Un ami nous pose la question : "Supposons que, par un hasard providentiel, les représentants du pays à Ottawa soient en majorité en faveur de l'application du Crédit Social au Canada, de quelle façon procéderait-on pour mettre en pratique de si belles théories ?"
Remarquons d'abord que nous n'en viendrons pas là par un hasard providentiel, mais par le résultat de sacrifices, d'efforts et d'études.
Mais comment s'y prendra le gouvernement ?
Comment s'y prend un gouvernement qui veut établir une taxe de vente, par exemple ? Il vote la taxe et il établit le mécanisme pour la percevoir. Quel mécanisme ? Le plus simple et le plus efficace que ses experts peuvent lui suggérer.
Il n'en ira pas autrement pour le Crédit Social. Le Parlement en question passera un amendement à la loi des banques, pour interdire à celles-ci de prêter plus que les dépôts-épargnes de leurs clients — comme les Caisses Populaires. Puis il votera la loi du Crédit Social.
Quant à l'organisme d'application, encore une fois, il y a bien des manières de le concevoir, et tout dépendra du temps et des circonstances. Mais il sera infiniment plus facile à faire fonctionner que les mécanismes, pourtant bien efficaces, de perception des taxes. Plus faciles, parce que tout le monde, marchands comme consommateurs, sera heureux de collaborer avec le gouvernement pour toucher des dividendes et bénéficier de l'escompte national.
On peut supposer, par exemple, la Banque du Canada comme organe d'émission ; les bureaux de poste comme succursales de distribution, tenant chacun un grand-livre du crédit national pour tous les citoyens ressortissant du territoire approprié. Au jour marqué, le comptable du bureau de poste inscrit le dividende comme crédit au compte de chaque citoyen, tout comme un banquier inscrit un dépôt ou un prêt au compte d'un client. De par la loi, ce crédit sera monnaie reconnue.
Pour l'escompte, le marchand se sert de formules préparées à cet effet pour justifier les escomptes accordés et demander un crédit compensateur. Les vérifications sont aussi aisées que dans le cas de la taxe de vente, avec la résistance en moins.