En l'espace d'une génération, l'opinion publique est passée par toutes les couleurs, par tous les courants ; elle s'est exprimée sur les tons les plus opposés dans des fleuves de discours et a passé d'un pôle à l'autre dans des élections à peine espacées de quatre ans.
Et cependant, les banques ont imperturbablement continué de monnayer à leur gré le crédit national, de régler le volume de l'instrument monétaire, de spolier la richesse créée par d'autres en organisant la succession d'années de vaches maigres à des années de vaches grasses.
Qu'est-ce que cela signifie, sinon que l'opinion publique n'a jamais beaucoup ému la finance solidement retranchée ? L'opinion publique n'a jamais dérangé les plans, ni probablement le sommeil, d'un banquier de la haute.
Mais si l'on faisait sentir aux banques la volonté publique, la détermination de tous et de chaque citoyen à jouir d'au moins une honnête aisance dans un pays qui regorge de tout ? Si on leur faisait sentir, cette décision par l'intermédiaire d'un gouvernement forcé de légiférer en fonction de la volonté commune, et non plus en fonction de la volonté des seuls financiers ? Si l'on mettait plus de volonté publique et moins d'opinion publique dans ce qu'on est convenu d'appeler la politique ?
Comment forcer le gouvernement à tenir compte de la volonté commune de ses commettants, plus que de la volonté des brasseurs d'argent ? En faisant pression organisée sur le gouvernement, en faisant les politiciens écouter ceux qui les délèguent et qui les paient.
Et comment faire les politiciens tenir compte des électeurs ? Sera-ce par une union de Politiciens (parti sous un nom ou sous un autre) ? Ou ne sera-ce pas plutôt par une Union des Électeurs eux-mêmes ?
Un faisceau de politiciens fait naturellement la force des politiciens qui le composent. Un faisceau des électeurs fera naturellement la force des électeurs qui le composeront. Rien que ce dernier peut tenir tête au faisceau des banquiers.