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À quand la "deuxième étape" ?

Louis Even le dimanche, 01 novembre 1942. Dans La vie créditiste

Ce qu'on est convenu d'appeler la deuxième étape de l'Association Créditiste, c'est, en substance, non pas encore le Crédit Social en plein épanouissement, mais le Programme Intérimaire en fonction en Alberta.

C'est l'Associé déposant dans le Trésor Créditiste son argent ordinaire, recevant un montant égal de crédit en échange et achetant cent pour cent avec ce crédit.

C'est, à la fin du mois, l'associé recevant un crédit gratuit, en rapport avec les achats de produits Nouvelle-France qu'il aura faits par des transferts de crédit.

C'est, pour le marchand et le manufacturier, la possibilité de remplacer par de l'argent le crédit qui'ls ne peuvent écouler parce qu'ils sont obligés de s'approvisionner partiellement en dehors de l'Association.

Mécanisme très désirable

Ce mécanisme du Programme Intérimaire — notre Deuxième Étape — est certainement très désirable. Il oblige ceux qui veulent des bonis mensuels à remplacer l'argent de Banco par de l'argent créditiste et à choisir les produits Nouvelle-France. Et en même temps, il garantit le marchand contre les risques de pertes dans ses acceptations de transferts.

Aussi, sommes-nous les premiers à désirer l'introduction de la deuxième étape, et nous travaillons avec ardeur dans cette direction.

Mais il ne faut pas oublier que le fonctionnement efficace d'un tel mécanisme exige trois choses :

1°. — Des consommateurs qui savent où aller faire leurs achats. Pour qu'un ouvrier change son argent en crédit et se serve de ce crédit, il faut qu'il sache où écouler son crédit. Seuls les marchands associés acceptent le crédit de l'Association. Si les consommateurs associés n'ont pas pris l'habitude d'aller chez les marchands associés sous la première étape, comment iront-ils sous la deuxième, puisque, du côté des ouvriers qui ont un salaire à dépenser, la première étape donne tous les avantages de la deuxième ?

2°. — Il faut des marchands associés, qui acceptent et passent le crédit de l'Association. Il n'est pas du tout nécessaire qu'il y ait beaucoup de marchands dans chaque place. Un marchand-général suffit dans une paroisse ordinaire ; ou un marchand de chaque rayon : épicier, boucher, boulanger, laitier, etc. Dans les villes, un par quartier ; dans les cités ; quelques-uns par paroisse.

Mais il ne suffit pas que le marchand accepte les transferts. Il faut de plus qu'il les passe. Il faut donc qu'il apprenne à s'approvisionner chez des producteurs associés. S'il ne le fait pas sous la première étape, où il devrait y être poussé pour écouler ses transferts, comment va-t-il le faire sous la deuxième, alors qu'il aura la facilité de remplacer son crédit par de l'argent de Banco ?

Il ne faut pas perdre de vue l'objectif : remplacer l'argent de Banco par l'argent de la société, par l'argent des créditistes. Tout acte dans le sens inverse recule l'atteinte de l'objectif. Il peut être nécessaire de poser tel acte, mais de moins en moins si l'on fait réellement du progrès.

3°. — Il faut des produits Nouvelle-France. C'est-à-dire qu'il faut des produits offerts au commerce par des cultivateurs et manufacturiers associés. Autrement, où le marchand s'approvisionnera-t-il avec le crédit de l'Association ?

Quand ?

Quand ces conditions seront-elles réalisées ? Lorsque consommateurs, marchands et producteurs auront respectivement fait ce qui est nécessaire pour les réaliser.

Ce n'est pas le caprice, pas même le jugement personnel d'un directeur quelconque de l'Association qui décidera si les préliminaires sont prêtes ou non. Ce seront les faits eux-mêmes. Et les faits paraissent très clairement, en blanc et en noir, dans le livre de l'Association. N'importe qui peut consulter le livre, et tirer la conclusion.

Prenons, si vous voulez, le livre de l'Association Créditiste de la paroisse de Z. Feuilletons les pages l'une après l'autre :

  1. Jules Champoux. - a reçu un crédit familial de $12.00 le 17 juin. Ne s'en est pas encore servi.
  2. Louis Dallaire. - Crédit de $8.00 le 1er juin. N'a passé que 35 sous.
  3. Fortunat Granger. - Crédit de $14.00 le 15 juillet. A passé $7.25.
  4. Bernard Lavoie.  Crédit de $6.00 le 1er septembre. N'a passé que 75 sous.
  5. Eugène Madore. - Crédit de $8.00 le 1er septembre. Pas commencé.
  6. Paul Paradis. - Crédit de $10.00 le 1er septembre. A passé $2.50.

Évidemment, les associés de Z ne sont pas prêts pour la deuxième étape. Ils ne se servent généralement pas, ou à peu près pas, de leur crédit.

Si tous avaient fait comme Fortunat Granger, l'histoire serait différente. Lui a fortifié l'Association tout en s'enrichissant de $7.25. Également, M. Paul Paradis, en deux mois, s'est enrichi de $2.50, plus que deux fois le prix de sa contribution. Mais c'est encore peu. Une famille qui dépense $20.00 par semaine pourrait passer $1.00 de crédit par semaine, $8.00 en deux mois.

