Voici des extraits d’un excellent article qui nous a été envoyé par M. Oberto Serra, de France. Âgé de 87 ans, M. Serra est ingénieur géologue géophysicien de l’Ecole Nationale du Pétrole et des Moteurs (ENSPM), docteur es Sciences naturelles (doctorat d’état). Il a écrit plus de 40 articles tant en français qu’en anglais, 11 livres sur les mesures physiques réalisées dans les forages (diagraphies), donné plus de 180 conférences et cours dans 45 pays, et reçu plusieurs distinctions internationales dans le domaine de la géologie. Dans cet article, M. Serra souhaite que la France soit le premier pays à appliquer les principes financiers du Crédit Social; nous aussi, nous le souhaitons de tout cœur ! (Les sous-titres sont de Vers Demain.)
Peut-être comprendra-t-on mieux l'objet de cet appel et acceptera-t-on les propos qui suivent si je rappelle ce qu'écrivait Maurice Allais (1911-2010), prix Nobel de l’économie (1988): « Que l’économie soit au service de l’homme et non l’homme au service de l’économie. »
Albert Jacquard écrivait de son côté: « L'économie semble triomphante aujourd'hui, elle a pourtant démontré son incapacité à tenir compte des critères globaux pour orienter l'activité de nos sociétés. La dilapidation des richesses de la planète et l'absence de toute rationalité dans l'organisation des transports en sont un exemple. Une des tâches urgentes dans la mise en place d'une structure raisonnable de nos sociétés sera de balayer les fantasmes que véhiculent les raisonnements des économistes pour enfin tenir compte de la singularité humaine. » (Mon utopie, éditions Stock, page 153).
Le président (français) actuel, Emmanuel Macron, proclame qu'il va réformer la France. Pour cela il soutient les entrepreneurs en les taxant moins, dans l'espoir de faire baisser le chômage nous dit-il. Ils embaucheront peut-être mais ce sera surtout pour gagner plus en exploitant les employés. Les réformes que Macron veut faire vont développer la précarité comme on peut le constater en Allemagne. Il demande aussi à certaines catégories de Français, les retraités en particulier, de faire des sacrifices, ceci en ponctionnant un peu plus leurs revenus.
En fait tout cela s'inscrit dans un cadre économique, toujours le même depuis des siècles, favorisant surtout les riches et le capital. Toutes ces réformes ne sont que des réformettes qui ne s'attaquent pas vraiment aux différents problèmes sociaux, sociétaux et sécuritaires, liés au système économique actuellement en vigueur dans le monde, système qui favorise la cupidité de certains: quelques milliers de gros entrepreneurs et dirigeants financiers, bancaires, mais également les dirigeants politiques qui le soutiennent.
Oui, l’économie est bien malade. Que constate-t-on en effet ? Qu’actuellement on inverse les problèmes. Demande-t-on des sacrifices pour sauver la science ? Non ! Or ne demande-t-on pas aux populations de « faire des sacrifices », de « se serrer la ceinture » pour « sauver l’économie », cette science certes inexacte mais bien réelle ?
On nous dit qu’on n’a pas l’argent pour réaliser tout ce dont le monde a le plus grand besoin. Faux prétexte si on raisonne un tant soit peu. Tous nos gouvernants ne trouvent-ils pas toujours de l’argent pour faire des guerres qui tuent des millions de gens et détruisent en masse des richesses ?
Pourquoi n’en trouveraient-ils pas pour s’attaquer partout dans le monde à la famine, au manque d’eau, à l’absence de logements, à l’absence d’éducation, d’hygiène, de soins… pour développer les énergies non polluantes et les infrastructures, maux dont souffrent plus de deux milliards de gens ? Tous ces problèmes sont la cause de millions de morts par an. Cet argent les sauverait. Tous ces gens ne représentent-ils pas une richesse ? Serait-ce, dans l’esprit de certains cyniques, un moyen de régler les problèmes de surpopulation ? On n'ose y croire.
Si on se veut humaniste qu’on réagisse en s’appuyant sur la morale et l'éthique, sur la logique et qu’on réforme avant tout notre système économique et qu'on crée cet argent – dont on a détourné la nature, l’objet et la fonction – pour venir en aide à toute la population mondiale.
L'économie actuelle est en effet détournée de sa nature scientifique, comme je l'expliquerai plus loin. De nos jours elle constitue une exploitation éhontée de l'homme par une infime minorité d'individus cupides qui en plus nous rendent esclaves de leurs décisions en contrôlant le crédit et par là la politique, en ayant créé la mondialisation du commerce et tous les monopoles qui s'enrichissent à travers les prix qu’ils imposent en exploitant de plus les travailleurs, surtout ceux du Tiers Monde !
