Est-il nécessaire que l'argent naisse à l'état de dette ?
Non. Sous notre système bancaire, toute monnaie de crédit naît dans les banques à l'état de dette. Mais le Programme Intérimaire de l'Alberta met en circulation du crédit qui ne nait pas à l'état de dette et qui sert aussi bien à payer le travail et à acheter les marchandises. Sa preuve s'est faite.
Sur quoi est basée la monnaie ?
La monnaie est basée sur ce qui lui donne de la valeur.
Qu'est-ce qui donne de la valeur à la monnaie ?
Ce qui donne de la valeur à la monnaie, c'est la confiance qu'on a qu'elle va circuler et que le pays est capable de fournir quelque chose pour honorer cette monnaie. Dans la mesure où les Albertains ont confiance dans le crédit provincial émis par leur gouvernement, dans cette mesure le crédit provincial y remplace la monnaie de banque, et le gouvernement pourra en émettre autant que ce crédit trouvera des produits et des services pour l'honorer.
Il n'est pas nécessaire que, dans un pays progressif, la dette aille en augmentant ?
C'est même contraire à la logique et au bon sens. S'il en est ainsi actuellement dans les pays civilisés, c'est parce que le système monétaire faux nous impose cette absurdité : tout argent naît en créant une dette impayable. Le Programme Intérimaire met en circulation un crédit libre de dette ; la production de l'Alberta augmente, sa dette diminue et le Trésor Albertain a un million et demi d'argent liquide dans ses coffres. Cela sans majorer les taxes ; au contraire, au lieu d'imposer une taxe de vente, le gouvernement accorde une ristourne sur les achats. Quelle autre province, encore subordonnée au système rothschildien, peut se vanter de pareille situation ?
Qu'est-ce qui doit aller en augmentant dans un pays progressif ?
La production de richesses et le niveau de vie.
Qu'est-ce que la production de richesses attend pour augmenter ?
Elle attend, non pas des besoins, car ceux-ci ne manquent jamais, mais des consommateurs solvables pour absorber la production. La production marche d'après les commandes, les commandes d'après l'argent entre les mains du public. En mettant du crédit provincial, qui sert d'argent, entre les mains du public, le gouvernement d'Alberta augmente l'appel sur la production.
Le crédit émis par le gouvernement est-il aussi bon que le crédit émis par les banques ?
Pourquoi pas ? L'un et l'autre obtiennent des produits et des services dans la mesure où le peuple y fait confiance. C'est pourquoi le banquier essaye de détruire la confiance envers le crédit émis par le gouvernement en le taxant d'inflation. Le Programme Intérimaire prouve qu'une population qui ne se laisse plus berner est capable d'estimer un gouvernement qui la sert au moins autant que les exploiteurs qui la tondent.
Quelle différence y a-t-il entre le crédit provincial (de l'Alberta) et le crédit bancaire ?
Le crédit provincial est accordé en retour d'un service rendu à la province, soit par du travail (comme quand je suis payé $20. en crédit pour avoir travaillé sur la route), soit par la stimulation des échanges (comme quand je reçois $3.60 de ristourne pour avoir acheté pour $120 de produits).
"Le crédit bancaire est accordé en récompense d'une dette, comme quand un entrepreneur signe un billet promissoire de $10,000, ou qu'un gouvernement signe une débenture de $50,000,000.
Le crédit provincial reconnaît le travail fait. Le crédit bancaire escompte le travail à faire.
Le crédit provincial reste en circulation tant que la population lui fait confiance ; personne n'a à le rembourser. Le crédit bancaire sort de la circulation à mesure des remboursements, et ceux-ci doivent dépasser l'émission.
Le crédit provincial marche d'après les faits. Le crédit bancaire va d'après le profit à réaliser pour les actionnaires de banques.
Le crédit provincial sert le peuple. Le crédit bancaire asservit le peuple en ayant l'air de le soigner ; il lui injectera cent mesures de pouvoir d'achat pour lui en soustraire cent-cinq dans un an...