Est-ce que les autres ne dépensent rien? Est-ce qu'ils n'aiment pas assez leur famille pour mettre sept ou huit dollars de plus dans leur maison tous les deux mois?

Prenons maintenant le livre d'une autre localité, la ville minière de R. Feuilletons encore les pages l'une après l'autre :

Là, nous allons voir que la plupart des membres se servent de leur crédit, quelques-uns beaucoup, d'autres moins. Dans l'ensemble, à R., les ouvriers associés disposent de la moitié de leur salaire, et même un peu plus, chez les marchands associés. Au-dessus de $22,000 par mois, puisque le crédit passé aux marchands dépasse $1100 par mois.

Voilà une ville où les consommateurs associés pourraient envisager la deuxième étape. Les ou- vriers de R. placeraient plus de $22,000 dans la caisse par mois, tout en achetant exactement au- tant qu'aujourd'hui.

Mais si l'on observe les comptes des marchands, on découvre que les marchands acceptent les transferts, mais qu'ils n'écoulent à peu près pas leur crédit. Plusieurs ont jusqu'à $250.00 de crédit accumulé.

Nous comprenons que les marchands ne se plaignent pas, parce qu'ils ont gagné de la clientèle et augmenté leur chiffre d'affaires; mais le but de l'Association n'est pas atteint, le crédit n'est pas allé jusqu'au manufacturier, jusqu'au producteur primaire.

Impossible d'entrer dans la deuxième étape dans de telles conditions. Les marchands, autorisés à redemander de l'argent pour le crédit non écoulé, sortiraient à peu près de la caisse chaque mois, les $22,000 que les ouvriers y auraient mis.

Le jour où les marchands écouleront au moins une partie importante de leur crédit, c'est qu'ils auront trouvé des producteurs associés pour les approvisionner. Alors, les trois conditions seront atteintes consommateurs achetant à la bonne place; marchands acceptant et passant le crédit; produits Nouvelle-France pour approvisionner le commerce au sein de l'Association.

Comme on voit, c'est une question de faits, et les faits sont clairement enregistrés dans le livre de l'Association. Le petit 5 pour cent a ces effets mer- veilleux: permettre aux associés d'augmenter leur pouvoir d'achat, orienter les achats vers la production Nouvelle-France, faire connaître les hommes sur qui on peut compter et les faits sur lesquels on peut bâtir.

Il n'est pas nécessaire, pour commencer, que tous les stocks des marchands associés soient des produits Nouvelle-France payés avec du crédit. Mais il faut qu'il y en ait au moins une partie, pour que la caisse créditiste ne se vide pas aussi vite qu'elle se remplit.

Sans marchand associé

Il y a encore des paroisses où l'Association est fondée et qui n'ont pas de marchands associés. Des associés écrivent même à la direction de l'Association, pour demander de leur trouver un marchand associé.

Ce problème est à régler localement par les associés eux-mêmes. Soit en augmentant leur nombre pour faire pression sur leur meilleur marchand local ; soit en s'organisant pour acheter collectivement, au moins une partie de leurs provisions, chez un marchand d'ailleurs qui accepte les transferts. Nous ne pouvons nous-mêmes changer la volonté d'un homme malgré lui, ni même faire beaucoup pour l'influencer lorsque nous sommes à quelques centaines de milles de chez lui.

Produits Nouvelle-France

Ce que nous pouvons faire, et, ce à quoi nous nous employons particulièrement à l'heure actuelle, c'est chercher des produits Nouvelle-France et dire aux marchands associés où ils peuvent écouler leur crédit. Cela aura un effet décisif sur les marchands assez intelligents pour comprendre et assez patriotes pour promouvoir la prospérité de leur pays.

Mais nous ne ferons pas le travail du marchand. À lui de placer lui-même ses commandes, en consultant les informations que l'Association lui transmet.

Notre Association ne remplace personne et ne déplace personne - sauf avec le temps Monsieur Banco. Elle est à la disposition des associés pour leur aider à mieux faire ce qu'ils font et à servir leur pays, tout en augmentant leur propre revenu.

Nous n'interviendrons pas, non plus, pour fixer les prix entre producteurs et consommateurs : cela continue comme auparavant. Tout ce que l'Association fait, c'est de permettre un peu plus d'achats et de mettre en rapport les producteurs, les camionneurs, les marchands et les acheteurs associés.

Nous disons aux consommateurs associés : Il y a un marchand associé là pour vous servir en acceptant vos transferts. Nous disons au marchand associé : Il y a des produits Nouvelle-France là, pour les associés que nous poussons vers votre magasin. Nous disons au camionneur - commerçant associé : Il y a un marchand associé ici et des produits Nouvelle-France là. Nous disons au cultivateur et manufacturier associé : Il y a un camionneur associé ici, un marchand associé là, et des consommateurs associés qui attendent vos produits.

Pour le reste, ils le font entre eux.

Louis Even

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