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Herridge, Nouvelle-Démocratie et Crédit Social

Louis Even le samedi, 01 juin 1940. Dans Crédit Social

Quelques correspondants nous demandent encore quelle est au juste la position des créditistes vis-à-vis d’Herridge et du mouvement de la Nouvelle-Démocratie.

Disons tout d’abord que les Créditistes de la province de Québec n’ont pas besoin de se mettre à la remorque de qui que ce soit pour poursuivre l’idéal du Crédit Social. Notre philosophie catholique nous permet de le mieux comprendre et d’en chercher une plus pure application que les non-catholiques.

Dans son sens étendu, le Crédit Social embrasse toutes les aspirations, dans le domaine social temporel, des hommes vivant en société. Il est donc un credo complet, dans la politique comme dans l’économique.

Cependant, les Créditistes de l’Ouest, constatant qu’il est impossible d’obtenir nationalement le Crédit Social tant qu’on fera consister la démocratie politique dans une politique de partis, de division, se groupèrent autour de l’idée, très juste, de réclamer à Ottawa un Parlement libre, composé d’hommes non inféodés à des partis politiques, mais attentifs à la volonté du peuple. Le mouvement fut baptisé de Nouvelle-Démocratie. Celle-ci, préconisant un parlement libre de partis, ne peut elle-même être un nouveau parti politique, mais un mouvement pour tuer tout parti, dans le sens où l’on entend aujourd’hui ce mot.

NOUVELLE-DÉMOCRATIE ET CRÉDIT SOCIAL

Voici ce qu’en dit Aberhart :

"La Nouvelle-Démocratie est un mouvement politique national — pas un parti dans le sens reconnu du terme. C’est un mouvement, d’un bout à l’autre du pays, du peuple qui, concevant le besoin urgent de réformes saines et ordonnées, s’unit pour affirmer ses droits démocratiques en exigeant les résultats et les conditions qu’il désire.

"À l’opposé de cette conception de la démocratie, nous avons le vieux système de partis qui impose au peuple des résultats que celui-ci ne veut pas avoir : pauvreté, dette, chômage, taxes oppressives, etc. Ce simulacre d’ordre politique ne donne au peuple que l’ombre d’une démocratie et, en réalité, le fait pâtir sous une dictature financière.

"Le Crédit Social et la démocratie nouvelle sont des termes corrélatifs. Le Crédit Social vise à l’établissement d’une démocratie économique qui fonctionne ; la nouvelle démocratie est l’organisation politique dans laquelle peut mieux se développer la philosophie du Crédit Social."

Personnellement, nous ne voyons pas bien pourquoi il soit nécessaire d’introduire un terme nouveau pour désigner ce qu’embrasse parfaitement le Crédit Social pris dans toute l’étendue de sa signification. Nous croyons que c’est une concession faite à des timorés qui tremblaient de prononcer le mot Crédit Social devant des concitoyens préjugés, à des pusillanimes qui n’osaient affronter et combattre les préjugés. Peut- être parce qu’ils cherchaient un succès électoral rapide et croyaient l’obtenir mieux en camouflant une chose pourtant bien belle.

Sous l’étiquette pure et simple de Crédit Social, Aberhart donne à sa province le gouvernement le plus démocratique au monde.

Le groupe réduit des créditistes albertains qui siègent au Parlement d’Ottawa continuera, paraît-il, de s’appeler Nouvelle-Démocratie. En soi, il n’y a pas de mal à cela, mais nous n’y voyons aucun avantage. Nous jugeons, au contraire, que ce sera la source de beaucoup de confusion, au moins dans la province de Québec, surtout depuis l’incursion du Major Herridge dans la politique avec la bannière Nouvelle-Démocratie.

HERRIDGE REJETÉ

À l’école des créditistes, sans doute, Herridge avait appris à dénoncer la servilité de nos gouvernements de partis vis-à-vis de la haute finance. Il entreprit de rallier tous les esprits qui voulaient s’affranchir de cette dictature et placer les richesses du Canada au service des Canadiens. Herridge prononça à cet effet quelques discours qui firent sensation. Non pas qu’il dît plus ou mieux que n’importe quel créditiste qui sait parler. Mais le prestige de son nom et peut- être de sa fortune, dans un monde de gogos, le plaça immédiatement en vedette. C’est lui qui lança le nom Nouvelle-Démocratie et il réussit à se faire accepter comme chef extra-parlementaire par le groupe créditiste d’Ottawa.

Mais vint la guerre, et Herridge se fit immédiatement le champion de la conscription. Il voulut imposer l’acceptation de ses vues personnelles aux partisans de la Nouvelle-Démocratie. Ce n’était plus de la démocratie, mais du Herridgisme.

Nous regrettons que M. Blackmore, dans son discours lors de la session-éclair de septembre dernier, s’exprima de façon à laisser croire que lui-même et tout son groupe étaient en faveur de la conscription. On sait si les faibles s’en sont scandalisés dans la province de Québec, alors pourtant que tous les apôtres et propagandistes du Crédit Social du Québec sont plus opposés que n’importe qui à la conscription.

Les créditistes de l’Alberta sont eux aussi opposés à la conscription. Ils ont clairement déclaré qu’on ne doit même pas penser à la conscription des hommes avant d’avoir d’abord conscrit la finance, c’est-à-dire avant d’avoir repris des banquiers le contrôle de la monnaie et du crédit.

Ils ont répudié Herridge parce que celui-ci s’obstinait à prêcher la conscription et à vouloir l’imposer à des gens qui comprennent la démocratie beaucoup mieux que lui.

CONTRE LA CONSCRIPTION

Voici ce que déclare Aberhart, qui doit bien connaître un peu le sentiment des électeurs de sa Province.

"Les soutiens du mouvement de la Nouvelle Démocratie en Alberta sont définitivement opposés à la conscription des hommes et l’ont déclaré sans ambiguité.

"C’est l’obstination du Major Herridge dans son idée du service national qui l’a écarté du véritable mouvement de la Nouvelle Démocratie et lui a fait perdre son élection.

"Le Major Herridge n’est plus reconnu en Alberta comme chef de la Nouvelle Démocratie et, pour sa politique nationale, il devra se chercher des disciples ailleurs que dans les rangs des soutiens de la Nouvelle Démocratie.

"Le mouvement de la Nouvelle Démocratie est définitivement opposé à la conscription des hommes et au service national proposés par M. Herridge."

Ces paroles de M. Aberhart feront plaisir à tous les créditistes de la province de Québec. Mais nous répétons qu’il eût été beaucoup plus simple de s’en tenir au vocable de Crédit Social, surtout depuis que Herridge a souillé lui-même la signification du terme "Nouvelle Démocratie."

Nous n’eûmes pas autant de patience que M. Aberhart, et, avant même la fondation de Vers Demain les lecteurs de l’Action Catholique purent connaître, dès le 19 septembre dernier, notre idée — celle de tous les directeurs du mouvement dans la province — au sujet de l’attitude de M. Herridge.

Louis Even

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