L'usage du crédit provincial en fait naître d'autre, par la ristourne et par l'augmentation de production qu'il suscite, base à nouveaux crédits. L'usage du crédit bancaire oblige à diminuer le total en circulation, ce qui concorde bien avec le plan du profiteur, car il faut continuellement retourner frapper à sa porte et s'engager un peu plus dans la dette. L'usage du crédit provincial hausse donc le niveau de vie, tandis que l'usage du crédit bancaire hausse le niveau de la dette. Service donné d'une part ; servitude imposée de l'autre.
La comptabilité du crédit provincial n'est pas une charge, puisque le client en retire de l'intérêt s'il le place et il en retire une ristourne s'il l'emploie. La comptabilité du crédit bancaire est extrêmement dispendieuse ; puisque l'émission d'un crédit de vingt millions coûte, selon le taux, de dix à vingt millions en vingt ans, de vingt à quarante millions en quarante ans. Les frais de comptabilité épuisent le capital et accumulent sur le dos du peuple des dettes impayables.
Le Programme Intérimaire de l'Alberta et nos emprunts orthodoxes sont là pour prouver toutes ces différences.
L'argent peut-il consister en une simple comptabilité ?
Oui. Le système bancaire le démontre, et le Programme Intérimaire aussi. Le premier ne le proclame pas, car il tire de gros profits, et surtout une grande puissance, de cette comptabilité ; le second l'explique en détail, car il est un bon serviteur.
Mais il faut du numéraire pour soutenir le crédit ?
Dans la proportion où la population d'un pays le veut. Nos banques savent qu'aujourd'hui, un dollar de numéraire soutient facilement dix dollars de crédit.
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Le peuple albertain va probablement s'habituer à user de plus en plus du crédit provincial. En attendant, le Trésor d'Alberta garde en stock une quantité généreuse de numéraire pour répondre à la demande de ceux qui en réclament. C'est une des raisons pour lesquelles il ne va pas plus vite et n'utilise pas immédiatement toute la capacité productive de la province, parce qu'il n'a pas le droit d'imprimer ou frapper le numéraire.
Un gouvernement véritablement souverain, comme le Fédéral, pourrait porter le crédit au niveau de la capacité productive à mesure que celleci pourrait s'affirmer, sans avoir l'œil sur ses billets. C'est le crédit qui serait basé sur la production, et le numéraire sur le crédit, dans la proportion où le public en exprimerait le désir. La crise serait vite réglée à tout jamais. Quand on achète avec du numéraire, qu'est-ce qui change de place ?
Les produits changent de place dans un sens et l'argent dans l'autre. Quand on achète avec du crédit provincial qu'est-ce qui change de place ?
Les produits changent de place, aussi efficacement qu'avec le numéraire, et des nombres changent de place dans les livres du Trésor Provincial. Ce transfert de crédit dans les livres du Trésor peut-il continuer indéfini
ment ?
Oui, tant que quelqu'un ne fait pas le crédit sortir tout à fait des livres du Trésor provincial. Quand est-ce que quelqu'un fait sortir le crédit des livres ?
Lorsqu'il demande du numéraire en tirant un ordre sur le Trésor. Il reçoit des billets de banque ou du métal, et son compte de crédit est diminué d'autant, sans passer à un autre. C'est donc contraire au bien collectif de la province de soustraire le crédit
provincial de la circulation et de mettre l'argent des banques à sa place ?
Oui, et c'est pour cela que la province récompense par une ristourne ceux qui se servent du crédit dans leurs achats. Ce sont de bons serviteurs de la province et du public ; ceux qui détruisent le crédit sont de bons serviteurs des banques et des profiteurs. Mais le crédit provincial ne peut acheter en dehors de la province ?
Pour payer en dehors de la province, force est de retirer du numéraire et supprimer le crédit provincial de la circulation pour la même somme. Mais il y a aussi ceux qui vendent en dehors de la province et qui obtiennent de l'argent ou du crédit bancaire qu'ils peuvent très bien transférer au Trésor, en échange de crédit provincial libre de dette et portant ristourne. Il est donc profitable de développer la production dans la province ?
