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Crédit Social et Communisme

Louis Even le jeudi, 01 avril 1937. Dans Cahiers du Crédit Social

On a remarqué que plusieurs assemblées récentes, tenues sous les auspices de la Ligue du Crédit Social, furent appelées "assemblées anticommunistes.” Certains nous ont demandé pourquoi. D'autres ont critiqué, opinant que le Crédit Social n'est pas anti quoi que ce soit, mais veut simplement dispenser la richesse non distribuée. C'est justement ce dernier trait qui mettra un frein aux progrès du communisme. Écrit le Révérend Père Lévesque : "Si vous ne voulez ni du communisme ni du socialisme, opposez-leur le Crédit Social. Il met entre vos mains une arme terrible contre ces ennemis."

Vous pouvez comprimer la propagande du communisme en cadenassant ses locaux, en dispersant ses rassemblements, en surveillant ses imprimés, mais il rebondira avec une nouvelle violence si vous continuez de lui préparer le terrain. Les injustices criantes, l'asservissement des masses par une poignée de profiteurs, la lenteur ou la mollesse de ceux qui sont en charge à casser une dictature inhumaine, la prolongation d'une période déjà trop longue de pauvreté au sein de l'abondance, — voilà qui irrite ceux qui souffrent et les tourne vers des doctrines nouvelles. Peut-on les blâmer de chercher des moyens nouveaux quand les vieux font faillite ? Le mal est d'accepter n'importe quoi. Après tout, raisonnent ceux qui sont rendus à bout, ça ne peut pas être pire que ce qu'on a aujourd'hui.

C'est ici qu'intervient le Crédit Social autrement plus efficacement que la répression par la force. Nous ne condamnons pas celle-ci quand on l'oppose à un mouvement subversif dont le programme avoué embrasse la guerre civile. Mais combien plus efficacement vous arrêterez les progrès du communisme, surtout parmi une population foncièrement honnête, laborieuse et respectueuse de l'ordre, en plaçant de la nourriture sur la table, en chaussant des pieds que mordent l'humidité et le froid, en donnant à tous l'accès à des logis hygiéniques et à des vêtements propres et chauds — quand toutes ces choses, et beaucoup d'autres, sont facilement possibles !

Distribuez l'abondance et vous verrez le communisme se retirer bredouille. Le contentement général, la joie dans les foyers, le bon esprit de travailleurs équitablement rémunérés, la sécurité économique assurée par le Crédit Social feront cent fois mieux et plus vite que des coups de bâton sur les têtes, que la mise au cachot qui auréole des chefs ou que les discours les plus éloquents qui ne changent rien.

C'est d'ailleurs ce qu'ont judicieusement fait remarquer en Chambre, à Québec, le Docteur Hamel, Candide Rochefort et d'autres. La récente encyclique du Souverain Pontife contre le communisme attire aussi l'attention sur ce point, sur les causes du Communisme.

Le sens de la mesure s'est perverti dans la tête des exploiteurs avant celle des exploités. Le chauffeur de taxi dont l'Action Catholique du 24 mars notait la remarque, concluait juste quand il disait : "Je suis en service 77 heures par semaine et je ne gagne que $13.50. C'est en violant ainsi la justice que les employeurs préparent le communisme."

Le communisme et le Crédit Social dénoncent les mêmes abus, mais les méthodes de redressement qu'ils proposent sont très différentes. À l'encontre du communisme, le Crédit Social ne veut aucunement attenter à la propriété, il ne recommande pas du tout la collectivisation de l'industrie. Il soutient, au contraire, que l'industrie, telle qu'établie, est parfaitement capable de fournir les produits : pourquoi y toucher ? Pas n'est besoin de bouleverser tout l'ordre social, parce qu'il y a des abus dans un domaine.

Mais il faut absolument réprimer ces abus dans ce domaine. Si vous analysez notre structure économique, vous trouverez que la production marche ou peut marcher à merveille ; le transport des produits également. L'éducation du consommateur n'est pas à faire, il sait parfaitement ce qu'il désire, il n'a pas besoin d'une nuée d'agents de vente pour le lui faire savoir. Le seul obstacle est le manque de monnaie entre les mains du consommateur. Si le défaut est là, pourquoi soigner ailleurs seulement ? Pourquoi s'obstiner à respecter la partie défectueuse du mécanisme ? Ignorance ou lâcheté ?

Si notre mémoire est bonne, c'est M. G. Picard qui remarquait récemment, à propos des assemblées et conférences anticommunistes signalées un peu partout, qu'il serait peut-être opportun de changer parfois de titre et les appeler "assemblées contre les abus du capitalisme.” Nous sommes parfaitement de son avis. Ceux qui ont assisté aux assemblées "anticommunistes" de la Ligue du Crédit Social se sont bien aperçus que pour une dénonciation du communisme on en compte au moins trois du monopole du crédit. C'est d'ailleurs tout à fait logique : la cause prime l'effet. Capitalisme abusif et communisme, même s'ils n'en conviennent pas, tirent exactement dans la même direction : vers la révolution tout droit, le premier en la provoquant, le second en l'accomplissant.

Louis Even

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