Ils ne savent pas quoi inventer pour faire toujours plus de profit et le plus rapidement possible. Aussi ne les laissons pas faire. N'apprend-on pas que les petits agriculteurs français ne reçoivent que 7 euros pour leurs produits vendus 100 euros, le reste étant distribué aux différents intermédiaires. Et c'est aussi l'acheteur qui est exploité au travers des prix ainsi gonflés ! N'est-ce pas révoltant ? Agissons pour que cela cesse. De plus beaucoup de ces petits agriculteurs ne gagnent qu'environ 350 euros par mois. C'est un scandale surtout quand par ailleurs l'agriculture et l'élevage industriels nous exploitent outrageusement et de plus nous polluent avec leurs pesticides, leurs engrais chimiques et leurs organismes génétiquement modifiés (OGM).
L'économie actuelle n'étant pas au service de la population comme elle devrait l'être, et comme le sont toutes les sciences, même inexactes comme par exemple la médecine, la météorologie…, il faut impérativement la réformer au plus vite ! Si on produit c'est avant tout pour répondre à un besoin et non pour faire du « fric » – qui plus est n’est réservé qu’à une infime minorité: les actionnaires (4% de la population mondiale !), surtout les gros qui spéculent sur tous les fronts, et certains hauts dirigeants financiers, bancaires et politiques !
L'économie doit fondamentalement consister à administrer un pays en établissant en permanence l’équilibre entre la production et la consommation en mettant tous les moyens monétaires à la disposition d’une part des forces créatives permettant de créer et produire tout ce dont le monde a besoin pour vivre décemment et dans la paix, et d’autre part en distribuant à tous les membres de l’humanité les moyens monétaires leur permettant de justement consommer tous les biens et services que cette production met à leur disposition.
Et le maintien de cet équilibre incombe aux dirigeants des États. C'est pourquoi il faut revenir aux fondamentaux. Réclamons une réforme totale de l'économie, s'appuyant, comme déjà dit, certes avant tout sur les valeurs humanistes (liberté, égalité, fraternité…), sur la morale et l’éthique mais aussi sur la logique et les concepts scientifiques détaillés ci-après. (...)
Voyons maintenant quelques concepts scientifiques sur lesquels on doit fonder une nouvelle économie. (...)
L’argent (ou monnaie) n’est pas une fin en soi, ni une plante qui produit des fruits selon les expressions « faites fructifier votre argent ! » ou une marchandise – le « prix de l’argent ! » – qu’on échange ou achète comme des fruits ou légumes, dont en plus on spécule ! On en a détourné la raison d’être et l’objet. L’argent est avant tout la représentation de la valeur des biens et des services offerts afin d’en faciliter les échanges qui ne se font plus par le troc devenu trop compliqué. L’argent disponible devrait ainsi représenter la valeur de l’ensemble des richesses existant en ce bas monde. Or ce n’est pas le cas actuellement.
Voici ce qu’écrivait W.G. Serra, dans L’Évolution humaine - Le Chaos économique mondial - La révolution qui vient, paru en 1950 dans Vers Demain:
« Dans une économie véritablement humaine, ce sont les besoins humains et la demande réelle qui doivent déterminer la production; et la représentation de la valeur des biens produits, donc de l’argent en circulation, doit être fonction de la production, et non l’inverse. Or, dans l’économie actuelle, fondée sur l’échange des biens et des services contre argent – sous toutes les formes que l’argent peut prendre, en particulier le crédit – c’est la production qui est fonction de l’argent existant, de celui qui, sous la forme de monnaie tangible ou sous celle de crédit, est “disponible” entre les mains des acheteurs ou dans les comptes bancaires. Quand toutes les matières premières nécessaires à un programme donné de production sont réunies, ainsi que les moyens techniques et les hommes, il manque encore l’argent, qui seul met en marche le processus de production et la suite du cycle distribution consommation.
« L’argent est ainsi, pour l’économie actuelle, capitaliste, de loin la “matière première” la plus essentielle, sans laquelle il n’y a pas de production. Et l’on sait ce qu’il est, sous sa forme “dématérialisée” de crédit. Créé du néant, le crédit est l’objet, la matière première, la “marchandise par excellence” dont les systèmes bancaires trafiquent; il constitue leurs “earning assets” (avantages en gain), leur actif productif, qui produit un autre objet de nature analogue: l’intérêt ou profit financier.
