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Sa mission de député

le lundi, 15 juin 1942. Dans La vie créditiste

Il représente, au provincial, un comté qui se fait de plus en plus créditiste — le comté du Lac St-Jean.

Et dans le comté du Lac Saint-Jean, où le Cré­dit Social a déjà aligné tant de beaux dévoue­ments, l'Association Créditiste recrute aujourd'hui toute une armée pour la libération économique de la province.

L'Association — c'est le mot d'ordre — com­mence par le consommateur. Elle groupe les hom­mes, les femmes et les enfants, pour organiser, en bas, la pression de délivrance qui fera opposition à la pression de domination organisée en haut.

Les électeurs de M. Filion sont donc des ci­toyens éveillés, dont la confiance doit l'honorer beaucoup. Et M. Filion va sans doute les réunir, les féliciter, les aider par tous les moyens possibles.

Pourquoi donc recevions-nous l'autre jour un télégramme de Saint-Joseph d'Alma ainsi libellé :

"Ce matin le député provincial menace les épiciers de leur faire perdre leur licence de bière s'ils acceptent les transferts de l'Association Créditiste."

Si les suggestions que nous faisons transmettre aux créditistes locaux à ce sujet sont suivies, les épiciers intéressés, à la prochaine intervention de leur digne député, le prieront simplement de vou­loir bien signer sa menace. Nous serons heureux de la publier textuellement dans VERS DEMAIN pour l'édification du pays, et particulièrement du public de son comté.

Mais il paraît que la menace est faite dans le plus grand secret. Il faut qu'elle n'ait pas l'air d'être faite, ce serait compromettre l'honneur. Mais il faut qu'elle opère tout de même, pour pro­duire la crainte salutaire et maintenir les mécon­tents dans l'esclavage. En français, cela s'appelle ordinairement du chantage doublé d'une lâche hypocrisie.

Si c'est en cela que doit consister la mission d'un député, il est grand temps qu'on le proclame.

Souhaitons qu'on nous ait trompés. Souhaitons que l'oreille indiscrète qui recueillait les paroles du député n'en ait saisi que des tronçons de phrases.

Pareille méthode, en effet, pourrait-elle sortir des pures et saintes maisons de formation de nos partis politiques ? Que la dictature d'argent me­nace de la famine ceux qui refusent de marcher au geste, on y est habitué. Mais nos politiciens, champions du bien commun, ont l'âme trop noble et le cœur trop plein de l'amour des petits pour se livrer à ces pratiques raffinées de la barbarie mo­derne !

Si toutefois les choses en étaient rendues là, nous, de l'Association Créditiste, en tirerions na­turellement deux conclusions :

    1. Que le gouvernement, tout en prenant pour les puissances que nous combattons, ne peut en­traver ouvertement notre lutte, parce que nous ne faisons rien d'illégal ;

    2. Que l'Association Créditiste a choisi une mé­thode très efficace, puisqu'elle fait entrer en jeu les batteries de l'adversaire.

Aussi allons-nous continuer de plus belle. Quant aux épiciers qui sacrifieraient le Crédit Social pour les revenus du commerce de la bière, nous appren­drons à nous passer d'eux. Les créditistes sont bien décidés à sacrifier la bière, et d'autres choses, pour le Crédit Social.

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