Nous empruntons à l'Ordre Nouveau du 5 juillet cette "gerbe de faits recueillis par la Ligue Ouvrière Chrétienne de Montréal" :
Dans la paroisse de X..., à Montréal, nous avons visité un logement de trois pièces où habitaient vingt et une personnes.
Dans un magasin se loge une famille : le père, la mère, trois grandes filles, le grand-père et deux garçons.
Deux familles vivent dans cinq pièces. Dix-sept personnes.
Le Bureau de Santé demande à une famille de déménager. Elle est arrivée là le 1er mai et nous sommes au 15.
Deux familles vivent dans trois pièces. La première famille : deux adultes et quatre enfants. L'autre, la mère et trois enfants. On se sert du même poêle pour faire chacun sa cuisine.
Dans une ruelle, dans un logement très sombre et très sale vit une famille : le père, deux grandes filles, un grand garçon, un autre deux ans et un bébé de dix mois. La mère est partie il y a huit mois laissant son bébé très malade.
Dans une espèce de camp vivent cinq grandes personnes de la même famille. Ils vivent là à l'année.
Un père de famille a loué une chambre pour sa famille : deux filles (18 et 16 ans), un garçon de 14 ans et lui.
Dans une autre chambre se logent deux filles (21 et 20 ans), un garçon de 14 ans. En plus on a entassé des meubles, des valises, des paquets.
Dans deux pièces, une famille : le père, la mère et deux bébés. Il n'y a ni gaz, ni électricité. On s'éclaire à la chandelle. La femme (20 ans) est d'une malpropreté dégoûtante.
Dans une chambre vivent, la mère, un bébé de quatre mois et un petit garçon de trois ans. On fait la cuisine dans cette chambre.
Dans une cave près de la rue Sherbrooke vivent : une femme, sa fille (fille-mère) et le bébé de celle-ci. En plus une autre famille, trois enfants en plus et autres garçons. Il y a quatre pièces.
Une famille : le père, la mère, quatre enfants vit dans un logement de quatre pièces. Pour payer le surplus du loyer que la Commission du chômage ne paie pas, on prend un pensionnaire. Une autre famille amie se trouve sans logement le 1er mai. Elle vient habiter avec la première. En plus une fille-mère et deux enfants viennent demander l'hospitalité. On se couche comme on peut et le ménage qui ne peut entrer est laissé à la porte, dans la rue.
Ceci se passe sur la rue de l'Hôtel-de-Ville, à Montréal.
On est au Canada, où abondent le bois, la pierre, le ciment, le plâtre et les chômeurs en bâtiment. Une seule chose est rare — L'ARGENT — et c'est la rareté de l'argent, son absence où il devrait être, qui cause ces privations. L'argent, la chose la plus facile à fabriquer et à distribuer, reste soumis à des règlements faits par les hommes. Plutôt que de changer ces règlements qui font l'affaire de quelques individus, nos gouvernements préfèrent supporter la perpétuation de conditions honteuses qui les accusent et laisseront à l'histoire le souvenir d'administrations lâches et accroupies.
Écrivant dans la tribune libre de La Tribune de Sherbrooke, le 15 juillet, le R. P. D.-L. Grenier, prieur des Bénédictins de St-Benoît-du-Lac, démontre comment la franc-maçonnerie a préparé la perte de la France : loi du divorce, lois anti-religieuses, enseignement athée. D'où destruction de la famille, dénatalité, Front Populaire.
Il signale comment, pendant que la franc-maçonnerie rongeait la France, des grands généraux catholiques, comme Pétain et Weygand, dénonçaient le danger. Mais le gouvernement maçonnique se moquait d'eux.
Le R. P. Grenier termine par ces réflexions :
"L'invasion allemande a été la première condamnation de la Bête maçonnique en France.
"Les nobles, sincères et courageuses paroles de Pétain, dans son manifeste, ont été une seconde condamnation que la Bête ne peut pardonner.
"L'héroïsme de Pétain et de Weygand dépasse tout ce que l'on peut imaginer, car ils ont accepté, en succédant à Gamelin, une situation que, d'avance, ils savaient perdue. Ils ont accepté de porter sur leurs épaules le poids de la défaite préparée par la franc-maçonnerie.
