Suite du dernier numéro
Notre dernier numéro donnait l'exemple d'un pays dont la richesse produite ou importée pendant une année serait 12 milliards, et dont la richesse consommée localement ou exportée pendant le même temps serait 9 milliards.
Ce relevé est supposé fait par un Office National de crédit, dont le but est de mettre le crédit financier en rapport avec le crédit réel, l'argent en rapport avec les faits de la production et de la consommation.
En face de ce relevé, la conclusion suivante est logique, dans une économie où la production existe pour la consommation :
Puisque la consommation de 9 milliards, usure des machines y comprise, a permis la production de 12 milliards, améliorations y comprises, 9 milliards est le vrai prix de la production de 12 milliards. Et puisque le pays a droit à sa production, en autant qu'elle est désirée, il doit pouvoir l'obtenir à son véritable prix, 9 milliards, même si les marchands doivent en obtenir 12 milliards.
Autrement dit, les consommateurs du pays doivent pouvoir acheter 12 avec 9. Ils doivent pouvoir tirer sur la production de leur pays en la payant aux 9/12 du prix marqué.
D'autre part, le marchand doit retirer le plein montant, 12 ; sinon, il ne peut rencontrer ses charges et le profit qui est le salaire de ses services.
L'acheteur ne paiera que 9/12 du prix marqué, si on lui accorde un escompte de 3 sur 12, ou de 25 pour cent.
Une table coûte $12.00 ; elle sera laissée à l'acheteur pour $9.00. Une paire de bas coûte $1.00 ; elle sera laissée à l'acheteur pour 75 sous.
De même pour tous les articles du pays, parce que ce sera un escompte national décrété par l'Office National, pour atteindre le but pour lequel il est fondé.
Si tous les articles de production du pays sont payés ainsi aux 75 pour cent de leur prix marqué, les consommateurs du pays pourront obtenir toute leur production de 12 milliards avec les 9 milliards qu'ils dépensent pour leur consommation.
Si les produits ne leur conviennent pas, ils ne les achèteront pas, et les producteurs cesseront simplement d'en faire parce que ce n'est pas une richesse réelle, parce que ces produits ne répondent pas à des besoins des consommateurs.
Les marchands ne reçoivent ainsi des acheteurs que les 75 pour cent de leurs prix. Ils ne pourront tenir, à moins de recevoir d'une autre source les 25 pour cent que l'acheteur ne paie pas.
Cette autre source ne peut être que l'Office de Crédit National qui est chargé de mettre l'argent en rapport avec les faits. Sur présentation de papiers appropriés, attestant la vente et l'escompte national accordé, le marchand recevra de l'Office National le crédit-argent représentant les 25 pour cent qui manquent.
Le but sera atteint. L'ensemble des consommateurs du pays aura pu obtenir le total de la production du pays répondant à des besoins. Les marchands, et par eux les producteurs, auront reçu le montant qui couvre les frais de la production et de la distribution.
Il n'y aura pas d'inflation, puisqu'il n'y a pas absence de produits en face de la demande. Cet argent nouveau, en effet, n'est créé que moyennant la présence d'un produit désiré et acheté.
Cette émission n'entre d'ailleurs pas dans la facture du prix, puisqu'elle n'est ni un salaire, ni un placement : elle vient après que le produit est fabriqué et coté.
Une autre manière d'arriver au même résultat serait de faire l'acheteur payer le plein prix. Le marchand livrerait à l'acheteur un récépissé attestant le montant de l'achat. Sur présentation de ce récépissé à la succursale de l'Office National du Crédit, l'acheteur recevrait un crédit-argent égal aux 25 pour cent du montant de l'achat.
La première méthode est un escompte compensé. Escompte accordé par le marchand et compensé au marchand.
La deuxième méthode est un boni d'achat, ou ristourne faite à l'acheteur. Le résultat est exactement le même.
Le petit 5 pour cent de l'Association Créditiste est un escompte compensé, si l'on se place au point de vue du marchand. C'est un boni d'achat si l'on se place au point de vue de l'acheteur.
Sans nous étendre davantage sur cette technique monétaire pour le moment, nous ferons remarquer que l'on n'y peut rien comprendre si l'on n'a pas appris à considérer les choses plus que les signes, les réalités plus que l'argent, le service du consommateur plus que le pouvoir d'exploitation du banquier.
La suggestion suivante pourra aider les gens de bonne volonté qui ont de la difficulté à saisir.
Faites abstraction de toute idée d'argent. Supposez que toute la production du pays, même la production de machines, de routes, de biens de capital, soit exprimée en myriatonnes. Également, que toute la consommation du pays, y compris l'usure des biens de capital, soit exprimée en myriatonnes.
Disons maintenant que le pays a produit 14 myriatonnes en une année et qu'il a consommé 7 myriatonnes dans la même année.
Il sera juste de dire : En consommant 7 myriatonnes, on produit 14 myriatonnes. Puisque toutes ces myriatonnes sont désirables, si nous consommions 14 myriatonnes nous serions mieux. Puis, la consommation augmentée augmentera la production. À proportion constante, la production tendra vers 28 myriatonnes.
Décrétons alors que, les actes posées pour obtenir 7 myriatonnes donnent droit aux 14 myriatonnes, cela fera du bien aux consommateurs et haussera la production vers les 28 myriatonnes.
Si la proportion se maintient réellement, la même portée sera laissée aux mêmes actes l'année prochaine : 1 achètera 2 ; 7 achètera 14 ; 14 achètera 28.
Si la proportion ne se maintient pas, c'est parce que la production approchera de son sommet ou que la consommation approchera de sa saturation. Dans l'un et l'autre cas, on doit se conformer aux faits et réduire la vertu conférée aux actes d'achat.
Dans tous les cas, le prix payé par le consommateur doit être la fraction du prix marqué exprimée par le rapport de la consommation totale à la production totale. Autrement, la production n'est que partiellement accessible aux consommateurs pour lesquels elle est pourtant faite.
Ces considérations sont pour les méninges des gens difficiles. Les membres de l'Association Créditiste ont une manière plus pratique de saisir les faits. Ils regardent les choses qui sont dans le domaine de l'Association, les produits Nouvelle-France, et ils augmentent la vertu de leurs actes d'achat pour faire ces choses atteindre leur fin. Ils s'aperçoivent vite que cette augmentation de pouvoir d'achat amorce une augmentation de la production Nouvelle-France.