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Des yeux qui s'ouvrent

le jeudi, 01 juillet 1943. Dans La politique

Deux brochures, toutes deux publiées en Angle­terre, attirent beaucoup, de ce temps-ci, l'atten­tion de ceux qui ne sont pas tout à fait attelés au char de l'École Économique de Londres.

L'une d'elles, dont l'auteur préfère garder l'a­nonymat pour le moment afin de laisser le lecteur juger le contenu sans subir l'influence du nom de l'auteur, est intitulée : "A Twentieth Century Economic System" (Un système économique vingtième-siècle). Des extraits de cette brochure de 48 pages ont été lus par des députés anglais à la Chambre des Communes de Londres.

L'autre, un seize-pages, est le rapport de la Chambre de Commerce de Londres sur les "prin­cipes généraux d'une économie d'après-guerre", publié le 12 mai 1942. Ce rapport de la Chambre de Commerce de Londres déclare accepter généra­lement les principes exposés dans la brochure ano­nyme mentionnée plus haut.

Ni dans l'une ni dans l'autre, il n'est question de Crédit Social ; mais l'une et l'autre admettent qu'­une réforme monétaire équilibrant le pouvoir d'a­chat avec la production offerte s'impose de toute nécessité si l'on ne veut pas retomber dans la pau­vreté en face de l'abondance.

Production abondante, distribution déficitaire

Nos lecteurs reconnaîtront des constatations auxquelles ils sont familiers dans les remarques suivantes du rapport :

"Il est généralement admis qu'il y avait quelque chose de radicalement mauvais dans notre système économique. Il était d'une absurdité palpable pour des nations de chercher désespérément à exporter à d'autres nations plus de richesse réelle qu'elles n'en acceptaient en retour.

"Il était également absurde de refuser à des hommes dépourvus des nécessités de la vie l'argent nécessaire pour se les procurer, simplement parce qu'il y avait une telle surabondance de ces choses que le travail de ces hommes n'était pas requis pour en produire davantage.

"Le facteur limitant de la production de richesse réelle a été le manque de distribution des produits, parce que les consommateurs n'avaient pas l'ar­gent nécessaire pour tout acheter. La production ne continue pas longtemps lorsqu'il n'y a pas d'a­cheteurs. Une production massive exige une con­sommation massive. Il nous faut donc investiguer le mécanisme chargé de fournir le pouvoir d'achat.

"Pendant qu'une révolution étonnante s'est pro­duite dans la science de la production, aucun chan­gement proportionnel n'a eu lieu dans le mécanis­me financier. Le système de distribution de pou­voir d'achat date des siècles de rareté, des siècles dans lesquels c'étaient les produits qui faisaient défaut pour alimenter la circulation."

Disparité à corriger

La Chambre de Commerce de Londres recon­naît donc la présence de produits offerts en abon­dance, mais l'absence de pouvoir d'achat.

Offre possible abondante. Mais demande effecti­ve insuffisante. La demande réelle (celle qui est créée par le besoin) ne manque pas ; mais la de­mande effective (celle qui est soutenue par l'ar­gent) fait défaut.

Le rapport revient sur cette constatation à la page 10 :

"Après la dernière guerre, il y avait dans le monde plus de main-d'œuvre experte, plus de ca­pital-outillage, plus de source de matière première en fonctionnement, qu'au commencement de la guerre. Le monde était donc devenu potentielle­ment plus riche. Cependant, au lieu d'équilibrer la demande effective avec l'offre, accentuant même la demande effective pour stimuler l'offre, on a jeté du capital-outillage au rebut, on a limité ou dé­truit les approvisionnements de matière première, on a empêché des millions d'hommes de produire ; dans quelques cas, on a même payé des hommes pour ne pas produire."

Orientation

"Au lieu d'égaler l'offre à la demande effective (comme par le passé), la Chambre de dommerce préconise qu'à l'avenir la demande effective soit égalée à l'offre."

Parmi les problèmes fondamentaux qu'un systè­me satisfaisant doit résoudre, la Chambre men­tionne donc, sans entrer dans les détails de la tech­nique d'application :

"La distribution interne du pouvoir d'achat (argent) nécessaire pour permettre à la na­tion d'acheter toute sa production. Si cela était fait, la nation pourrait également con­sommer les produits des autres nations qu'elle importerait en échange de la partie de ses pro­pres produits dont elle n'a pas besoin."

Le rapport traite assez explicitement des rela­tions d'échange entre les divers pays, à la lumière des réalités auxquelles le signe doit plier, et non pas d'après un signe contrôlé arbitrairement au­quel les réalités doivent se subordonner. _

Elle et lui

La Chambre de Commerce de Londres compte, comme membres actifs, 9,000 firmes et compa­gnies. En outre, 39 associations commerciales et industrielles, avec un effectif de 50,000 membres, lui sont affiliées et sont représentées dans son con­seil.

C'est donc, semble-t-il, un corps important dont le rapport devrait avoir un certain poids.

Mais ce rapport a le défaut de critiquer la fi­nance "orthodoxe" et de réclamer une économie nouvelle, une économie de distribution "vingtième siècle". Il n'en faut pas plus pour lui fermer les avenues de la publicité.

On fera beaucoup plus de tapage autour des plans sortis des têtes de diplômés de l'École Économique de Londres. Ceux-ci ne font pas mal à la finance orthodoxe.

Au comité fédéral de la restauration d'après-guerre, présidé par le Dr. Cyril James, diplômé de l'École Économique de Londres, on a demandé au docteur James son opinion sur ce rapport de la Chambre de Commerce de Londres. Il a répondu en substance : "Je ne le sais vraiment pas ; je n'ai pas pris la peine de le lire, ou si je l'ai lu, je ne me suis pas appliqué à le retenir." (Hansard, 24 mars, p. 1584).

Le Dr. James préfère ses plans. Ses plans qui ne dérangeront pas la féodalité financière. Ses plans qui, disait-il récemment au Sénat, peuvent aug­menter graduellement la prospérité du Canada tout en ne faisant que doubler sa dette nationale durant les cent prochaines années.

D'abord, c'est à voir si la dette nationale ne fera que doubler en cent ans. Elle grimpe à une autre allure pendant cette guerre-ci, et qui nous garantit que les plans du Dr. James empêcheront une autre guerre ? Ne faudra-t-il pas donner des chances de faire des plans à d'autres faiseurs de plans de son école ?

Puis, pourquoi faut-il que le Canada augmente sa dette lorsqu'il se développe ?

Les gouvernants du jour — les mêmes qui ont lamentablement failli à leur tâche pendant dix an­nées de misère en face de l'abondance — peuvent fermer l'oreille aux voix qui réclament une écono­mie nouvelle et s'en remettre aux derniers des Mo­hicans de l'économie-dette. Mais l'Union des Électeurs grossit et se charge, soit de décrotter certaines méninges, soit de leur désigner un coin dans les musées des antiquités curieuses.

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