« Mais, alors que ce crédit représente l’aptitude de la collectivité à produire et devrait être son actif, la propriété de cet actif, par un flagrant abus de confiance et une escroquerie patente, est réclamée et exercée par le système bancaire. Enfin, si l’on considère la motivation de la production, elle gît tout entier dans le désir d’en retirer un profit en argent, comme si l’argent était le vrai but de la production et de l’activité humaine, comme si l’argent était un bien supérieur à tous les biens et services, comme s’il était bien, précisément, cette MARCHANDISE par excellence. »
De plus ce sont les travailleurs qui créent ces richesses donc leur représentation: la monnaie. Maurice Allais n’écrivait-il pas: « Nous déclarons, par le peuple et pour le peuple, que c'est le peuple qui produit tous les biens et services mis sur le marché. C'est donc le peuple qui fait la valeur de la monnaie. Celle-ci n’apparaît pas spontanément dans la nature, comme les biens et services, elle est la création de l’homme. Le droit à la création de la monnaie appartient donc au peuple puisqu’il en fait la valeur. » Quand l’écoutera-t-on ?
La suppression du monopole du crédit, dévolu aux banques privées, est également impérative. En effet la création du crédit est actuellement détenue par les banques qui nous exploitent pour le seul profit de leurs dirigeants et actionnaires. De nos jours le crédit représente près de 93% de l’argent disponible mondialement. Les accords de Bâle III, décidés lors d’un G20 et présentés comme un succès permettant soi-disant un meilleur contrôle des banques, n’ont-ils pas planifié, à partir de 2013, le ratio entre l’émission de crédit et le fond propre des banques à 7% du capital ? De ce fait ce crédit est bâti essentiellement sur le néant comme l’avouait Ralph G. Hawtrey, économiste britannique et ami de John Maynard Keynes: « Le banquier crée les moyens de paiement du néant (ex nihilo)… » ! De l’encre, une plume, du papier et un grand livre suffisent.
Ceci fut confirmé par Josiah Stamp, directeur de la Banque d'Angleterre de 1928 à 1941: « Le système bancaire moderne fabrique de l'argent à partir de rien. Ce processus est sans doute le tour de passe-passe le plus étonnant jamais inventé ! Les activités bancaires ont été conçues dans l'iniquité et sont nées dans le péché. Les banquiers possèdent la Terre. Prenez la leur, mais si vous leur laisser le pouvoir de créer l'argent, d'un coup de plume, ils créeront assez d'argent pour la racheter. Enlevez leurs ce grand pouvoir et toutes les grandes fortunes, comme la mienne, disparaîtront, comme elles devraient le faire, et alors nous aurions un monde meilleur où il ferait meilleur vivre. Mais si vous voulez continuer d'être les esclaves des banques et de payer le coût de votre esclavage, laissez les banquiers continuer de créer l'argent et de contrôler le crédit » !
John Maynard Keynes, l’un des responsables du système économique actuel, disait lui-même à bon droit: « Dans un système bancaire fermé, il n'y a aucune limite à la quantité d'argent bancaire, c'est-à-dire de crédits que les banques peuvent créer en toute sécurité, pour autant qu'elles soient toutes d'accord et marchent en cadence ». Quelle lucidité mais malheureusement peu de gens ont connaissance de ces propos ! C'est dommage et regrettable. (...)
Plusieurs chefs d’État avaient exprimé leurs craintes concernant ce monopole des banques. Napoléon Bonaparte ne disait-il pas: « Quand l'argent d'un gouvernement dépend des banques, ce sont elles et non les chefs du gouvernement qui contrôlent la situation » ? C’est précisément ce qui se passe ! Nos dirigeants sont tributaires du bon vouloir des banques !
De son coté Thomas Jefferson, qui fut le 3e Président des États-Unis de 1801 à 1809, exprimait ainsi ses craintes: « Je crois que les institutions bancaires sont plus dangereuses pour nos libertés que de grandes armées. Déjà ils ont donné naissance à une aristocratie d'argent qui défie et nargue le Gouvernement. Le pouvoir d'émission devrait être retiré aux banques et restauré au Gouvernement et au peuple auquel il appartient […] Si le peuple américain permet jamais aux banques privées de contrôler l'émission de sa monnaie courante, par l'inflation d'abord et la déflation ensuite, la corporation qui grandira ainsi dans son sein le privera de ses propriétés à tel point que ses enfants se réveilleront un jour sans foyers sur le continent même que leurs pères ont conquis. » N’est-ce pas justement ce à quoi on a assisté avec la crise dite des subprimes ?
