des listes de chômage. Dans cette révision, on est parti d'une détermination arrêtée : faire des économies, c'est-à-dire couper, comprimer, exclure. On prend les moyens d'atteindre cette fin.

Mais économies de quoi ? On a trop de tout. "Nos produits inondent nos marchés," dit l'hon. Oscar Drouin. Pourquoi, au lieu d'établir des agences pour l'exportation de nos produits, le gouvernement de Québec n'en établit-il pas pour l'exportation de nos surplus humains ? Il serait mieux en harmonie avec l'état d'esprit développé par la guerre.

Il y a des gens qui croient que ça va bien pour tout le monde quand ça va bien pour eux, et que ça va mal pour tout le monde quand ça va mal pour eux. Ils oublient que ce qui compte avant tout, c'est le bien commun, le bien de tous. (Mgr P. Desranleau, évêque de Sherbrooke).

Louis Even

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