"Et celle-ci, réfugiée à l'étranger avec tout l'argent qu'elle a pu voler au dernier moment à la malheureuse France, insulte les héroïques défenseurs de la patrie, n'épargnant contre eux aucune calomnie.
"Elle envoie ses émissaires partout pour répandre la calomnie contre les plus grands héros que l'histoire ait connus. C'est normal. En bavant sur tout ce qui est grand et saint, elle est dans son rôle de toujours.
"Actuellement, elle accuse Pétain d'avoir donné tels et tels ordres à la flotte française...
"Nous souhaitons à tous ces insulteurs de la vraie France, à tous ces fuyards, à tous ces vendus, l'accueil et le sort qu'ils méritent."
La page 1207 du Hansard introduit l'appendice à l'exposé budgétaire présenté par l'honorable J.-L. Ralston, alors ministre des finances, à la Chambre des Communes le 24 juin dernier.
La répartition centésimale des dépenses est détaillée à la page 48 de cet appendice.
Les dépenses sont classées en dépenses ordinaires, dépenses de capital, dépenses spéciales et entreprises d'État. Ces dernières se composent surtout des débits au compte du réseau Canadien National, 40 millions et demi. Quels sont les pauvres qui bénéficient de cette somme ?
Les dépenses spéciales pourvoient à une réserve pour pertes sur le blé, à l'aide aux provinces, aux projets fédéraux et aux secours directs, mais surtout aux dépenses de guerre de 118 millions sur un total de 207 millions dans cette catégorie.
Mais ce sont les dépenses ordinaires qui retiennent naturellement notre attention, puisqu'elles offrent le tableau normal des dépenses courantes du Canada.
Leur total est de 397 millions. Tous les items, sauf un seul, sont inférieurs à 50 millions. L'agriculture figure pour moins de 12 millions, les pêcheries pour 2 millions, les mines pour 16 millions, les postes pour 36 millions, etc., les pensions militaires pour 42 millions, les pensions de vieillesse pour 30 millions... Mais voici le gros morceau ! Aux pauvres, aux nombreuses victimes du chômage, de la malchance, à ceux qui grouillent dans les taudis ? Non pas. C'est la pension aux riches, et elle se chiffre à 134 millions.
134 millions pour le service de la dette publique. On s'est efforcé de comprimer les autres postes de service public pour mieux faire face aux dépenses de la guerre. Mais le service de la dette publique augmente d'année en année. Aucune compression n'est permise lorsqu'il s'agit de la livre de chair du faiseur d'argent.
Nous avons mentionné ce morceau le dernier. Mais dans la liste des dépenses, non seulement est-il le plus gros, il figure aussi le premier. C'est le privilégié à tous les points de vue. Il dépasse le tiers du total des dépenses ordinaires. À qui paie-t-on ce tribut annuel ?
À M. R. Gaudry, secrétaire de la Ligue des Propriétaires.
25 est, rue St-Jacques, Montréal.
Monsieur le Secrétaire,
Le dernier numéro de Le Propriétaire, édition de juillet 1940, porte un titre qui prête à réflexion : La lutte ne fait que commencer. Plus d'un se demandera : lutte contre quoi ? contre qui ? Car enfin quelqu'un en définitive jouit de l'état de chose actuel. Il serait idiot de croire qu'il n'y ait que des victimes et point de profiteurs ! La question se pose : Où sont les profiteurs ? qui sont-ils ? comment manœuvrent-ils ? dans quel but soulèvent-ils la lutte des classes, car la lutte devient évidente, entre propriétaires et locataires, entre célibataires et chefs de famille ? Y avons-nous songé ?
Jetons un coup d'œil sur le pitoyable état financier du pays ou de la province, et nous constatons que jusqu'ici on n'a trouvé que des calmants temporaires, très peu effectifs d'ailleurs pour la guérison de nos maux.
