Créditistes, quand vous discutez "crédit-social", conduisez vous-même la discussion. Ne la laissez pas conduire par votre opposant, vous n'arriverez jamais à une conclusion. Vos adversaires sont dans les patates et si vous les suivez, vous le serez vous aussi.
Si vous voulez convaincre vos amis, mettez de l'ordre dans vos débats. Commencez par le commencement.
Posez d'abord cette petite question : Qui fait l'argent ?
Dans 99 pour cent des cas, on vous répondra : C'est le gouvernement.
Deuxième question : Pourquoi est-ce le gouvernement qui fait l'argent ?
La plupart ne se sont jamais demandé pourquoi, parce que le simple bon sens leur dit que cela ne peut pas se faire autrement.
N'allez pas plus loin. Prouvez à votre adversaire que ce n'est pas le gouvernement qui fait l'argent. De quelle façon le prouver ? Vous êtes abonnés à "VERS DEMAIN". Cherchez, relisez vos numéros du journal, vous allez trouver la réponse.
Quand vous aurez trouvé, vous ferez comprendre à votre adversaire qu'il existe deux sortes de monnaie. La première, la monnaie de comptabilité, faite par les comptes de banque. C'est la plus importante, celle qui soutient plus des neuf dixièmes des transactions commerciales. Puis il y a la monnaie de poche : les piastres de papier et la monnaie dure. C'est la monnaie utilisée pour les petits achats ; c'est la monnaie du pauvre, celle dont vous vous servez tous les jours. Elle ne répond que du petit dixième du commerce total. C'est la moins importante des deux. Elle dépend de la première, puisque c'est la première qui fait marcher les affaires.
Quand vous aurez prouvé à votre adversaire que ce sont les banques qui fabriquent et détruisent toute la monnaie de comptabilité et que le gouvernement se refuse à lui-même le droit d'en fabriquer, vous lui direz ce que veut le Crédit Social.
Il est de la plus haute importance de bien faire comprendre à tous ce que veut le Crédit Social. Beaucoup de gens s'imaginent que les créditistes veulent jeter au feu la monnaie actuelle pour la remplacer par une autre faite tout autrement.
Et que veut le Crédit Social ? Actuellement il existe une loi fédérale qui donne aux banquiers seuls le pouvoir de faire l'argent de comptabilité. Or, les créditistes veulent que le gouvernement fédéral retranche cette loi et la remplace par une autre qui donnerait au gouvernement seul le doit de faire la monnaie. C'est tout ce que veulent les créditistes.
Quand vous aurez démontré cela à votre adversaire, il sera mieux disposé pour continuer la discussion. À moins que vous ayez affaire à un farceur ou à un créchard. Avec tel adversaire, il n'y a rien à faire. Abandonnez-le à son insignifiance ou à son foin. S'il est farceur, c'est un insignifiant : il n'est ni utile ni nuisible. Si c'est un créchard, il ne voit que son foin ; plus vous lui parlerez, plus il fera comme le chien à qui on veut enlever un os.
Une fois la discussion orientée dans ce sens, votre adversaire sera heureux d'apprendre que l'argent, quand il est fait par le gouvernement, ne vient pas au monde à l'état de dette. Tandis que l'argent fait par le banquier est toujours une dette. Lorsqu'il manque de l'argent dans le pays et que le gouvernement demande aux banquiers d'en faire, ceux-ci le font de rien et le prêtent au pays à intérêt. C'est ce qui fait que plus le pays se développe, plus il est endetté envers les banques. C'est ce qui fait que dans la province de Québec, nous sommes à reconstruire nos routes pour la troisième fois, et nous n'avons pas encore payé la première façon.
C'est ce qui fait que dans l'Alberta, contrairement à Québec, le gouvernement construit des routes et, quand il les a terminées, il ne les doit pas aux banquiers. Dans la province d'Alberta, on a compris que l'argent devait être fabriqué par le gouvernement et non par les banquiers. Ici, à Québec, monsieur Godbout, qui ne connaît pas deux mots de la question, construit les routes avec l'argent des banquiers et il ne les paiera jamais.
Dr. EUGÈNE FORTIN, M. D.