Comme nous l'annoncions depuis deux mois, l'évolution de notre organisation, ainsi que les circonstances survenues dans l'approvisionnement de certains articles, nous commandent de reviser les méthodes précédentes dans la distribution des marques d'appréciations aux membres de l'Institut qui se dévouent pour la cause. Nous disons "marques d'appréciation", car nous ne voulons pas du tout que les volumes ou autres articles décernés aux travailleurs soient considérés comme des récompenses, encore moins comme une solde. Leur dévouement a trop de valeur pour cela.
Désormais, le facteur temps tiendra une place importante dans toutes les offres. Pas besoin d'être ingénieur pour en saisir l'importance. Si une prise d'eau débite un gallon dans un quart de minute et une autre un gallon dans dix minutes, il est évident qu'on peut toujours obtenir un gallon d'eau de l'une ou de l'autre, mais tout le monde fait la différence entre les deux, parce que la première prend quarante fois moins de temps que la deuxième pour fournir le même résultat.
De même, dans un mouvement comme le nôtre, où il faut aller vite pour dépasser les adversaires, il y a une grande différence entre recruter 15 abonnements dans un mois et recruter le même nombre dans six mois.
Il est peut-être opportun aussi de rappeler la distinction entre les différents groupes qui forment la famille créditiste.
Nous avons d'abord les abonnés au journal VERS DEMAIN, étudiants de la doctrine, commensaux de la même philosophie économique, soutiens, par le dollar de leur abonnement, de l'œuvre d'éducation entreprise par le journal.
Puis viennent les membres de l'Institut d'Action Politique, ceux qui participent à l'expansion du mouvement en prenant d'autres abonnements à l'occasion, dans le milieu où ils vivent et où ils travaillent.
Parmi les membres de l'Institut, nous avons un nombre croissant de personnes qui s'engagent à donner régulièrement plusieurs heures par semaine à l'organisation du mouvement. Ils placent une partie considérable de leurs loisirs à la disposition de la direction. Nous les appelons Voltigeurs. Les Voltigeurs constituent l'armée par excellence du Crédit Social.
Lorsqu'un simple abonné exprime la satisfaction, l'enthousiasme que suscite en lui la lecture du journal, nous l'invitons immanquablement à faire part de sa découverte à d'autres, à devenir membre de l'Institut.
Le membre de l'Institut, lui, prend généralement goût à l'action à mesure qu'il s'y donne. Plus il en fait, plus il veut en faire, et il ne lui faut pas d'habitude un long noviciat pour entrer dans le corps des Voltigeurs, surtout à l'étape actuelle de notre mouvement, alors que nous abordons les réalisations. Il n'est pas rare de voir des abonnés d'hier entrer de plein pied jusque dans l'armée des Voltigeurs. Ils ont compris du premier coup que la lumière est faite pour briller, la chaleur pour échauffer, puis qu'il faut lutter pour vaincre.
À partir d'aujourd'hui, lorsqu'une personne entre dans l'Institut d'Action Politique, pour prendre des abonnements à l'occasion, le bureau de VERS DEMAIN désigne une date à laquelle ou avant laquelle le nouvel I.A.P. pourra obtenir la première année de VERS DEMAIN reliée, moyennant le recrutement de vingt abonnés. Le nombre est donc descendu à 20, mais dans un temps limité. Le nouveau membre de l'I.A.P. est averti personnellement de la date qui le concerne.
À partir d'aujourd'hui, chaque mois nous ferons aux Voltigeurs une offre qui pourra varier, mais qui prendra fin avec le dernier jour du mois.
Par exemple, ce mois-ci, nous offrons la Deuxième Année reliée de Vers Demain (les 24 numéros intégraux), à tous les Voltigeurs qui nous enverront 15 abonnements au cours du mois. Pour obtenir ce volume, il faut donc :
1° Être Voltigeur ;
2° Prendre 15 abonnements ou réabonnements.
3° Prendre ces abonnements d'ici au 30 avril inclusivement.