On pose et repose la sempiternelle question : Où trouver les taxes ? La Demoiselle Propriétaire, dans sa lettre au ministre Drouin, tranche la question des taxes scolaires — évidemment elle n'est pas père de huit enfants : taxons ce père de famille ; plus il a d'enfants, plus la société se doit de le récompenser de cette façon. C'est logique, avoue-t-elle avec candeur ; s'il a eu l'audace et la témérité d'avoir des enfants, qu'il paie pour !... Cette demoiselle a vraiment une haute idée de la famille. Il est surprenant qu'elle ne soit pas docteur en sociologie.
« Les grincements de dents sont inutiles, lit-on ailleurs, c'est l'action qui compte." La Palice n'aurait pas mieux dit !... Mais où voulez-vous la diriger, cette action ? Vers nos édiles fédéraux, provinciaux, municipaux ?
N'avons-nous pas jusqu'à maintenant assisté à leurs embryons d'essais sérieux, après un nombre inouï d'heures de parlotte, pour finir par l'imposition d'une loi toute contraire à leurs visées... et nous aurons bientôt 99 échevins.
On crie sur tous les toits que le propriétaire est trop taxé, et voyez le résultat logique : on le surtaxe et on avoue ingénument que c'est là la norme de la saine administration d'aujourd'hui.
La Demoiselle Propriétaire cite le cas de la Nouvelle-Zélande, où tout est progrès dans le pays. S'est-elle aperçue que le système économique de ce pays différait du nôtre ?
Pourquoi chercher si loin ? Est-ce parce que la conspiration du silence étouffe le bien qui se produit près de nous que nous ne le mentionnerions point ? L'Alberta, le cauchemar des banquiers, n'a-t-elle pas mis au ban un système économique cruel, désuet, inhumain et tyrannique. Messieurs les "Manitous de la Finance" n'ont point digéré qu'une province canadienne pût se dispenser d'eux pour mener à bien une œuvre salvatrice que ceux-là et leurs satellites avaient réussi à gâcher.
Vous en doutez ? Ouvrez les yeux et voyez les faits de l'Alberta : des routes ont été construites, on n'a point créé de ponts de péage, les salaires des institutrices ont été augmentés, eh ! oui, la dette de la province a été diminuée, le chômage disparaissait bien avant la déclaration de guerre aux puissances de l'Axe ; les citoyens sont moins pauvres ; et avec tout cela et bien d'autres choses encore, on a diminué les taxes.
C'est un conte de fée ? Allez à source sûre, c'est là que les aveugles voient... Dans cette curieuse de province, on a mis la finance au service de la population. Ces gens sont-ils assez bizarres !... Nous, nous professont le contraire ; nous suons et peinons pour servir la finance : c'est bien plus intelligent !.
Avons-nous besoin de méditer bien longuement pour constater que là est le bobo ? Qu'avons-nous fait pour le corriger ? Nous continuons nos jasettes et nos velléités d'agir pour nous diriger à l'aveuglette vers la solution d'un problème dont nous nous efforçons d'ignorer les causes réelles et profondes.
Vous ajoutez : "L'heure est très grave, il y a une côte à monter." Oui, en effet, une côte ardue, malaisée, sablonneuse, où les mouches du coche ne manquent point... mais ce n'est pas la côte du Parlement, où s'agitent les pantins de la finance. Ce ne sont pas eux les responsables : cherchez plutôt les doigts habiles qui font agir les marionnettes qui tantôt amusent et tantôt aigrissent.
Aussi longtemps que nous persisterons à garder un système économique qui nous rend esclaves, aussi longtemps que nous ne chercherons pas à reconnaître d'une façon tangible tout travail utile à la société, aussi longtemps que celle-ci ne sera pas bénéficiaire adéquate de ses richesses sans prime payable à la banque, les taxes continueront à pleuvoir drues.
Étudiez notre système économique. Voyez le rôle qu'y remplit la monnaie, pas celui qu'elle doit jouer, mais celui qu'on lui fait jouer : vous découvrirez une cause majeure de nos inutiles efforts à sortir du pétrin. Corrigeons le vice découvert. Nous n'aurons pas par le fait même atteint l'Eden rêvé, mais nous aurons la clef du mystère qui fait que les taxes montent toujours, que le consommateur ne peut jouir d'un objet qu'il a lui-même fait naître.
E. LACASSE, membre de la Ligue des Propriétaires.