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Échos des élections d’Alberta - II

le samedi, 15 juin 1940. Dans L'expérience albertaine Aberhart

L'usure légalisée reste de l'usure

Nous disions, en terminant la première partie de cet article, que la grande inconnue encore ignorée de nombre de gens, c'est que tout emprunt en général, si l'on y ajoute les intérêts simples à 5 pour cent, se double, en vingt ans. Grande multiplication, fertile en profit pour la finance, à laquelle s'oppose le Crédit Social.

C'est exactement ce qu'on appelait jadis de l'usure, que l'on punissait même de la peine de mort, et qui de nos jours, par des lois et amendements passés par étapes, petit à petit, tout doucement, est devenue la grande apogée financière tellement en honneur, que l'on qualifie d'arbitraire toute loi qui aurait tendance à vouloir la faire disparaître.

Pour celui qui a conscience du code moral, les lois arbitraires ne sont pas précisément celles qui ont trait à vouloir réhabiliter au peuple son droit de vivre en empêchant que l'on continue de l'exploiter au point qu'il règle lui-même son cas, contre le bien commun de tous, comme l'on peut en juger par certains événements historiques pas encore très vieux.

Les lois justes et honnêtes ne sont pas, que nous sachions, celles qui favorisent l'inertie des capitaux, quand le bien général en réclame la circulation et qui laissent tout un monde croupir et se démoraliser dans la misère, quand les greniers sont pleins au point de recourir au sabotage pour satisfaire aux profits que veulent en retirer certains profiteurs éhontés, qui n'ont de cœur que pour eux-mêmes.

La doctrine du bien commun

La doctrine Crédit Social poursuit l'idéal de délivrer le peuple du fardeau d'obligations qui le pressure, et l'établissement de la vraie démocratie, c'est-à-dire un gouvernement du peuple en général, par le peuple en général, et pour le peuple en général.

Le grand devoir de tout gouvernement étant de légiférer en vue du bien commun de leurs électeurs, il appert que les obligataires de l'Alberta représentent une infime minorité comparativement à la population Albertaine. Les intérêts de ces mêmes obligataires sont parfaitement étrangers à ceux du peuple Albertain et ne sont susceptibles d'aucune comparaison.

Le respect d'un contrat ne persiste qu'en autant que les circonstances permettent aux deux parties contractantes d'en remplir les conditions.

L'on va jusqu'à faire croire au monde que le ministère Albertain fait souffrir des veuves et des orphelins. Les lois Albertaines sont peut-être un peu disgracieuses pour les veuves et les orphelins de New-York, de Londres, de Toronto, de Montréal ou d'ailleurs qui ont placé leur surplus dans certaines obligations provinciales, mais que voulez-vous, il faut bien que les veuves et les orphelins de l'Alberta vivent aussi, et c'est pourquoi l'Honorable William Aberhart, qui a charge des affaires de sa province, vous prie de l'excuser.

Les veuves et les orphelins détenteurs d'obligations albertaines sont peut-être moins à plaindre que les journalistes qui vendent leur plume au profit des dénigreurs du gouvernement Albertain.

Protection au fort ou au faible ?

Les vrais dindons de la farce sont ceux qui ne croyaient guère voir venir le jour où un chambardement radical des vieux partis ferait place à un gouvernement franchement démocratique.

L'on a cru à l'éternelle chanson de la protection perpétuelle du puissant contre le faible, du riche contre le pauvre et voilà que maintenant devant la réalité du risque qu'encourt tout placement, au gouvernement comme ailleurs, l'on met tout en œuvre pour ne pas prendre comme tout le monde sa part de responsabilités.

Dans les derniers quinze ans, les uns se sont vu acculer à la mendicité, d'autres se sont vu réduire de 50% à 75% leur pouvoir d'acquérir, d'autres ont subi des pertes colossales qui les ont grandement affectés. Seuls les détenteurs d'obligations du gouvernement n'ont subi aucune perte quant au capital initial en cause. Pourquoi cette classe privilégiée ?

Quant à l'Alberta, un peu d'historique des événements en cause de 1935 à 1940 jettera un peu de lumière sur les esprits franchement indépendants et soucieux de rendre justice à qui de droit.

Aberhart affronte la finance et ses valets

L'Honorable William Aberhart porté au pouvoir en 1935 se trouve en face d'une caisse vide. Le peuple albertain déjà trop chargé de taxes avait un pouvoir de remettre diminué d'au moins 75%, si l'on compare l'année 1935 aux années de prospérité antécédentes à 1928.

Pour comble, aux frais d'administration, s'ajoute une obligation de $2,846,000.00 devenant due le 1er avril 1936.

Comme tout autre aurait fait, l'Alberta tourne les yeux vers le Fédéral et demande l'Assistance du gouvernement d'Ottawa, le même qui a été élu le 26 mars dernier.

L'on aurait dû s'attendre dans les circonstances que cette demande d'assistance nécessaire aurait été acquiescée sans difficulté. Ce fut le contraire, le gouvernement King pose ses conditions.

Si vous voulez obtenir un emprunt pour vous permettre une administration normale, il vous faut vous mettre en tutelle sous une commission composée de trois membres, le Directeur de la Banque du Canada, le ministre des finances à Ottawa, et un représentant du gouvernement albertain.

C'était le glas de l'autonomie provinciale. C'était l'abandon total et complet de toute administration financière albertaine aux mains de la Finance.

Terre-Neuve, pour un emprunt de guerre en 1914, a fait cette expérience et les maîtres de Terre-Neuve n'accordent que six cents par jour aux Terre-Neuviens pour se payer simplement le luxe de vivre.

Aucun gouvernement honnête et soucieux de ses devoirs pouvait ainsi sacrifier ses électeurs sur l'autel du veau d'or.

En conséquence l'Honorable William Aberhart se trouvait en face d'un refus formel d'assistance fédérale, en des circonstances tout à fait incontrôlables.

L'homme avant l'argent

Que vouliez-vous qu'il fasse ? Grever son peuple d'impôts supplémentaires, et encore il est peu probable qu'il aurait eu la possibilité de collecter les sommes nécessaires dans le court délai qui lui était accordé.

Se rendant compte des conditions qui prévalaient dans le temps, il a en plus suivi l'exemple des financiers qui ont coupé le taux d'intérêt sur les comptes d'épargnes de 3% à 1% et il réduisit le taux d'intérêt de moitié sur les obligations Albertaines.

Ceci, sans doute, n'a pu être à l'avantage de tous les intéressés, il est vrai, mais un fait établi demeure, c'est que dans les circonstances de temps le gouvernement jouissant des prérogatives de l'autorité provinciale s'en est servi cette fois, au grand scandale des grands, au profit du faible et de l'opprimé, et dire qu'il est de ces faibles qui vendent leurs talents aux grands favorisés contre l'intérêt de leurs frères dans la souffrance. À ceux-là ne serions-nous pas en droit de leur demander : "Caïn, que veux-tu faire de ton frère ?"

Dr W. DESROSIERS, M.D.

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