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Banalités et plagiat

le jeudi, 15 janvier 1942. Dans Citations

Servis à nos cultivateurs — Pour instruire ou pour tromper ?

Un cours d'Économie Politique et Sociale paraît par tranches dans La Terre de Chez Nous. Auteur parcheminé : M. Gérard Filion, L. S. C.

Nous venons de parcourir la seizième leçon, où l'on parle monnaie. Expliquant le prêt bancaire, qui peut être fait par une inscription de crédit, l'au­teur commente :

"Certains prétendent que, par cette opération, la banque se trouve à créer de la monnaie ; c'est une erreur. La banque ne prête pas de l'argent qu'elle n'a pas ; les crédits qu'elle consent doivent être garantis par de la monnaie qui reste tout le temps dans sa caisse."

M. Filion, s'il a le temps et le moyen de se faire accepter, pourra visiter les colonnes de prêts des banquiers, d'une part, d'autre part leur réserve en caisse, puis conclure.

Par ailleurs, il pourrait nous dire qui met l'ar­gent au monde, puisqu'il y en a, et comment cet argent entre en circulation.

Un peu plus loin :

"Toute cette partie de l'économie politique qui traite de la valeur, des prix et de la monnaie est particulièrement aride. Il s'agit d'un échafaudage savant... Cet échafaudage savant est très délicat et menace de s'effondrer chaque fois que survient une crise économique. En temps normal, il fonc­tionne très bien et tout le monde en est satisfait ; en temps de crise, il subit les assauts des gens qui voient dans le régime monétaire la cause de tous les maux."

Simples questions à M. Filion : Si le chapitre de la monnaie est la partie aride de l'économie politi­que, comment est-ce justement cette question-là qui attire des milliers de gens de la campagne, de la colonisation, des agglomérations ouvrières, à l'é­tude de l'économique et du politique, pour la pre­mière fois de leur vie ? Il serait sans doute plus exact de dire que la question monétaire est restée terrain clos dans le passé, non pas parce qu'elle est aride, mais parce qu'elle fait comprendre trop de choses. Ceux qui ont intérêt à ce que le public ne voie pas trop clair ont pris les moyens de créer l'ambiance de mystère ; d'autres s'y sont prêtés in­consciemment.

M. Filion dit : que le système monétaire, qui va bien en temps normal, "menace de s'effondrer cha­que fois que survient une crise économique". Mais qu'est-ce qui fait survenir la crise économique ? Quelles sont les causes naturelles d'une crise éco­nomique ? Quel tremblement de terre, quelle séche­resse, quelle épidémie a causé, par exemple, la crise économique de 1929 jusqu'à la présente guerre ?

Après avoir écrit : "En temps normal, le systè­me fonctionne très bien et tout le monde en est sa­tisfait," M. Filion écrit dix lignes plus bas : "Ce système monétaire confère à une poignée d'indivi­dus une puissance dictatoriale." Faites la liaison si vous pouvez !

Nous soumettons aussi à la méditation de nos lecteurs, de ceux surtout qui ont dû se priver pendant toute une décade, cette remarque pittoresque sur les causes psychologiques d'une panique :

"Au début de la crise de 1930, les gens, se sont mis subitement à ménager et les prix se sont ef­fondrés."

Donc, si les prix sont tombés, si des agriculteurs ont été ruinés, si la production a été paralysée, c'est parce que les gens se sont mis subitement à épargner. Monsieur Filion ne prend pas la peine de nous dire pourquoi ce virement subit vers l'épar­gne. Non, ce sont les gens qui sont coupables, et coupables de s'être mis à ménager. On nous avait toujours enseigné que l'épargne est une vertu qui s'acquiert par la pratique. Il paraît que c'est une vertu, à condition qu'elle ne soit pratiquée que par un petit nombre. Voilà qu'elle s'acquiert tout d'un coup par tout le monde, et c'est le désordre : les prix s'effondrent...

Décidément, les auteurs de manuels ou de cours d'économie politique qui se copient les uns les au­tres n'avancent pas beaucoup la somme des con­naissances mises à la disposition du public. Com­prennent-ils ce qu'ils copient ? Et ne peuvent-ils rien lire entre les lignes plagiées qu'ils replagient ? L'école des faits, de faits vécus, sentis, sous leurs yeux, ne leur a-t-elle rien appris ?

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