William Jennings Bryan, membre démocrate du Congrès des États-Unis: « La puissance financière vit sur la nation en temps de paix et conspire contre elle dans l'adversité. Elle est plus despotique que la monarchie, plus insolente que l'autocratie, plus égoïste que la bureaucratie. Elle dénonce comme ennemis publics tous ceux qui critiquent ses méthodes ou font la lumière sur ses crimes. » C’est ce qu’elle fait au travers des médias qu’elle contrôle !
Enfin, plus récemment, William Lyon Mackenzie King, premier ministre du Canada de 1921 à 1930 puis de 1935 à 1948 ne disait-il pas: « Jusqu’à ce que le contrôle de l’émission des devises et du crédit soit restauré au gouvernement comme sa responsabilité la plus évidente et sacrée, toute référence à la souveraineté du parlement ou de la démocratie est inutile et futile. [...] Une fois qu’une nation s’est séparée du contrôle de son crédit, les gens qui font les lois importent peu. [...] Les usuriers, une fois au pouvoir, détruiront la nation. » N’avaient-ils pas tous raison ?
C’est aux États que devrait appartenir le droit à la création de crédit et non aux banques ! C’est à eux qu’appartenait le droit régalien de « battre monnaie ». Ce que font les banques pour leur seul profit, les États ne pourraient-ils pas le faire pour le bien de leurs concitoyens ? Pourquoi nos dirigeants ont-ils abandonné ce droit aux banques ? Pour que leurs dirigeants et actionnaires s’enrichissent à nos dépens ? Quand comprendra-t-on que tout crédit ou investissement ne correspond qu’à un transfert de richesses permettant de plus d’en créer de nouvelles, d’éviter même des dépenses ultérieures et des morts ?
Pourquoi ne mentionne-t-on jamais l’existence du système économique nommé Crédit Social ? Pourquoi cette censure le concernant ? Pourquoi tous les dirigeants refusent-ils d’en discuter objectivement, sans parti pris ni dogmatisme, surtout nos « socialistes », le mot social devrait pourtant leur parler ? Parce qu’il est soutenu par un mouvement catholique du Québec ?
Je crois surtout parce que cela dérangerait les projets des financiers et des banquiers, mais aussi de certains hauts dirigeants industriels, commerciaux et politiques qui profitent du système actuel. Comme le disait, avec justesse pour une fois, John Maynard Keynes lui-même, « la difficulté n’est pas de comprendre les idées nouvelles, mais d’échapper aux idées anciennes. » Échappons donc aux idées anciennes et dogmes économiques archaïques basés sur la cupidité. Réfléchissons et innovons !
Comme Alain Pilote l’explique: « Le système du Crédit Social ne vise à rien d’autre qu’à faire de l’argent un reflet exact des réalités économiques. Il n’est donc aucunement question dans le Crédit Social d’émettre ou imprimer de l’argent n’importe comment, de façon irresponsable ou sans limites (comme se plaisent à le faire croire certains), ou selon les caprices des politiciens au pouvoir. La vraie méthode proposée, la voici:
« Le gouvernement nommerait une commission de comptables, un organisme indépendant appelé par exemple “Office National de Crédit”, qui serait chargé d’établir une comptabilité exacte; l’argent serait émis au rythme de la production, et retiré de la circulation au rythme de la consommation. On aurait ainsi un équilibre constant entre la capacité de produire et la capacité de payer, entre les prix et le pouvoir d’achat. Ce que les créditistes demandent, c’est que le gouvernement cesse d’emprunter des banques privées de l’argent qu’il peut créer lui-même, sans intérêt, par sa banque centrale. »
C’est l’oligarchie financière et bancaire qui est responsable de la misère qui existe dans de nombreux pays dits sous-développés et du déclin qu’on observe depuis plusieurs années dans bien d’autres. N’admettons plus ses dictats ! Qu’on rende à la France, et aux autres États d’ailleurs, la liberté de décider de leur sort et surtout le contrôle des lois, des règlements et surtout du crédit. Qu’on arrête cette mondialisation, cette mainmise des grands groupes industriels et financiers sur nos différentes richesses et activités !
La France, grâce à ses philosophes, ses scientifiques, ses écrivains et artistes, a déjà montré la voie dans bien des domaines. Ne pourrait-elle pas prendre la tête d’une réforme économique qui rétablirait un peu plus de liberté et d’égalité en ce bas monde ? Que la France soit la première à faire cette réforme de l’économie. Qu’elle ouvre tous les crédits nécessaires pour améliorer le sort de sa population qui adoptera sûrement avec enthousiasme ce nouveau système économique dès qu’elle en aura connaissance et qu’elle constatera ses effets bénéfiques.
Oberto SERRA