C'est la troisième condition qui prend en considération le facteur temps, qui demande par conséquent un certain degré de vitesse chez le Voltigeur. Le mois de mai aura aussi son offre, mais le comptage recommencera à un. Si un Voltigeur s'arrête à 14 pendant le mois d'avril, ces 14 ne compteront pas pour le mois de mai.
La distribution se fera à la fin du mois.
Nos Voltigeurs ne travaillent pas pour des récompenses ; mais ils ont tout de même le droit d'aspirer à posséder une collection créditiste. Nous les invitons à commencer sans retard. Ceux qui ont déjà la deuxième année peuvent très bien en gagner un autre exemplaire pour le placer à bon escient, ou encore aider un Voltigeur ami en lui passant le fruit de leurs propres conquêtes. L'esprit social brille parmi nos Voltigeurs.
Ceux qui croient avoir droit à un volume ou à une serviette, aux termes des offres passées, et qui n'ont rien reçu sont priés de faire leurs représentations au bureau de Vers Demain sans retard. Nous recevrons, d'ici le 15 avril, toute réclamation portant sur les activités d'avant le 1er avril. Le 15 avril, nous devrons fermer les livres sur ce chapitre du passé.
Un Voltigeur de St-Laurent Gallichand (Abitibi) nous écrit :
"Je me trouvais ignorant, et j'ai pris mon abonnement à VERS DEMAIN pour m'instruire. Puis je me suis fais Voltigeur, pour m'instruire davantage, me former et aider à pousser les autres à s'instruire.
"J'apprécie beaucoup le zèle que vous mettez, par votre journal, à instruire les autres, les petites gens du peuple comme moi, jusque dans la colonisation.
"Au sujet des visites, je m'aperçois que plusieurs sont trop indifférents et je m'efforce de les réchauffer. La difficulté pour moi est la distance ; j'ai à voir des familles qui sont à quatre milles de chez moi. Ceux-là, je les vois les dimanche quand je dois garder les enfants.
"Je crois que, lorsque les gens seront tous arrivés des chantiers, le mieux sera de les réunir une fois tous les quinze jours à la salle publique ; à moins que je puisse trouver d'autres Voltigeurs et distribuer l'ouvrage. De toute façon, je vais essayer d'y mettre de l'entrain."
Omer DION
Un Voltigeur, chef d'équipe, de Victoriaville, écrit :
"Je lis passablement. Je recherche particulièrement, en ces temps de désarroi universel, les études et les conférences qui traitent de sociologie. Mais ce qui me gâte tout mon plaisir et me tape sur les nerfs au cours de ces lectures, c'est de constater qu'on écrit absolument comme si la doctrine du Crédit Social n'existait pas. On l'effleure de l'aile, parfois on établit même un franc contact avec elle, on va jusqu'à nager dedans, mais on se garde bien de la nommer par son nom.
"Pouvez-vous me dire si ce silence est voulu, ou si c'est inconsciemment qu'on se tait ? Le silence pourrait aussi être imposé. Car enfin c'est une doctrine tellement prenante chez tout homme de bonne volonté, qu'elle devrait engendrer des controverses poignantes d'intérêt, d'où sortirait, j'en suis fermement convaincu, l'évidence du bien fondé de la doctrine créditiste."
Louis BLANCHET
N.D.L.R. — De 1918 à 1923, l'Institut des Banquiers anglais dépensa plusieurs millions pour acheter le silence des organes de presse et empêcher de mentionner le mot Crédit Social ou même le nom de son initiateur, le major Douglas, dans les journaux de Londres et des Îles Britanniques. Ils craignaient une explosion. La doctrine a fini par percer quand même. Les adversaires ont riposté. Mais ils se sont vite aperçus que, plus ils tempêtaient, plus le Crédit Social y gagnait : c'était sa publicité. La conspiration du silence est plus sûre... Chez plusieurs, cependant, c'est pure ignorance. Ils s'abreuvent toujours aux mêmes sources, et le silence, imposé ou volontaire, à ces sources-là, fait que pour eux le Crédit Social est une chose à peu près aussi familière que les textes assyriens pour le commun des mortels.