La découverte des rayons X, puis celle du radium, ont pendant quelque temps donné de fortes espérances d'une victoire éclatante sur le cancer.
Je me rappelle un cas de cancer de la face traité tout au début et guéri radicalement. Vers 1905, la patiente avait pu se rendre à Paris, et elle est morte plus de trente ans plus tard d'une autre maladie, sans avoir senti quelque manifestation que ce soit du cancer durant sa survie.
Par contre, au cours de mon enquête, j'ai constaté un cancer des rayons X juxtaposé sur un cancer du sein. Ce cas m'a permis d'observer de près l'effet des vitamines sur la cellule cancéreuse vraie et sur les cellules ayant subi la brûlure des rayons X. Je décrirai ces effets plus tard.
Le radium et les rayons X agissent en kératinisant les cellules cancéreuses, mais parfois atteignent aussi les cellules normales environnantes. Ces cellules kératinisées, c'est-à-dire rendues semblables aux cellules de la corne ou des ongles, deviennent insensibles, à peu près inertes, et si la tumeur est totalement enkysté ou entourée, elles restent latentes et inoffensives ; c'est par ce procédé que peut se faire la guérison.
Comme on le voit, le traitement est possible sur des tumeurs de faible volume seulement, et lorsque les cellules malades peuvent être atteintes sans léser les cellules saines. Car lorsque celles-ci sont atteintes elles réagissent, et il se développe un genre de mal aussi dangereux et aussi douloureux, peut-être davantage, que le cancer lui-même. Les multiples amputations subies par le Dr Vaillant de Paris, puis sa mort héroïque, en font foi.
Donc, les rayons X et le radium, tout comme la chirurgie, ne s'attaquent pas à la cause du cancer, mais simplement à ses manifestations locales, à ses effets. C'est pourquoi, ces trois moyens de lutte doivent être appliqués dès le début du mal. Et les résultats sont souvent heureux, si toutes les parties atteintes ou affectées par le cancer peuvent être enlevées ou traitées. Mais plus tard, ou pour les cancers à évolution rapide ou situés profondément, le tableau devient sombre.
La citation suivante indique clairement que la solution n'était pas encore trouvée en 1927 :
"Les affections cancéreuses ont fait l'objet d'innombrables observations, depuis les temps anciens jusqu'à nos jours... Malgré le formidable amoncellement des expériences de laboratoire sur les cancers, malgré la profusion considérable des observations cliniques, malgré la multitude des tentatives thérapeutiques, nous ne sommes pas encore en mesure de préciser les causes certaines des néoplasmes, ni surtout de proposer des traitements véritablement et sûrement efficaces pour les cas avancés, si décevants, dont l'évolution demeure infailliblement fatale. Cette ignorance a fait dire parfois que le cancer était la honte de la médecine" (À propos de la pathogénie du cancer épithélial, par AUGUSTE LUMIÈRE, dans "Avenir Médical" février 1927).
Comme on le voit, LUMIÈRE semble faire exception pour les cas du début, mais il avoue que la médecine est complètement désarmée pour les cas avancés. (En s'attaquant à la cause, si notre intervention est efficace, on peut logiquement conclure que cette intervention vaudra encore contre les récidives, les nouvelles manifestations s'il s'en trouve, et même que l'on pourra prévenir de nouvelles attaques. Voici ce que dit le Dr BONNET-LEMAIRE dans "Le traitement médical des cancers" (1930) :
Jusqu'à ces dernières années, la thérapeutique médicale du cancer était purement symptomatique, et les essais de traitement étiologique étaient des plus réduits. À l'heure actuelle, à la lumière des travaux récents, la thérapeutique médicale du cancer revient à l'ordre du jour".
Nous verrons dans les prochaines chroniques la pathogénie des cancers ou le mode de formation de ces tumeurs.
(À suivre) Reproduction interdite.