Dans la Nouvelle-France, qui nous occupe d'abord et avant tout, actuellement les citoyens sont employés à la construction de deux sortes d'État qui s'édifient : l'État socialiste et le Crédit Social.
Le premier édifice, l'État socialiste, est immense. Ses fondations s'étendent sur le monde entier, sous diverses formes, communisme, nazisme, fascisme, dictature japonaise, ou ordonnances de guerre en attendant le plannisme d'après-guerre.
Cet édifice est une magnifique réalisation de la matière. Toutes les puissances du progrès et de la machine sont réunies en lui pour le bâtir. Dans la splendeur de sa force brutale, il écrase bien la personne humaine en tuant la liberté de l'individu, mais il est un monument aux sciences physiques. Il édifie le génie de l'homme au service des corps. Il monte très haut dans le ciel, et nargue les puissances spirituelles, qui n'ont pas l'impudence de prendre autant de place que lui. Une tour de Babel, quoi !
Et tous les hommes et toutes les femmes de la Nouvelle-France ont un rôle à remplir dans la construction de cet édifice. Les uns y donnent 8 heures, 10 heures, 12 heures, 14 heures par jour pour y gagner leur pain quotidien.
Et le très petit nombre qui trouve sa vie en dehors du régime, contribue à l'édification du socialisme par le paiement des taxes et l'observation forcée des lois socialisantes.
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L'autre édifice qui se bâtit, c'est le Crédit Social. Il est tout différent.
Son idéal, comme le premier, est grand comme le monde, et de plus il est profond comme les aspirations et les puissances de la personne humaine. Il voudrait s'installer partout sur la terre, mais en laissant à chaque peuple le loisir de choisir la manière, car ce qui est la substance du Crédit Social, c'est l'objectif, le but, l'esprit, contrairement au socialisme qui est informé par des règlements, des méthodes, de la matière.
Le Crédit Social a ses fondements, non sur la terre faite d'atomes et de molécules, mais dans l'esprit et le cœur de l'homme, fait de pensées et d'amour. Voilà pourquoi le Crédit Social, au lieu de commencer à s'édifier par des lois du gouvernement, rentre chez les hommes par l'éducation.
Le Crédit Social prend moins de place que le socialisme. Il n'en est que plus solide, ses bases étant toutes spirituelles.
L'édifice lui-même est composé de corps, non pas de corps inertes comme les pierres et les machines, mais de corps humains animés d'une âme. Il s'appelle chez nous l'Union des Électeurs.
Les colonnes de l'édifice ne sont pas, comme dans le socialisme, les fruits d'un calcul d'ingénieur civil ou d'un idéal d'architecte ; elles sont le fruit du cerveau des hommes justes qui voient le bien commun et de l'amour des apôtres qui veulent le bien commun.
Apôtres du bien commun, c'est vous les Voltigeurs du Crédit Social.
Vous êtes cinq mille en Nouvelle-France.
Contre un million et demi d'ouvriers qui donnent les trois quarts de leurs temps pour édifier le socialisme, 5,000 ouvriers qui ne donnent qu'une très petite partie de leur temps pour édifier le Crédit Social.
À côté de toi, Voltigeur, qui travailles 60 à 80 heures par semaine au socialisme et 5 heures au Crédit Social, il y a 300 hommes qui travaillent 60 à 80 heures au socialisme et ne donnent rien au Crédit Social.
En une semaine, lorsque 21,000 heures sont pour le socialisme, 5 seulement sont pour le Crédit Social, en Nouvelle-France le coin du monde, cependant, où le Crédit Social est le mieux organisé.
Pour chaque heure de Crédit Social, 4,200 heures de socialisme — y as-tu pensé, Créditiste ?
Cela ne t'effraie pas ? C'est pourtant une réalité sur laquelle tu devrais méditer.
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Cependant, le Crédit Social fait d'immenses progrès. L'Union des Électeurs, depuis six mois seulement qu'elle fonctionne, a multiplié ses forces par cinq. Et les initiatives se développent. Nos Créditistes entreprennent d'eux-mêmes d'exprimer leur volonté aux élus du peuple, et ils le font très bien, et avec rapidité. Dans deux mois d'ici, nous serons en mesure de présenter 200,000 signatures. Et il est maintenant trop tard pour que quoi que ce soit nous arrête dans cette voie.
Cela te montre, Voltigeur, la force d'un corps qui a la vie en lui. Le socialisme est un corps immense portant en sa substance le germe de la mort, puisqu'il est tout fait de la matière vouée à la corruption. Le Crédit Social est un corps presque invisible qui transporte les montagnes, parce qu'il est tout de confiance et de charité.
En face du grand nombre des socialistes, volontaires ou non, tu prends la résolution de te multiplier pour le Crédit Social, Voltigeur.
En face de la beauté de ton idéal, tu ne t'arrêtes plus, tu vas tonnant et volant, pour sa réalisation.