Oui, et c'est pour cela que la ristourne, pour être au maximum, comporte l'achat de marchandises albertaines dans la proportion d'au moins un tiers. C'est plus efficace que des articles de journaux ou des périodes de rhétorique. Si c'était le fédéral qui tiendrait ainsi un système de comptabilité du crédit - national, y aurait-il une ristourne ?
Ce serait le Crédit Social. La ristourne s'appellerait escompte compensé et serait basée sur les besoins pour équilibrer l'argent avec les prix. La production domestique serait poussée dans les domaines où la production
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peut se faire au Canada avec moins de dépenses d'énergie. Dans le cas contraire, on encouragerait l'échange avec le pays qui produit plus facilement tels produits, lui offrant les nôtres en échange.
Outre l'escompte compensé, il y aurait le dividende à tout le monde, pour assurer un minimum de pouvoir d'achat à tous et à chacun. La monnaie gratuite ne tendrait-elle pas à décourager le travail et à faire
tomber la production ?
Quand l'Albertain qui a fait pour $120 d'achats avec du crédit provincial reçoit une ristourne de $3.60, cette somme de $3.60 est de la monnaie nouvelle qu'il n'a pas gagnée par son travail, mais qu'il reçoit gratuitement à titre de consommateur consommant. Cela lui permet de faire un achat supplémentaire de $3.60. Le marchand va augmenter ses commandes, le producteur va activer sa production et embaucher de l'aide s'il le faut. L'argent gratuit a donc pour effet d'augmenter la consommation, de créer un appel plus grand sur la production, de ramener des travailleurs à l'ouvrage et d'augmenter le niveau de vie pour tous.
A qui va-t-on faire croire que, si je reçois $3.60 de plus que mon salaire, je vais me détacher de mon travail pour autant afin de ne pas améliorer mon niveau de vie ?
Les effets du Programme Intérimaire en Alberta sont encore là pour répondre à ceux qui soutiennent que l'humanité (hormis eux-mêmes) est incapable de recevoir des dividendes sans sé plonger dans le farniente. La comptabilité du Crédit Social serait-elle compliquée.
Les comptables du Trésor en Alberta n'ont pas l'air désemparés. Ils ont pourtant plus à faire que n'auraient ceux du Crédit Social dans un pays souverain où le gouvernement se contenterait de créer les crédits entre les mains des citoyens et ne se mêlerait pas de recevoir des dépôts, faire des opérations de placement et de ventes, etc. Pourquoi en Alberta le Trésor entre-t-il dans ces opérations ?
Parce que, limité dans sa souveraineté, le gouvernement est obligé de trouver du numéraire, et il prend les moyens d'en obtenir. Ce n'est donc pas encore le Crédit Social proprement dit ?.
Non. C'est un pas important. L'Alberta est en guerre, remarquons-le bien, la grande guerre contre la finance internationale, contre la bancocratie. Quand la guerre sera gagnée, ce sera l'épanouissement dans l'intégrité du Crédit Social. L'Alberta seul peut-elle gagner cette guerre ?
Au lieu de poser cette question, entrons hardiment dans la lutte, dans la Ligue du Crédit Social de la Province de Québec, comme d'autres le font dans leurs associations provinciales, pour réclamer du fédéral une législation monétaire créditiste, l'argent canadien au service des onze millions de Canadiens et de Canadiennes.
Si deux ans d'étude ont mis sur pied, dans cette lutte gigantesque, la majorité de la population adulte en Alberta, ne peut-on réaliser la même chose ailleurs et enrôler la majorité des citoyens du Canada pour exiger un service monétaire social ?
Le Programme Intérimaire de l'Alberta prouve la possibilité d'application des propositions créditistes. Il n'existe plus aucune excuse pour rester passifs par scepticisme, encore moins par lâcheté.
LOUIS EVEN