Qu'est-ce qu'un bon gouvernement ? — C'est, répondrez-vous, celui qui voit au bien commun, à la prospérité commune ; celui qui passe des lois et pose des actes tels que ses administrés puissent vivre normalement, dans la paix et la sécurité.
Vous n'avez pas la sagesse de Banco. Demandez à Banco quand est-ce qu'un gouvernement est bon. Il vous répondra :
Lorsqu'il sait prélever des taxes et payer, jusqu'au dernier sou, l'intérêt sur la dette publique, sur la manufacture de l'argent.
Vous voyez des hommes et des choses, et vous voulez les choses au service des hommes.
Banco voit de l'argent et des hommes, et il veut les hommes au service de l'argent.
Vous avez confiance dans un pays lorsque ce pays peut fournir en abondance de la nourriture, des vêtements, du logement, du chauffage, des services, de l'agrément. Crédit réel du pays.
Banco fait confiance à un pays lorsque ce pays peut lui apporter de l'argent aux termes fixés. Crédit financier.
Vous croyez qu'on gagne une guerre avec du matériel, du travail, le sacrifice de la vie au besoin.
Banco vous fait dire qu'on gagne une guerre avec de l'argent, des taxes, des dettes.
Vous jugez la guerre une grande calamité, suscitée par Satan pour développer des haines et du désespoir, permise par Dieu pour punir ou purifier le monde.
Banco voit dans la guerre l'atmosphère idéale pour établir sa philosophie, river davantage les peuples et leurs gouvernements, centraliser les administrations sous une dictature universelle.
Écoutez un Banco. Rien moins que M. Morris W. Wilson, président et directeur-gérant de la plus grosse de nos banques à charte, la Banque Royale du Canada :
"Pour financer la guerre, le gouvernement devra alourdir et accroître radicalement l'impôt ; ou adopter un système d'épargne obligatoire. Sinon, ce sera l'inflation".
Et sur le rapport Sirois, dont Banco savourait d'avance l'adoption, M. Wilson disait à la même occasion, le 13 janvier :
"Si dans l'exaltation du sacrifice national, on ne peut trouver une meilleure forme de gouvernement, il est à craindre que ce soit impossible lorsque la paix sera revenue."
L'exaltation du sacrifice national à la faveur de la guerre — quelle magnifique culture pour planter la forme supérieure de gouvernement : la centralisation par la finance ! Les temps de paix favorisent moins Banco.
Un autre Banco s'appelle C. H. Carlisle. Ce président de la Dominion Bank est assez bon pour préconiser un remède d'après-guerre au fardeau des dettes dont lui et ses congénères ont doté le Canada :
"Le remède, tel que je le vois, consistera dans des économies rigides — tant personnelles que nationales, — dans une plus grande production et dans l'augmentation du commerce extérieur."
Ça y est : Travaillez dur, produisez beaucoup, achetez peu, fournissez à l'étranger. Serez-vous bien prospères en vous attelant et en vous privant pour essayer de pousser vos produits chez un voisin qui n'en veut pas ? Peu importe. Vous serez dans la bonne voie : la misère noire en préparant une autre guerre.